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Les vestiges d’une forêt du crétacé ont été découverts dans un champ de la Vienne. Un conifère vieux de 90 millions d’années a ainsi été exhumé au mois d’août.
Il y a presqu’un an, un paléontologue amateur remarque plusieurs bouts de bois fossilisés éparpillés dans un champ de maïs labouré à Colombiers (Vienne). Leur nombre est suffisamment significatif pour envisager des recherches approfondies avec les services spécialisés de l’université de Poitiers. Très vite informés, l’agriculteur et les propriétaires du terrain autorisent les fouilles de bon cœur. Le paléontologue Xavier Valentin fouille à un mètre de profondeur et découvre le tronc immense d’un conifère datant du crétacé, parfaitement conservé grâce à l’humidité d’une nappe phréatique ! Autant dire que ce type de trésor insolite est extrêmement rare du fait de la fragilité des végétaux.
Pour protéger l’arbre lors de son extraction, il a été placé dans un sarcophage de 100 kilos de plâtre puis soulevé délicatement par une pelleteuse. Sur les 2,50 mètres de tronc, le plus gros morceau a été exhumé le 3 août, long de 1,60 m et lourd de 400 kilos.
A priori, cette espèce de conifère n’existe plus sur terre. Les recherches détermineront bientôt s’il appartient à la famille araucariacées ou podo-carpacées. Cette « pièce type de référence » sera conservée par l’université de Poitiers et sans doute baptisée « colombiensis », en hommage à la commune.
Par ailleurs, différents végétaux de la même époque ont été identifiés près du tronc : des fougères, des cycas… « On s’aperçoit que certaines espèces modernes sont déjà installées, notamment des pins. Si on fouillait l’ensemble du secteur, on mettrait sans doute à jour ce qu’on appelle la forêt pétrifiée de la vallée de l’Envigne », précise le paléontologue.
Ces recherches s’intègrent à un projet de recherche intitulé « Biodiversité du passé en Vienne et Charente » mené avec le soutien de la Fondation Lisea Biodiversité. « Nous allons éditer un livret qui recensent l’ensemble des fossiles que l’on peut trouver en Vienne et en Charente, dans le cadre des fouilles réalisées le long de la future LGV. Jusqu’à présent, nous avions trouvé beaucoup de feuilles mais pas de tronc. Cette découverte permettra de faire le lien. Nous réaliserons une coupe très fine d’un morceau du tronc pour observer les tissus cellulaires et en savoir plus sur cet arbre », précise le paléontologue.
Cette découverte a été présentée en avant-première lors d’un congrès en Belgique et elle a beaucoup impressionnée les chercheurs européens. « C’est la première fois que l’on trouve de tels vestiges dans la Vienne depuis 1870 », signale Xavier Valentin.
L’agriculteur Grégory Faulcon est ravi de cette expérience scientifique : « Je loue ces terres et les fouilles ne m’ont posé aucune contrainte, bien au contraire. C’est une découverte assez exceptionnelle. Les gens ont été très sympas, ils ont fait les choses bien en m’avertissant tout de suite et il n’y a aucun dégât sur ma parcelle. D’ailleurs, ils n’ont fouillé que 20 mètres carrés sur une parcelle très humide. En labourant, j’étais tombé sur des choses denses et dures mais je pensais que c’était un gros caillou », témoigne-t-il.
Contrairement aux objets archéologiques, les fossiles ne sont pas considérés comme des trésors nationaux. Tout simplement parce que l’homme n’est pas intervenu pour les créer, les cacher ou les enfouir. Ils échappent donc aux règles de découverte et de partage qui s’appliquent aux trésors.
Pour résumer : si vous trouvez un fossile sur votre terrain de manière fortuite, vous en êtes propriétaire. Vous pouvez (ou non) déclarer l’objet aux services archéologiques de votre région ou l’université la plus proche, et autoriser (ou non) d’éventuelles fouilles complémentaires. Dans ce cas, il reste à négocier les conditions du transfert de propriété des fossiles qui seraient trouvés. Mais sachez qu’aucune indemnisation n’est prévue par la loi. Si vous souhaitez vendre ces fossiles (il existe de nombreuses bourses et les cours peuvent s’envoler), la législation est bien plus souple qu’en archéologie. Sauf si votre terrain se trouve dans un site naturel classé…
En savoir plus : http://www.lanouvellerepublique.fr/Vienne/Actualite/24-Heures/n/Contenus/Articles/2016/06/11/Un-arbre-fossilise-vieux-de-90-millions-d-annees-2747361 (article paru sur La Nouvelle République).
Ci-dessous : à droite, Jean-Marie Boiteau, le découvreur des indices au sol et, à gauche, Xavier Valentin (Copyright : A. Montaufier pour Lisea).