Une étude du ministère de l’Agriculture réalisée par le Cgaer intitulée Transmission en agriculture : quatre scénarios prospectifs à (Ndlr : l’horizon) 2025 estime que la transmission des exploitations agricoles serait intimement liée aux orientations économiques et politiques prises dans les prochaines années.
Depuis 60 ans, les cessions et les transmissions des exploitations agricoles ont autant contribué au remodelage du paysage agricole que la modernisation de l’agriculture et la réduction du nombre d’agriculteurs.
A l’horizon de 2025, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (Cgaer) lie fortement la transmissibilité des exploitations aux orientations de la Pac, aux accords commerciaux internationaux (Omc), à la politique gouvernementale (loi d’avenir de l’agriculture, Ecophyto 2, etc.) et à l’évolution de la conjoncture économique de la France (taux de chômage, croissance, âge de départ à la retraite…).
Dans son étude intitulée Transmission en agriculture 4 scénarios prospectifs à 2025 (sic, après la « loi d’avenir« , il semble que l’on soit décidément fâchés avec la langue française au ministère de l’Agriculture…), les cas d’école présentés par l’étude du Cgaer découlent des réponses apportées aux questions que les experts se sont posées pour réaliser le document. Ces questions portent sur la gestion des risques, qu’ils soient de natures économique, biologique ou climatique, sur la mobilisation du financement du capital d’exploitation, et sur l’acquisition des compétences indispensables à la maîtrise de l’innovation par les agriculteurs.
L’augmentation tendancielle du montant du capital d’exploitation n’est enrayée dans aucun des scénarios présentés. Certains l’amplifient même.
Le recours à des investisseurs extérieurs à l’entreprise s’impose dans deux des quatre scénarios. Des outils juridiques et fiscaux favorisant l’entrée de nouveaux investisseurs au capital des entreprises agricoles seront assortis d’instruments financiers modernes permettant d’assurer la mobilité des capitaux investis tout en préservant la fonction de chef d’entreprise des agriculteurs. Mais le contexte sera moins favorable si la Pac s’inscrit dans la continuité de 2014 ou si elle est plus régionaliste. Le capital des exploitations restera alors familial, voire porté partiellement pas les collectivités territoriales.
Au final, les quatre scénarios de l’étude du Cgaer font écho aux craintes et aux espérances de l’ensemble de la profession agricole pour les années à venir. Le dénouement de la crise, qui affecte l’ensemble des filières animales, en rendra évidemment certains plus vraisemblables que d’autres.
« Des fermes firmes », est le scénario libéral envisagé par le Cgaer en totale rupture avec celui intitulé « Les agricultures héritées » qui s’inscrit lui, dans la continuité de la Pac actuelle (en 2025, l’agro-écologie serait alors légion !).
Délaissée des politiques dans un contexte de prix élevés et volatils (démantèlement des aides Pac suite aux accords commerciaux de l’Omc), l’agriculture serait néanmoins devenue un secteur attractif. « L’environnement » ne serait plus une priorité. L’action publique serait concentrée dans les territoires reculés.
Moins nombreuses, les exploitations seraient totalement intégrées dans les filières ou bien organisées pour être bien insérées dans le marché (regroupements pour la commercialisation de la production agricole).
La forme sociétaire se généraliserait. Les exploitations seraient gérées comme des PME, avec les mêmes moyens juridiques, par des agriculteurs plus jeunes et très bien formés. Le capital serait alors porté par des opérateurs de l’aval et le foncier par des fonds de pension (abandon du statut du fermage et du contrôle de structure), ce qui rendrait la transmission aisée.
Le modèle familial ne serait plus prédominant car les descendants d’agriculteurs ne souhaiteraient pas immobiliser une partie de leurs biens dans l’exploitation cédée.
La libéralisation accompagnée de la politique agricole envisagée par le scénario « Agricultures contractualisées » renforcerait la dimension entrepreneuriale de l’agriculture. Le statut du fermage serait en effet aboli et le bail cessible généralisé ce qui rendrait par conséquent l’agriculture attractive et les exploitations plus facilement transmissibles. Les capitaux des exploitations pourraient être en partie portés par des fonds d’investissement dans les zones agricoles les plus favorisées et par les collectivités territoriales dans les zones de déprises.
La sécurité apportée par la contractualisation très poussée des agricultures avec l’aval compenserait le désengagement de l’Europe après 2020.
Le premier pilier de la Pac soutiendrait la souscription de produits assurantiels et financerait des aides à l’investissement. La régionalisation des aides du second pilier les rendraient plus rurales (rémunération des services environnementaux) qu’agricoles. Mais dans un contexte budgétaire contraint, les inégalités de traitement entre les territoires perdureraient, ce qui ne sera pas sans conséquence sur la transmissibilité des exploitations.
Les troisième et quatrième scénarios, « Des agricultures territorialisées » ou « héritées », tels qu’ils sont envisagées pour 2025 par le Cgaer, freineront la restructuration des entreprises agricoles. La transmission porterait sur des capitaux familiaux ou associés à un portage sociétal qui associerait des tiers ou des collectivités. Les fonds de pension ne s’immisceraient pas dans cette forme d’agriculture.
L’agriculture serait attractive et les exploitations transmissibles si les agriculteurs parviennent à dégager un revenu rémunérateur de leur activité sur des exploitations qui resterait de taille moyenne. Mais privilégier une agriculture de proximité ne mettrait pas pour autant les agriculteurs à l’abri de l’environnement mondial fortement concurrentiel et des marchés volatils.
Le troisième scénario « Des agricultures territorialisées » s’inscrit dans rune régionalisation renforcée de la Pac, avec des orientations qui pourraient être différentes d’un territoire à l’autre.
Mais si la Pac s’inscrit dans la ligne de celle de 2014 (scénario « agricultures héritées »), l’attractivité du secteur ne reposerait pas uniquement sur sa dimension économique. Très liée à des engagements à caractère environnemental, la rentabilité de l’activité agricole dépendrait fortement des choix politiques et budgétaires qui seraient pris. La dimension entrepreneuriale de l’exploitation serait amoindrie et la dépendance des pouvoirs publics renforcée. Et comme les capitaux des exploitations à reprendre seraient importants et peu rentables, comparés aux résultats dégagés, il n’est pas exclu que leur transmission se traduise par un portage transitoire du capital par les collectivités territoriales.
En savoir plus : http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/cgaaer_14035_2016_rapport.pdf (le rapport en question).
Avec la mise en place du TAFTA, une PAC en déroute, des prix au raz des pâquerettes, les fonds de pension et les chinois vont se régaler de la campagne française…
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Je miserais bien sur un scénario mixte. Celui des « agricultures territorialisées » (régionalisation renforcée de la PAC) avec des capitaux d’exploitation évoluant selon le scénario des « agricultures contractualisées ». Ces capitaux seraient « en partie portés par des fonds d’investissement dans les zones agricoles les plus favorisées et par les collectivités territoriales dans les zones sinon de déprises » ou moins favorisées.