Une action devenue courante des urbains lorsqu’ils s’installent à la campagne : la contestation du bruit du tintement des cloches des vaches. À plusieurs reprises, des procès ont été intentés contre les éleveurs, et des pétitions ont circulé. Mais le dernier exemple à Le Biot, en Haute-Savoie, a entraîné une réaction de ras-le-bol généralisé : une contre-pétition circule en faveur du maintien des cloches aux vaches !
Ce n’est pas la première fois, et sans doute pas la dernière. A Le Biot, en Haute-Savoie, 12 propriétaires ont signé une pétition qu’ils ont remise à leur maire, réclamant le retrait des cloches du cou des vaches, en raison du « tapage » subi…
Ce n’est pas la première fois, mais il existe des constantes dans ce renouvellement d’intentions. La première d’entre elles, ce genre de demandes n’émane que de ce que l’on appelle des néo-ruraux, en d’autres termes de personnes qui ont une vision de ce que doit être la campagne lorsqu’ils y arrivent et s’y installent, sans pour autant être informés des réalités. Ces investisseurs de l’immobilier rural choisissent ainsi de quitter la ville pour trouver la tranquillité, un idéal qui soit l’antithèse absolue du bruit des moteurs et des klaxons. Ils n’ont jamais mesuré le nombre de décibels subis par la musique à fond de leur voisin d’étage en appartement, mais là, ils sont prêts à tout pour faire valoir « leurs droits », et vont donc acheter un matériel de mesure pour prouver que les cloches des vaches sont susceptibles d’aller au-delà d’une norme légale, norme légale qu’ils auront pris le temps de rechercher.
L’autre constante, c’est l’incompréhension de la part des éleveurs, et des autres habitants « historiques » des alentours. Dès que le terrain a un petit peu d’importance, ou est en pente, les vaches portent des cloches pour que l’on puisse les retrouver facilement. Leur tintement est considéré comme mélodieux, faisant partie du paysage. Le fait qu’il faille des cloches signifie aussi que l’élevage est extensif, en d’autres termes que les vaches ont de l’espace, qu’elles sont nourries à l’herbe, et tout cela répond à des demandes sociétales particulièrement en vogue aujourd’hui. Par ailleurs, comme le souligne d’ailleurs très bien le maire de Le Biot dans son interview réalisée par France Bleu (voir la vidéo en fin d’article), les vaches des alpages entretiennent le paysage de la manière la plus écologique qui soit, et font économiser de l’argent aux petites communes.
D’où les conflits, entre deux manières de voir les choses totalement différentes. En l’occurrence, les néo-ruraux qui réclament le retrait des cloches des vaches (ou qui demandent aux coqs d’arrêter de chanter le matin, ou aux grenouilles des mares d’arrêter de coasser dans d’autres cas…) se comportent comme des colons qui veulent imposer leur vision de ce que doit être la campagne.
Prenons le cas de Le Biot, symptomatique, car il prend une importance insoupçonnée à travers les réseaux sociaux. Le maire a donc reçu une pétition signée par 12 propriétaires. Mais pour 11 d’entre eux, il ne s’agit que de résidences secondaires ! Un cas qui est arrivé comme « celui de trop » dans un contexte général de dénigrement des pratiques agricoles ou pastorales. Du coup, il y a eu une réaction, le lancement d’une « contre-pétition » en ligne réclamant le maintien des cloches aux vaches ! Elle est intitulée « Soutenir le maire de Biot (74) pour garder les cloches de vaches » et se trouve sur le site change.org. En l’espace de quelques jours, cette pétition a pris une ampleur invraisemblable grâce aux réseaux sociaux. A l’heure où cet article parait, elle dépasse allégrement les 83 000 signatures, ce nombre de signatures évoluant à grande vitesse.
Par ailleurs, une manifestation s’est déroulée vendredi soir, en pleine nuit, dans les alpages, pour réclamer aussi le maintien des cloches. Le monde rural et pastoral se révolte contre l’attitude de ceux qui veulent bouleverser leurs habitudes, alors que celles-ci répondent à d’excellentes pratiques, vantées par ailleurs. Et c’est heureux !
Prochaine étape, le conseil municipal de Le Biot, le 13 octobre prochain. Le Biot compte 546 habitants au dernier recensement de la population. Mais combien de milliers de manifestants seront-ils présents ce jour-là pour soutenir le doux tintement de celles qui entretiennent le paysage ?
Où trouver la pétition : https://www.change.org/p/monsieur-le-maire-de-biot-74-soutenir-le-maire-de-biot-74-pour-garder-les-cloches-de-vaches
A voir ci-dessous, cette vidéo de France Bleu qui explique très bien, interviews à la clé, la problématique rencontrée à Le Biot.
Ci-dessous, une photo de vaches des alpages avec leurs cloches (photo d’archives sans lien direct avec les faits rapportés dans l’article). Source Fotolia, lien direct : https://fr.fotolia.com/id/24224234.