Après « comment choisir son pulvérisateur », voici un deuxième volet des dossiers expert ETA Mag : « Comment choisir son semoir monograine ». Un dossier spécial pour aider nos lecteurs à réaliser l’investissement juste : puisque le matériel est coûteux, il doit répondre à certaines exigences de per- formances, et également être adapté au contexte particulier de l’acheteur. Suivez le guide !
Les catalogues des constructeurs s’épaississent chaque année. Il est d’autant plus difficile de s’y retrouver dans la multitude de technologies proposées par les constructeurs.Entre accessoires futiles ou systèmes efficients comment doit-on choisir lors de l’investissement dans un semoir monograine ? Souvent annoncés comme fers de lance d’une marque, les nouvelles gammes de semoirs monograines promettent des technologies de la plus grande précision.
Avant même de s’interroger sur la régulation dernier cri et de sa compatibilité Isobus avec le terminal du tracteur, il est plus judicieux d’identifier les contraintes physiques des graines à semer.
Ce dossier n’a pas la prétention de définir avec exactitude le niveau d’équipement du châssis ou du pack d’options de vos prochains éléments semeurs. C’est surtout une base d’explications et d’échanges pour connaître les contraintes et les solutions techniques. Chaque partie vous éclairera sur les fondamentaux des choix d’équipements pour être autonome dans votre décision.
Au-delà de la configuration de la machine, nous souhai- tons également vous aider pour son dimensionnement. Qui s’est déjà donné la possibilité de réduire son inves- tissement de deux rangs pour investir dans une option complémentaire ? C’est pourtant une possibilité pour répondre à des contraintes de budget. Pour adapter le dimensionnement sans risquer le suréquipement il est indispensable d’estimer les jours effectifs disponibles pour semer toute la surface dans des fenêtres météos parfois restreintes.
Chez Väderstad, on aime les grandes largeurs.
Ne serait-il pas judicieux d’investir dans des éléments semeur dernier cri sans accroitre le prix du semoir ? C’est possible sur bon nombre de semoirs monograines en adaptant au plus juste la largeur nécessaire. Lors du renouvellement, économiser deux rangs offre parfois la possibilité d’accéder à une option de plus de 10 000 € ou tout simplement de réduire drastiquement votre coût de revient. Dans tous les cas, même en conservant la même largeur de travail, vous avez tout intérêt à estimer un débit de chantier suffisant pour garantir une implan- tation réussie.
Même si l’on associe souvent les semoirs de précisions à la culture du maïs, bon nombre de constructeurs proposent des châssis indexables, à inter-rangs variables, et donc polyvalents pour s’adapter à des implantations de colzas, tournesols, betteraves et protéagineux. Le levier principal pour diminuer le coût de revient d’un matériel est son occupation annuelle. Avant même de négocier une remise sur l’investissement du semoir, augmenter la surface ensemencée de 50 hectares réduit significativement le coût par hectare.
Les charges fixes annuelles s’élèvent trop souvent au-delà de 1000 € tous les 100 hectares semés, c’est pourtant un plancher de référence à traverser. Un semoir indexable augmente la valeur d’achat de 25 à 50
%, la surface à semer devra étrangement doubler pour atteindre un coût de revient par hectare équivalent. Pour dimensionner le semoir et son débit à l’hectare corres- pondant, il faudra donc uniquement définir la surface à semer sur son exploitation.
Le calcul de dimensionnement étant réalisé pour l’activité la plus exigeante en débit de chantier, il est préférable d’estimer la largeur du semoir pour la fenêtre météo la plus courte. C’est ainsi qu’il est parfois plus judicieux d’investir dans un semoir plus large, malgré une surface implantée annuellement en deçà de la capacité théorique de la machine. Exemple = 120 hectares.
Par expérience vous connaissez les dates à ne pas dépasser pour implanter le maïs dans de bonnes conditions. Il faut surtout prendre en compte votre type de sol, l’évolution des températures ainsi que le potentiel de la variété choisie. Ainsi, la période optimale doit être définie avec les dates limites de semis qui ne pénaliseraient pas le potentiel de rendement. Chercher à raccourcir cette période vous obligera à augmenter votre débit de chantier ou semer en conditions moyennes qui pénalisent la régularité de semis. Retenez tout de même que la qualité d’implantation peut impacter de plus de 10 % la productivité d’une parcelle. Exemple = du 1er au 15 mai.
Les semis de précision sont souvent chronophages pour leur préparation. Il faut anticiper les déchaumages ou labours tout en cumulant parfois avec les premières récoltes de printemps ou des traitements. Si l’on additionne les astreintes propres à un éleveur, toute la main-d’œuvre de l’exploitation est plei- nement sollicitée. Pour pallier à cette charge il est tentant d’investir encore une fois dans un semoir plus large ou plus rapide.
Selon l’Insee, les matériels de semis ont vu leur prix croître de 23 % depuis 2007, tandis que le Smic n’a augmenté « que » de 15 % sur la même période. En considérant les difficultés de recrutement, il sera alors toujours préférable d’investir dans la technologie plutôt que l’acier d’un châssis plus large. En considérant la période optimale, il faut estimer le nombre d’heures relégables au semis sur chaque journée en moyenne. Exemple = 8 heures par jour.
La régularité de semis est conservée avec des semoirs dits « rapides », à plus de 14 km/h. Attention toutefois car la vitesse de semis admissible est plus dépendante de la prépa- ration du sol que de la technologie du semoir. La puissance disponible et le relief de l’exploitation peuvent aussi limiter la vitesse d’avancement.
Soyez également vigilant à l’incidence sur la facture : alors qu’un semoir six rangs à soc est disponible pour moins de 20 000 €, vouloir semer à plus de 12 km/h imposera un inves- tissement de près de 50 000 € pour la même largeur de travail. Exemple = 6 km/h
Le débit de chantier est proportionnel à la vitesse d’avan- cement et à la largeur de l’outil. Ceci dit, le temps passé lors des demi-tours et des remplissages de trémies pénalise diffé- remment le débit de chantier réel. Même si l’on admet qu’un tiers du temps est consacré aux manœuvres dans une parcelle il faut rajouter les temps de déplacements et autres temps morts (pannes, imprévus). Le morcellement du parcellaire va également pénaliser votre performance journalière. Dans le cas d’utilisation d’un semoir « rapide », la vitesse d’avancement étant deux fois plus élevée, le pourcentage de temps annexe est alors augmenté.
Un élément semeur conventionnel, oscille entre 0,25 et 0,33 hectare par heure (ha/h) tandis que les plus véloces peuvent atteindre les 0.8 ha/h. En fonction du nombre de rangs de votre semoir, de votre vitesse d’avancement et du débit de chantier réel (temps annexe inclus) vous pouvez estimer le rendement par élément semeur. Si vous emblaver 7,5 hectares en quatre heures avec un semoir six rangs, on obtient le calcul suivant pour illustrer notre exemple : 6,5 ha / 4 h / 6 rangs = 0,3125 ha/h/rg. Exemple = 0.27 ha/h/rg.
La collecte des données météorologiques est indispensable pour cette étape. L’historique de pluviométrie sur 10 ans est une base solide pour estimer les jours disponibles « agrono- miquement » pour réaliser les semis (de maïs dans l’exemple suivant). Même si l’on sait tous que le temps est imprévisible, il s’agit là du seul moyen d’estimer la durée des fenêtres météos à notre disposition sur la période optimale définie précédem- ment. Le tableau suivant illustre une prévision des JAD (jours « agronomiquement » disponibles) en prenant en compte des limites de pluviométrie que chacun devra estimer.
Trop d’investissements sont réalisés en fonction de l’année la plus critique. C’est un moyen de sécuriser les travaux mais surtout être sûr de subir une sur mécanisation onéreuse. Le surcoût d’un semoir pour implanter la même surface en trois ou huit jours demande souvent un effort de 10 000 à 15 000€. A partir de l’estimation des JAD précédente, vous pourrez déterminer la fenêtre météo optimale, atteignable huit années sur dix. Il suffit pour cela d’éliminer les deux années les plus critiques. Exemple : 6 JAD.
Afin de ne pas tomber dans le piège classique de l’augmen- tation de largeur ou de débit de chantier, il est indispensable de réfléchir au dimensionnement optimum. Ceci sous-entend de considérer la surface à semer et la disponibilité en main d’œuvre. Les calculs et estimations réalisés jusqu’ici vont permettre de définir un nombre de rangs pour assurer un semis huit années sur dix.
Dans notre exemple, un semoir huit rangs semble trop limitant pour semer en bonnes conditions. Soit l’investisse- ment se réalisera en 12 rangs conventionnels et est également possible en semoir huit rangs à élément dits « rapides » pour passer la barre des 0,4 ha/h/rang. Surface (ha) ÷ JAD (jours) ÷ Disponibilité quotidienne (h/jour) ÷ Débit réel par élément (ha/h/rang). Exemple : 120 ha ÷ 6 jours ÷ 8 h ÷ 0,27 ha/h/rg = 9,25 rangs.
Pour adapter le dimensionnement sans risquer le suréquipement il est indispensable d’estimer les jours effectifs disponibles pour semer toute la surface dans une période optimale. Ces jours agronomiquement disponibles fluctuent selon plusieurs variables : pluviométrie, temps de ressuyage, jours chômés et période optimale de semis pour chaque culture. On pourra ainsi choisir la largeur du semoir optimale qui permettra de couvrir notre surface statistiquement tous les ans lorsque 40 à 60 % des journées de travail sont impraticables.
A cela viennent s’ajouter des critères qui feront varier les temps annexes : vitesse de semis, temps de ravitaillement, transports, réglages. Il ne faut pas oublier que, malgré ces critères d’optimisations économiques, une largeur de cueilleur, d’arracheuse ou de bineuse engagera l’investis- sement d’un semoir à largeur et inter-rangs équivalents.
Le gabarit routier est souvent cité comme premier critère de choix d’un châssis. Pour autant, son mode de transport influence également les performances aux champs.
Ainsi, un semoir traîné demandera beaucoup moins de puissance qu’une largeur équivalente portée. Même si le surcoût dépasse régulièrement 10 000 €, il faut comparer le gain potentiel en coût de traction. Le poids total du châssis sera contrôlé dans le cas des implantations sans labour pour garantir un report de charge suffisant sur les éléments semeurs.
Enfin, les performances auxiliaires du tracteur déter- mineront les critères de choix de régime de turbine, de fonctions et débit hydraulique. Soyez vigilants lors d’un changement de semoir pour une largeur ou des inter- rangs différents : les voies de tracteurs ainsi que les cadences de jalonnage devront être adaptées. Les choix d’équipements de fertilisations sont d’abord dictés par la forme de l’engrais : liquide, granulés ou poudreux. Pour ces derniers intrants, veillez à ce que la dépose du micro granulateur se réalise à l’endroit voulu : dans le sillon ou sur le rang. En raison de la variété de produits appliqués au semis, il faut s’assurer que les dosages seront respectés sur le semoir quelle que soit la formulation de l’intrant (anti limace, insecticide, engrais micro granulés…).
Du châssis jusqu’à la mise en terre, l’ajout de capteurs combinés à un affichage chargé de données en cabine nous fait parfois oublier l’essentiel. Au-delà du simple contrôle du respect de densité, c’est bien à l’opérateur de s’assurer de la qualité de l’implantation.
Nous sommes convaincus que les semoirs monograines construits au titre de l’électronique embarquée offrent une plus grande fiabilité que ceux inspirés de la mécanique à papa. Même en remplaçant les contrôles des chauffeurs par des capteurs high-techs nous constatons que la question de la qualité du semis reste posée, notamment parce que ces semoirs sont paramétrés par des hommes. Tout en cherchant à définir le meilleur semoir de précision du marché, la performance technique ne doit pas dispenser de descendre du tracteur. Dans le cas d’une anomalie au semis de maïs, ne dit-on pas simplement que la faute est due à la machine ? Pour corriger ces déceptions d’implantation on se doit de remplacer les pièces maitresses d’un semoir plus âgé ou réinvestir dans une technologie plus récente. Afin de contrôler son propre semis, dressons les points majeurs qui conditionnent la sécurisation de la levée et influencent directement le potentiel de rendement.
Le premier critère de déception est souvent lié au non-res- pect de la densité. Que la distribution soit contrôlée par la rotation d’une roue porteuse ou par les impulsions d’un capteur, la densité réellement implantée est rarement équivalente à la consigne. Des essais révèlent des écarts de rendements d’ensilage de 6,3 à 18,8 q/ha sur des distributions de semoir non étalonnés. Pour cela il faut compter le nombre de graines sur une distance de contrôle (voir le schéma, source Monosem). Il sera plus facile d’identifier les graines si l’on procède ponctuellement à un semis en surface lors des premiers passages. Il suffit de multiplier le résultat par 1000 pour connaître la densité réelle que le semoir est en train d’appliquer.
Le second contrôle concerne la précision de placement des graines de maïs. La vitesse et les rebonds d’éléments semeurs sont souvent discriminants pour un placement régulier. On attend du semoir qu’il soit capable de bloquer chaque graine à emplacement régulier avant son recouvrement sans que celles-ci ne bougent dans le sillon. Pour évaluer la précision d’espacement il faudra alors déterrer 11 graines à la profondeur de semis. La distance qui sépare la première et la onzième graine sera divisée par 10 afin de connaître si l’espacement moyen est bien respecté. Une marge d’erreur de 5 % maximum doit être tolérée par rapport à l’espacement réel calculé grâce au contrôle de densité précédent.
La dynamique de levée de maïs parfaite est obtenue lorsque les cotylédons lèvent tous sur une période de 48h. On a pu relever qu’un décalage de stade d’une feuille risque d’entraîner une perte d’une tonne de matière sèche par hectare. Pour atteindre une levée la plus homogène, le premier critère est la régularité de profondeur. Le contrôle au champ devra se réaliser sur plusieurs endroits dans la parcelle et sur tous les rangs du semoir. On creuse dans le sillon afin de retrouver une graine, on appuie un réglet sur la semence, puis on égalise le sol en surface pour déterminer la profondeur de semis réelle. Le rappuyage de la graine est un critère complémentaire à la régularité de profondeur. En effet, un rappuyage efficace peut faire gagner 24h sur la levée de certaines cultures.
Lorsque l’on multiplie le nombre d’accessoires de plombages, de mise en terre ou de fer- meture de sillon, il n’est pas rare de compter plusieurs centaines de versions d’éléments semeurs chez un même constructeur. Voici quelques notions pour s’y retrouver.
Plus on se rapproche de l’élément semeur et plus les critères de choix sont déterminants. La suspension du parallélogramme devra surtout dépendre de la façon culturale. Même si en semis direct on cherche à stabiliser une charge supérieure à 200 kg, certains maraîchers équipent leur semoir de précision de ressorts d’allègements dans les terrains les plus meubles.
Pour préparer la ligne de semis, les choix sont multiples. Les chasse-mottes sont réservés aux préparations sur labour tandis que les coutres circulaires (parfois gaufrés) assurent la fissuration en amont du sillon lorsque le semis se réalise sous couverture végétale. Les chasse-débris sont les plus polyvalents et se montrent indispensables en semis simplifié. Leur coût s’élevant à près de 400 € par rang et leur manque de compatibilité avec certains coutres restent leurs principaux inconvénients.
Concernant la mise en terre, les semoirs à socs conservent une part de marché en raison de leur prix moins dis- pendieux. La mise en terre par double disque et roue de jauges latérales a su révéler des qualités de mise en terre sans pénaliser la précision de placement de graines. Un soc en pointe placé entre les deux disques assure une formation de sillon pour le blocage de graines. Même si certains constructeurs proposent d’adapter cette pointe à la consistance du sol ou la taille de la graine, c’est surtout son usure qui compte. Des essais sur des semis de maïs ont montré qu’un semoir mal équipé multiplie sa précision de placement par deux lorsque l’on adapte les bons socs entre les deux disques ouvre sillons (le coefficient de précision à 3 cm, CP3, passe de 26 à 53 %).
Qui n’a pas été séduit par une nouvelle distribution séduisante à haute vitesse ou une roue de fermeture garantie polyvalente ? L’équipement que l’on souhaite n’est pas toujours celui dont on a besoin.
Les distributeurs ayant compris l’intérêt d’un plombage de qualité proposent un panel d’accessoire d’origine ou adaptable très étendu. Pour ce critère de rappuyage c’est surtout la consistance du sol qui dicte le choix de l’équipement. De la roue plombeuse à la languette de rappui, nombreux accessoires permettent de limiter le mouvement des graines par une terre trop collante tout en garantissant un tassement favorable à la remontée d’humidité. Les organes de fermetures sont aussi très nombreux pour répondre à des contraintes de prise en masse d’un sillon difficile à refermer. Les disques ou raclettes forcent mécaniquement un bourrelet de terre à recouvrir la graine. Des roues en matières synthétiques ou aux profils agressifs n’auront évidemment pas la même finalité dans une terre sableuse labourée ou un champ argileux en semis direct.
Quelle que soit la culture concernée, vouloir investir dans « le meilleur semoir monograine », est aussi rai- sonnable que de rechercher « un tracteur parfait ». Les réponses seront conditionnées par les contraintes et la spécificité des travaux à réaliser. Rédiger ces attentes et exigences est une première étape indispensable avant même de solliciter les concessionnaires. Construire un cahier des charges ne s’improvise pas, il faut y consacrer du temps afin d’être sûr d’investir au plus près de chacun de ses besoins.