Pour ne pas pénaliser à long terme le potentiel de ses parcelles, il ne faut pas laisser des adventices résistantes s’installer. Leviers agronomiques, alternance des modes d’actions, tout doit être mis en œuvre.
Pour ne pas pénaliser à long terme le potentiel de ses parcelles, il ne faut pas laisser des adventices résistantes s’installer. Leviers agronomiques, alternance des modes d’actions, tout doit être mis en œuvre.
Qu’est-ce qui représente un surcoût de traitement, estimé par Arvalis à 120€/ha en Ile de France ? Qu’est ce qui engendre une perte de 7 % du potentiel de rendement mondial en blé ? La présence d’adventices résistantes aux traitements herbicides.
Ces adventices résistantes sont naturellement, et depuis toujours, présentes dans les parcelles, mais à des niveaux extrêmement faibles. Au fil des désherbages, comme ce sont les seules à survivre et à grainer, leur proportion augmente. Identifié au milieu des années 1990 en Australie, le problème des adventices résistantes est désormais mondial. Il s’intensifie du fait de l’utilisation de doses réduites, du travail du sol simplifié, des rotations courtes, mais aussi d’une réglementation qui tend à limiter l’usage et le panel des herbicides. Le ralentissement des homologations (il n’y a pas eu de nouveau mode d’action commercialisé depuis 1991) n’aide pas à le maitriser.
Une résistance est suspectée quand, malgré l’application correctement effectuée d’un herbicide, on trouve dans une même parcelle à la fois des plantes détruites et d’autres indemnes. Confirmer cette résistante demande des tests en laboratoire. Il n’y a pas encore d’outil utilisable au champ.
Des résistances ont été identifiées sur quatre modes d’actions : les HRAC (herbicide resistance action committee) C1, A (familles des fop, des dime et des den), B (famille des sulfonylurées) et O. On remarque aussi une efficacité en baisse sur le HRAC K3 (flufénacet) pour le ray grass. 17 adventices sont concernées par des résistances en France. Les plus problématiques sont le ray grass (résistance aux sulfonylurées, inhibiteurs ALS) et le vulpin (résistances aux herbicides HRAC A et B). Des phénomènes de résistance se développent aussi sur les dicotylédones, avec des coquelicots résistants au groupe O.
Pour contrer les résistances, il faut actionner tous les leviers agronomiques, pas uniquement dans les parcelles concernées : moissonner les parcelles sales en dernier, ramasser les menues pailles, allonger les rotations en introduisant des cultures de printemps, travailler le sol en interculture pour détruire les levées, retarder la date de semis.
Dans son programme de désherbage, il faut alterner les modes d’action. Par exemple, sur vulpin ou ray grass, on peut opter pour un produit racinaire à l’automne (HRAC K ou N), puis rattrapage foliaire en sortie d’hiver (HRAC B ou A).
Avec son mode d’action F3, déjà utilisé sur d’autres cultures mais pas encore en blé tendre, Maténo, de Bayer, apporte de l’alternance avec une nouvelle molécule, l’Aclonifène, utile contre les ray grass et vulpins résistants aux modes d’actions A et B.
Une solution complémentaire pourrait venir de Luximo, ce nouvel herbicide d’automne que BASF prévoit de lancer en France à l’automne 2023. Il est déjà utilisé depuis 2019 en Australie. Luximo a un nouveau mode d’action, HRAC Q-30, inhibiteurs de la famille d’enzymes appelées thioestersase d’acide gras, des enzymes essentielles au fonctionnement de la membrane cellulaire végétale. Luximo a un très haut niveau d’efficacité contre les graminées, ray grass et vulpins notamment, mais aussi contre certaines dicotylédones, comme le coquelicot.
Mis au point par les instituts techniques, le site www.r-sim. fr vous aide à évaluer le risque d’apparition de résistances au regard de la situation géographique, de la rotation. Il propose des pistes pour diminuer le risque.
Cécile Julien