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Chercher toute la valeur ajoutée du déchaumage

Les chantiers de déchaumage sont soumis à une très forte concurrence notamment avec le parc matériel de l’agriculteur lui-même. Il est parfois difficile pour l’entrepreneur de se démarquer. Pourtant le déchaumage a de nombreux atouts à faire valoir sur le plan de l’agroécologie. En tant que travail du sol il s’intègre dans le système global de l’agriculteur.

Le déchaumage fait partie des fondamentaux pour les ETA généralistes. Et pourtant… Comment se démarquer sur ces chantiers alors que tous les agriculteurs ou presque en sont équipés.

Comment rentabiliser une prestation dont le prix à l’hectare est faible et qui reste très concurrentielle ? Comment apporter de la valeur ajoutée à partager avec les agriculteurs sur ces prestations.

Comme toujours, les réponses à trouver sont multiples et nécessitent de bien s’intéresser à toutes les fonctionnalités différentes. Ces chantiers sont aussi une occasion unique de remettre en avant l’intérêt porté au sol, et par là même, de s’impliquer techniquement dans tout le système d’exploitation de l’agriculteur.

Des matériels parfois très ciblés

Parmi les outils de déchaumage, les constructeurs offrent un catalogue très vaste destiné à de multiples usages et des applications parfois très pointues. Cela peut être une opportunité pour développer une stratégie de diversification de son parc de matériel pour des ciblages particuliers.

Les entrepreneurs répondront ainsi à des besoins d’agriculteurs qui ne disposent pas toujours de la polyvalence nécessaire pour s’adapter à l’ensemble des conditions météorologiques et des fonctions agronomiques possibles.

Par ailleurs le secteur du déchaumage a vu fleurir quelques innovations avec des systèmes de herse à chaîne par exemple (Kelly Engineering) ou des systèmes de gestion innovante des pailles (Le Trashcutter, de la société K-Line Ag par exemple) qui peuvent permettre de se démarquer sur des applications bien spécifiques.

Un matériel étonnant comme le BioRotor, propose quant à lui de compléter les opérations de déchaumage à dents par un travail de désherbage mécanique ciblé pour déchausser les vivaces et notamment les vivaces rhizomateuses comme le chiendent par exemple.

Dans le même esprit, des déchaumeurs plus classiques à dents promettent de déchausser les vivaces en exploitant un effet « coup de cuillère ». Le travail du sol à la charrue déchaumeuse hors raie de labour appelé labour agronomique est par ailleurs une prestation qui semble promise à un bel avenir.

De plus en plus d’agriculteurs veulent retrouver l’impact favorable du labour, sur le désherbage, la structure du sol et sur le recyclage du calcium pour réduire les besoins en chaulage. Le labour agronomique leur permet de le faire sans pour autant enfouir les résidus de culture trop profondément pour éviter les conditions de décomposition en anaérobie et limiter les risques de formation des semelles de labour.


© Kelly Engineering
Se différencier par l’innovation matérielle est encore possible avec des machines atypiques comme la herse à chaîne par exemple.

Réactivité

Un autre point où les ETA sont très attendues en matière de déchaumage, concerne la réactivité qui reste le nerf de la guerre sur tous les chantiers des ETA.

Ce que nous confirme une entreprise de Seine-Maritime : « Pour nous le déchaumage s’inscrit surtout dans les prestations de A à Z. Mais bien souvent cela nous est aussi demandé par des agriculteurs qui sont eux-mêmes rendus indisponibles par d’autres chantiers comme le roulage du lin par exemple ».

La rapidité des interventions et l’adéquation de la pratique aux impératifs météorologiques et agronomiques est un atout que peuvent continuer de mettre en avant les ETA autour de ce type de prestations.

Cela signifie pour l’ETA d’être prête à faire feu à des moments très chargés notamment au moment des moissons. Cela permet de profiter de l’humidité résiduelle avant qu’elle ne s’échappe. L’implantation des cultures suivantes en sera facilitée de même que la bonne décomposition des matières incorporées et la levée des adventices basée sur le principe du faux-semis.

Des outils de grande largeur et plus particulièrement les outils à disques peuvent aider l’entreprise dans sa réactivité pour profiter toujours des meilleures conditions climatiques. La prestation peut être vendue en complément des chantiers d’enlèvement des pailles et de bottelage avec la garantie pour l’agriculteur que les opérations sont réalisées rapidement dans l’intérêt de sa parcelle.

Lors des moissons n’oublions pas que le déchaumage est aussi un outil reconnu de prévention des risques d’incendie. Ces chantiers peuvent alors aider les agriculteurs à se mettre en conformité avec les arrêtés préfectoraux et à mieux gérer cet aléa.


© Lunde Maskincenter
Le Biorotor est une machine étonnante qui s’intercale après un passage de déchaumeur à dents pour un désherbage mécanique original des vivaces.

© Väderstad
Exploiter toutes les fonctions agronomiques du déchaumage en un seul passage. Cette technique est rendue possible avec des outils polyvalents assez lourds comme le TopDown de Väderstad.

Exploiter toutes les fonctionnalités

Epuisement du stock de semences adventices par faux semis, amélioration de la structure de surface du sol, préparation du lit de semence, destruction du couvert, gestion des résidus, semis d’un couvert intermédiaire…

Les fonctions du déchaumage sont nombreuses, si bien que plusieurs passages sont parfois rendus nécessaires pour les exploiter toutes au mieux.

Toutefois, plusieurs ETA proposent aujourd’hui de réaliser ces opérations en un seul passage avec un gain de temps certain et des parcelles qui sont libérées également rapidement pour les cultures suivantes. Réaliser toutes les fonctions du déchaumage en un seul passage avec un seul tracteur est rendu possible notamment avec des outils qui combinent l’action de disques, de dents et des rouleaux.

La puissance de traction nécessaire est importante ce qui rend parfois ces matériels peu attractifs pour les agriculteurs. Par ailleurs le déchaumage peut se combiner avec les opérations de semis de couvert ou inversement avec une opération de destruction de couverts. Ces chantiers qui permettent de viser de façon précise toutes les fonctions du déchaumage présentent une valeur ajoutée plus importante pour l’agriculteur avec un niveau d’expertise plus élevé à valoriser pour l’entrepreneur.

© K-line
La gestion des résidus de cultures est un point clé qui conditionne la réussite de la culture suivante notamment en cas d’inter-cultures très courtes. Des machines comme le Trashcutter proposent ainsi une gestion particulière des résidus de paille.


© Väderstad
L’implantation d’un couvert lors du déchaumage est une prestation qui peut être proposée via du matériel adapté et rarement disponible en exploitation agricole

Une expertise sur la gestion des résidus

Enfouissage à plus ou moins grande profondeur, mulchage, avec ou sans broyage… La gestion des résidus de culture est un point clé de la gestion du déchaumage. Les outils à disque sont par exemple réputés pour leur propension à créer un mulch en surface avec un travail du sol très peu profond généralement cantonné aux cinq premiers centimètres.

A contrario les outils à dents peuvent enfouir les résidus sur des profondeurs allant jusqu’à 15 cm environ avec un bon foisonnement avec la terre. Les choix réalisés dans la gestion de ces résidus auront un impact très important sur la fertilité du sol, la qualité du semis suivant et même sur le développement des ravageurs comme les limaces.

Il est reconnu que les pailles notamment sont chargées de substances antigerminatives allélopathiques, voire de résidus de produits phytosanitaires avec un impact possible sur la biologie des sols. Cela explique qu’à une certaine époque les agriculteurs étaient tentés de brûler leurs pailles.

Des agronomes comme Fukuoka ou Carlos Crovetto, ont développé des techniques originales de management des pailles qui peuvent être sources d’inspiration pour les ETA. Lorsque les résidus de culture sont des produits immatures, là encore la gestion de ces volumes par mulchage ou enfouissement n’est pas anodine.

Des agronomes comme Francis Bucaille préconisent aujourd’hui de semer les couverts dans les pailles assez hautes et laissées debout. Il s’agit ensuite d’enfouir ces deux éléments comme une « ration » complète (lignine + cellulose) pour le sol qui sera constituée de paille plus évoluée et de végétaux immatures. Les pailles sont quant-à elles laissées entières pour limiter la prolifération des limaces et limiter l’asphyxie du sol en cas de conditions très humides.

© Charlier
Les charrues dites déchaumeuses ou agronomiques qui travaillent sur une profondeur de sol équivalente à un déchaumage offrent des solutions en matière de recyclage du calcium et de désherbage.

De nouveaux réservoirs de productivité

On dit souvent qu’un entrepreneur a toujours de l’avenir là où il fait gagner de l’argent aux agriculteurs. Cet adage s’applique au déchaumage qui est une belle porte d’entrée vers de nouveaux réservoirs de productivité en lien avec les sols et la microbiologie des sols.

De nouvelles approches montrent que le travail du sol, raisonné en lien avec la microbiologie de façon « experte » a des atouts en matière de stockage de carbone, de stockage des éléments nutritionnels sur la CEC (capacité d’échange cationique).

Ces nouvelles expertises démontrent en cela que la microbiologie du sol a un impact primordial sur la porosité et la compaction qui sont autant de facteurs physiques sous contrôle essentiellement biologique et dont le machinisme n’est pas le seul fautif.

Ainsi le travail du sol dirigé et raisonné du point de vue de la microbiologie et de la fertilité globale mérite régulièrement d’être réhabilité. Il est de plus en plus certain que le sol devra de plus en plus être considéré dans les années qui viennent comme un bouillon de cultures de champignons et de bactéries dont la ration qui lui est apportée en végétaux, mais aussi en engrais et produits phytosanitaires, oriente le fonctionnement dans un sens plus ou moins favorable.

Dès lors tirer toute la valeur d’un déchaumage peut amener l’entrepreneur à s’impliquer de façon transversale dans tout le système de production de ses adhérents, en passant par les traitements et les apports d’amendements.

© Väderstad
La gestion des pailles, résidus de culture et couverts devra de plus en plus être raisonnée comme la mise en place d’une ration pour la biologie du sol. Cette approche est une opportunité à développer pour les ETA de s’impliquer en tant qu’expert auprès de l’agriculteur.

Auteur : Alexis Dufumier

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