L’Insee analyse la rentabilité des exploitations agricoles bio des filières maraîchère, laitière et viticole en les comparant aux filières conventionnelles. Ce n’est pas le Pérou ! Mais elles restent attractives car les prix des produits agricoles sont stables et affranchis de la volatilité des marchés agricoles.
Réaliser une étude comparative sur la rentabilité des exploitations converties à l’agriculture biologique impose une approche par filière. Cette analyse porte sur la productivité du travail, sur le montant des capitaux investis ou encore sur les marges brutes et les retours sur investissements.
Mais la rentabilité des exploitations agricoles s’apprécie sur plusieurs années d’affilées. Ce que ne fait pas l’Insee dans une étude titrée « Les exploitations en agriculture biologique : quelles performances économiques ? ».
Or un système de production, rentable durant un exercice comptable, peut ne pas être viable sur le long terme (5 ans et plus). Une année de crise pèse durablement sur l’équilibre financier des comptes d’exploitation.
Dans cette étude, l’institut s’est focalisé sur les filières maraîchère, laitière et viticole. Il en ressort une diversité de situations avec des entreprises pénalisées par une productivité du travail plus faible ou encore par des performances technico-économiques inférieures à celles obtenues en élevage traditionnel. Cela se matérialise par un nombre d’actifs plus important par hectare en viticulture (près de 0,14 salarié équivalent temps plein par hectare en bio contre 0,08 en conventionnel) ou encore en lait bio, par une production par animal unférieure de 20 %.
Quelle que soit la filière, l’attrait du bio réside dans la valorisation des produits et dans la sécurité qu’elle offre même si la vente directe n’est pas la panacée : ce mode de commercialisation n’est avantageux en termes de chiffre d’affaires qu’en viticulture. Sinon, les ventes sont, ramenées à l’hectare, inférieures en lait et en maraîchage à celles observées en agriculture conventionnelle.
Mais l’excédent but des exploitations en bio est supérieur à celui obtenu en conventionnel, quelle que soit la filière car les charges sont moins élevées. De tels résultats confortent le choix de l’orientation en bio.
En se s’inscrivant dans la durée, cette stabilité consolide les comptes d’exploitation. Elle encourage les éleveurs à investir, puisqu’ils ont la capacité de rembourser les prêts souscrits et elle les dispense de se constituer une épargne de précaution importante.
En production laitière bio par exemple, l’éleveur laitier ne subit pas une baisse de son chiffre d’affaires de 20 % ou plus, les années de crises dans le secteur conventionnel, en passant de 3 800 € par vache et par an à 3 100 €, selon l’Insee. Ce qui représente pour un troupeau de 62 vaches (taille moyenne de l’échantillon) une perte de 45 000 €.
L’institut de la statistique montre que le passage au bio modifie complètement la répartition des charges et des produits au niveau des comptes de résultat. En lait bio, l’Insee souligne que les éleveurs compensent la baisse de la production par vache laitière de 20 % par un prix plus élevé de 18 % et surtout par des charges alimentaires plus faibles de 20 % par rapport aux éleveurs conventionnels.
Ainsi, en ajoutant les aides bio, l’excédent brut d’exploitation (EBE) par vache est supérieur de 20 % par rapport à celui observé dans un troupeau conventionnel. La valorisation des produits laitiers et des charges alimentaires moins élevées procurent un avantage supplémentaire aux éleveurs bio.
L’étude de l’Insee passe aussi en revue les filières viticole bio et maraichère. Les conclusions de ces deux études sont quelque peu similaires malgré les spécificités propres à chacune des productions.
En production maraichère, l’institut montre que l’EBE par actif non salarié croit en fonction de la taille des exploitations avec un différentiel en faveur du conventionnel moins marqué lorsque la SAU est de 8 ha environ. Mais dans tous les cas de figure, les exploitations sont pénalisées par un surcroît de travail que les prix de vente des produits en circuit court et les moindres charges ne parviennent pas à compenser. Mais ramenés aux capitaux engagés, la filière bio est plus rentable (EBE/capitaux égal à 25 %) par rapport à sa conseur enconventionnelle mais aussi par rapport aux secteurs viticole et laitier (un écart de 1 à 2).
En production viticole, la rentabilité des investissements nécessaires pour financer la conversion des outils de production est en effet médiocre. Pourtant, le chiffre d’affaires par hectare est de près de 18 000 € par an contre 12 000 € en conventionnel. Mais l’amortissement des investissements réalisés pour convertir les exploitations pèse sur le résultat économique. En production laitière, on observe peu de différence entre le bio et le conventionnel, le passage au bio consistant d’abord à respecter un cahier des charges.
Jusqu’à un passé très récent, il n’y avait pas suffisamment de fermes bio pour réaliser des études économiques représentatives. Mais depuis quelques mois, les experts de la statistique agricole de l’Insee ont les moyens pour se lancer dans des analyses viables car le nombre d’exploitations converties a explosé.
Selon l’Insee, les exploitations viticoles biologiques utilisent en moyenne 20 % de surfaces en moins, et la surface moyenne d’une exploitation maraîchère bio est de 10 hectares contre 30 hectares en conventionnel. Un élevage de vaches laitières bio comprend en moyenne 52 vaches contre près de 60 en conventionnel.Le différentiel de performance s’apprécie en rapportant les grandeurs économiques aux facteurs physiques de production pour tenir compte de cette différence de taille.
Toujours selon l’Institut de statistiques, les subventions en production laitière représentent un peu plus de 40 % de l’EBE, quel que soit le mode de production. L’importance des subventions dans les résultats économiques est beaucoup plus réduite en production maraîchère (moins de 20 % de l’EBE) et viticole (6 % environ), aussi bien en agriculture biologique qu’en agriculture conventionnelle.
Précision : Les exploitations bio retenues dans l’étude sont uniquement celles dont la totalité de la production est certifiée en agriculture biologique : elles constituent un échantillon de 1 790 exploitations pour une population de référence d’environ 6 200 exploitations, soit un taux de sondage de près de 30 %. Elles sont comparées aux exploitations dites « conventionnelles » (27 787 exploitations échantillonnées pour une population de référence de 206 490 exploitations).
En savoir plus : http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/Insee_references_Enviro17c_D2_Agriculture-bio.pdf (l’étude l’Insee).
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