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Des alternatives au traitement de semences

Alors que les solutions de traitement de semences se raréfient, biocontrôle et traitement thermique des semences s’imposent comme des alternatives fiables. D’autres solutions, comme l’utilisation de mycorhizes, pourraient également se développer à l’avenir.

© Gnis – Pascal Legrand

Dans un contexte de durcissement réglementaire sur l’utilisation des produits de protection des plantes, les traitements de semences ne sont pas épargnés.

Après l’interdiction des néonicotinoïdes en 2018, c’est le thirame qui ne peut plus être utilisé pour enrober le grain depuis cette année. Aujourd’hui, la filière semence voit le nombre de solutions permettant d’assurer aux agriculteurs le bon développement des plantes lors des premiers stades, souvent vulnérables, se réduire considérablement. Dans cette situation, le salut pourrait venir de solutions alternatives. Mais elles sont encore peu nombreuses sur le marché.

La recherche et l’innovation s’efforcent aujourd’hui de mettre au point des applications industrielles fiables. Certaines d’entre elles sont déjà en phase de production alors que d’autres, toutes aussi prometteuses, sont en cours de développement.

Micro-organismes et cuivre

Les bio-solutions sont peut-être l’une des alternatives les plus connues aux produits phytosanitaires de synthèse. « En 2018, la vente de produits de biocontrôle a progressé de 24 % par rapport à 2017.

Le secteur représente 170 millions d’euros et 8 % du marché de la protection des plantes », explique Denis Longevialle, secrétaire général de l’International Biocontrol Manufacturers Association France (IBMA). Concernant le traitement des semences, trois produits existent actuellement. Ils ont la particularité d’être utilisables en agriculture biologique. Deux d’entre eux sont à base de micro-organismes. Le Cerall® est une bactérie appelée Pseudomonas chlororaphis, souche MA342. Elle a une action contre la carie du blé mais aussi sur la fusariose et la septoriose sur blé tendre et dur, seigle et triticale. Une deuxième bactérie, Bacillus amyloliquefaciens, souche MBI 600, est à l’origine du produit de biocontrôle Integral Pro® à destination du colza.

Cette solution offre une protection face au phoma et à la fonte de semis. Elle a également une action de stimulation des défenses de la plante pour minimiser les dégâts d’altises. Le troisième produit de biocontrôle se base, lui, sur le cuivre. Intitulé Copseed®, il lutte contre la carie du blé. Si ces trois solutions permettent de répondre à certains besoins en traitement des semences, elles ne couvrent pas l’ensemble des champs d’action permis aujourd’hui par les produits de synthèse.

« Le traitement des semences est l’un des secteurs du biocontrôle pour lequel il est impératif d’accélérer la recherche et l’innovation », affirme Denis Longevialle. Et les perspectives pour l’avenir sont d’ores et déjà prometteuses.

Selon un sondage réalisé par IBMA France auprès de ses adhérents, 73 % des répondants réalisent actuellement des recherches sur des solutions de traitement de semences. 19 % d’entre eux pensent même proposer un nouveau produit de biocontrôle dans cette gamme avant trois ans. Cette proportion monte à 44 % sur un délai de trois à cinq ans. « L’innovation est en marche, on espère qu’elle va accélérer », souligne le secrétaire général d’IBMA France. Selon le Gnis, les semences certifiées, qui bénéficient des technologies de triage et de traitements de haute qualité, seraient a priori le support le plus adapté pour l’utilisation de ces solutions alternatives.

 

© IMBA
Les produits de biocontrôle constituent une alternative pour l’enrobage des semences certifiées.

Les mycorhizes pour stimuler la plante

Une autre possibilité, parmi le vivant, pour remplacer les produits phytosanitaires de synthèse, consiste à recourir aux mycorhizes. Ces champignons vivent en symbiose avec les racines des plantes et leur permettent une meilleure exploitation des nutriments à l’aide d’un réseau filamentaire important. Appliqués en traitement des semences, ils permettent de rendre la plante plus vigoureuse lors de sa germination. Elle est ainsi moins sensible aux pathogènes racinaires qui pourraient l’attaquer. La société INOCULUMplus développe des solutions pour les agriculteurs en lien avec ces mycorhizes. « Pour avoir un rôle de protection, les mycorhizes doivent être placées en préventif. Nous travaillons aussi sur des associations complexes avec d’autres micro-organismes qui pourraient renforcer l’action de protection », explique Janie Bouvet, business developer au sein de l’entreprise. Leur application en traitement de semence aurait un intérêt pratique. L’apport localisé sur les graines permettrait d’utiliser des quantités moins importantes que lors d’un épandage en plein champ. « Nous sommes approchés par les semenciers sur ce sujet depuis quelque temps. Il y a des projets en cours. Nous travaillons également avec les coopératives. Les mycorhizes sont des organismes vivants. La problématique du stockage avant livraison chez l’agriculteur est particulièrement importante », explique Janie Bouvet.

 

Une stérilisation thermique

Pour détruire les germes présents sur les semences, une autre méthode consiste à appliquer un traitement thermique. Il repose sur trois critères que sont la température, le taux d’humidité et la durée de traitement de la graine. En France, deux stations de semences en sont équipées. Dans l’Est, Epilor a lancé la production au printemps 2019. « Pour le réglage, il faut trouver le bon triptyque afin de désinfecter la semence sans que son pouvoir germinatif ne soit détruit », explique Céline Canet, directrice du site, qui a porté le projet. « C’est une invention qui vient de Suède. En 2010, j’avais vu une présentation mais il n’y avait pas la pression actuelle sur les phytos, donc je l’ai gardée dans un coin de ma tête. En 2016 et 2017, je l’ai proposée durant l’assemblée générale car j’y croyais. En mai 2018, le conseil de surveillance m’a donné le feu vert », se souvient-elle. La ligne installée sur le site d’Epilor peut produire jusqu’à 12 tonnes par heure. Une unité d’ensachage indépendante permet de préparer des semences dédiées à l’agriculture biologique. « Nous envoyons des échantillons de chaque lot en Suède pour calibrer la machine en fonction du taux d’infestation. Sur certains lots trop contaminés, nous repassons en traitement de semences classique », décrit la directrice du site. Pour la campagne 2019-2020, 10 % des semences seront traitées thermiquement, mais, à terme, l’objectif est d’utiliser ce procédé pour 80 % des volumes.

 

Ces installations de haute technologie demandent, pour l’heure, d’importants investissements et une grande technicité. Leur apport complémentaire aux innovations variétales devrait permettre d’accroître à court terme le rayonnement de la semence certifiée.

 

© Céline Canet
La station de traitement thermique des semences Epilor a été récemment inaugurée.

 

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