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Céréales, le risque de carence en soufre faible à moyen

Contrairement aux deux campagnes passées, les faibles pluviométries observées au cours de l’automne et de l’hiver ne sont pas très favorables aux carences en soufre sur blé et orge d’hiver. Quelle est la situation dans les principales zones de cultures de céréales de la région ? Comment estimer le risque à la parcelle ?

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Pour produire 80 q/ha, le blé mobilise de l’ordre de 60 kg/ha de SO3 alors que le colza absorbe plus de 150 kg pour 40 q/ha. L’absorption devient significative au début de la montaison. En cas de non satisfaction, le nombre d’épis au m² est la composante principalement affectée.

Le soufre dans le sol et sa disponibilité

Le soufre est présent dans le sol principalement sous forme organique ; il subit une évolution très comparable à l’azote. La minéralisation de la matière organique et des résidus de récolte aboutit à la forme sulfate, seule forme absorbée par voie racinaire. Cette forme sulfate est sensible au lessivage.

Les risques de carence se rencontrent dans les sols où la minéralisation est faible : sols calcaires ou acides, avec un faible taux de matière organique et dans les sols superficiels, filtrants, où le lessivage peut être important. L’excès d’eau et un état structural dégradé ont également un effet négatif.

Les fortes pluies de fin d’automne et début de l’hiver sont le premier facteur de risque cette année. Par ailleurs, toutes les parcelles qui souffrent d’hydromorphie sont particulièrement exposées. Enfin, les cultures qui ont bénéficié de semis en bonnes conditions en octobre et de températures douces ont pu développer un nombre de talles important. Cette forte croissance des plantes peut les exposer au risque de carence, s’il y a manque de disponibilité dans le sol.

L’état de la pluviométrie hivernale en région Rhône-Alpes

Les hauteurs de pluies cumulées depuis le 1er octobre 2015 sont faibles, conduisant vers des risques de carence plus diversifiées que les années passées.

Tableau 1 : pluviométrie de l’hiver 2015-2016 pour différentes stations météo en Rhône-Alpes
Source : Météo France

Comment décider d’une fertilisation soufrée ?

Sur la base d’essais sur la fertilisation soufrée, Arvalis – Institut du végétal propose un raisonnement à la parcelle grâce à deux grilles de préconisation d’apport de soufre, pour les situations avec ou sans apports réguliers d’effluents d’élevage, (tableaux 2 et 3) basées sur trois critères :
• le type de sol.
• la pluviométrie entre le 1er octobre et le 17 février à laquelle ont été ajoutées les prévisions météorologiques afin d’anticiper le risque potentiel de carence.
Le report au tableau n°1 de pluviométries aide à situer le risque sur les parcelles.
• Lles précédents, en distinguant ceux qui ont reçu une quantité de soufre minéral importante comme le colza.


Tableau 2 : grille de préconisation d’apport de soufre (kg/ha de SO3) entre début et fin tallage, sur blé et orge d’hiver, sur les parcelles sans apports réguliers d’effluents d’élevage

Tableau 3 : grille de préconisation d’apport de soufre (kg/ha de SO3) entre début et fin tallage, sur blé et orge d’hiver, sur les parcelles avec apports réguliers d’effluents d’élevage

Stratégie d’apport

L’apport de soufre est à faire entre mi-tallage et le stade épi 1 cm, pour que la culture en dispose dès le début de la montaison, stade où la déficience peut apparaître. Une intervention plus précoce expose le soufre sulfate apporté, au risque de lessivage en cas de pluie importante entre le passage et le stade épi 1 cm, surtout en sols superficiels.

Le soufre et la qualité boulangère

L’effet du soufre sur la qualité boulangère a été étudié par ARVALIS – Institut du végétal. A la récolte sur des échantillons issus des trois modalités comparées (pas d’apport de soufre, apport de 40 kg/ha SO3 au stade épi 1 cm, apport de 40 kg/ha SO3 au stade 1 ou 2 nœuds), des analyses et tests ont été réalisés : teneur en protéines, force boulangère (W), rapport P/L (ténacité/extensibilité), test de panification française.

Quand l’apport du soufre est nécessaire pour le rendement, l’extensibilité de la pâte (diminution du rapport P/L) peut augmenter. Cela correspond à une augmentation de la part des protéines riches en soufre (gliadines et gluténines de faible poids moléculaire). Mais cet effet n’est pas systématique.

Dans les cas les plus graves, la force boulangère peut augmenter un peu.

La teneur en protéines et la note de panification ne sont pas modifiées par l’apport de soufre.

Cet effet sur le P/L peut être un avantage ou un inconvénient selon le niveau d’extensibilité – trop élevé ou trop bas – de la variété et donc l’effet recherché.

Au final, quand l’apport de soufre ne se justifie pas pour le rendement, il n’y a pas d’effet du soufre sur la qualité.

Quand l’apport de soufre se justifie du fait d’une alimentation insuffisante, le rendement s’en trouve amélioré et de façon non systématique, certains paramètres de la qualité peuvent être modifiés, en particulier le P/L.

L’apport de soufre doit donc être réalisé avec la préoccupation prioritaire d’assurer à la plante une alimentation non limitante garantissant le rendement.

L’apport de soufre sur le critère qualité, seul, ne se justifie pas.


Tableau 4 : teneur en soufre SO3 de quelques engrais

Jean PAUGET (Arvalis – Institut du végétal)

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