Installer un maraîcher sur un ancien terrain de football. C’est la proposition originale du maire de Bougival, en région parisienne, pour augmenter son autonomie alimentaire.
Coquette commune des Yvelines, Bougival dispose de trois terrains de foot, dont un dans un mauvais état sur l’île de la Chaussée. « Nous avons proposé au club de football d’investir dans un terrain avec une pelouse synthétique. En contrepartie, les joueurs ont accepté d’abandonner le terrain dégradé, ce qui nous permettait de faire autre chose de ces 8000 m2 », explique à WikiAgri le maire Luc Wattelle (DVD).
Dès le départ, la municipalité s’oriente vers un projet d’agriculture urbaine. Située en première couronne parisienne, la commune ne compte aucun agriculteur mais les élus se sont passionnés pour le sujet. « Comme la construction du nouveau terrain a pris trois ans, ça nous a laissé le temps de construire ce projet. J’ai cherché à comprendre pourquoi les agriculteurs traditionnels étaient en grande difficulté, et exprimaient un tel désarroi. Je me suis renseigné sur les agricultures alternatives et j’ai lu le livre Permaculture de la ferme du Bec Hellouin dont les rendements sont dix fois supérieurs à ceux des agriculteurs conventionnels et bio. Je me suis dit que c’était peut-être une solution pour mettre en place un projet de production saine et abondante, et de permettre à un maraîcher de vivre correctement avec une petite parcelle. J’ai suivi un stage en Ardèche de permaculture l’été dernier et j’ai validé cette conviction selon laquelle, en appliquant ces techniques, on pouvait développer sur ce terrain de football un espace de production suffisant pour faire vivre un couple d’agriculteurs. »
Luc Wattelle assume l’originalité du concept : « C’est vrai que l’idée a d’abord suscité un petit effet de curiosité. Mais tout le monde est d’accord pour dire qu’il est essentiel de pouvoir bénéficier d’une production saine et locale. Ces sujets fondamentaux doivent transcender les divergences politiques. Par ailleurs, je dois dire que la permaculture apporte un nouvel état d’esprit, qui pousse à réfléchir aux problèmes de manière plus globale, à considérer toutes les implications d’une situation. C’est applicable aux problématiques de la ville et donc à la gouvernance politique. »
Très ouvert, le site a une vocation pédagogique et inciterait les visiteurs à développer leurs propres compétences. Sur les 8000 m2 disponibles, seuls 3000 m2 seraient consacrés au maraîchage. Les autres cultures devraient enrichir la diversité biologique (mare artificielle, serres, fruitiers…). « Le but est d’avoir un bon équilibre et que les productions s’enrichissent entre elles », précise le maire.
Enfin, une petite maison du parc sportif est mise à disposition pour les animations et les transformations de la production. Un petit snack bio est même envisagé.
Techniquement, la conversion du terrain de foot en terre agricole prendra du temps… Les premières plantations se feront en mars 2018. Auparavant, il sera nécessaire d’agrader les sols (de les améliorer sans utiliser de produits chimiques) pour retrouver un bon niveau de biodiversité et une qualité minérale convenable. « La permaculture se fonde sur une vision holistique du terrain. Le premier travail sera de recenser tous les éléments externes qui permettront d’enrichir les sols, de préserver les cultures et de produire en abondance. On étudie à la fois le vent, le soleil, l’eau, l’environnement proche… », explique Luc Wattelle.
Par exemple, le terrain est proche d’un manège équestre. Le fumier sera récupéré pour les cultures, ainsi que les rameaux coupés par les espaces verts. Après avoir analysé l’ensemble des facteurs, l’exploitant pourra concevoir le design du terrain. Le but (si l’on ose écrire) est de trouver le mode d’exploitation le plus facile et efficace.
Un appel à intention a été publié sur le site internet de la ville, présentant le concept dans ses grandes lignes. L’appel à projet sera officiellement édité au mois de mars et clôturé début juin. Le lauréat (particulier ou association) sera désigné en septembre. « Nous cherchons un agriculteur expérimenté. Il pourra compter sur notre aide logistique et financière. La mairie réalisera l’essentiel des investissements, qui concernent notamment l’adduction d’eau. Nous avons prévu 150 000 euros de travaux dès le premier trimestre 2018 », promet le maire. Le projet s’inscrira aussi dans le programme agriurbain du Conseil Régional.
La ville reste bien sûr propriétaire du terrain qui sera mis à disposition via un bail. Un cahier des charges engagera l’agriculteur à respecter un certain nombre de principes de la permaculture. La production sera en partie dédiée aux cantines scolaires, et le reste sera vendu sur place.
Ce projet pilote pourrait faire tâche d’huile, quand on pense aux nombreuses parcelles non constructibles, ou plus ou moins abandonnées sur l’ensemble des communes françaises. « Je suis également vice-président de l’agglomération Versailles Grand Parc, en charge de l’environnement. J’ai présenté notre projet en commission et les élus étaient très intéressés pour développer l’idée sur leur propre commune », précise Luc Wattelle.
En savoir plus : Mairie de Bougival : 01 30 78 25 80. Appel à intention : http://www.ville-bougival.fr/article/avis-dinformation-appel-projet-pour-la-mise-en-oeuvre-de-cultures-permacoles-sur-lile-de-la.
Notre photo ci-dessous a été fournie par la municipalité de Bougival.