Déjà présente dans l’industrie, l’économie de la fonctionnalité fait ses premiers pas en agriculture. Cette nouvelle approche consiste à payer pour une fonction, par exemple avoir un champ indemne de maladies fongiques, plutôt que d’acheter un bien, ici des fongicides. L’économie de la fonctionnalité combine biens et services.
Face à la complexité croissante de l’agriculture et au virage vers l’agroécologie, le modèle « un problème = une solution » s’essouffle. « Pour mieux répondre aux besoins des agriculteurs, nous nous sommes penchés sur l’économie de la fonctionnalité », partage Jean-Jacques Pons, directeur BASF France Division Agro. Déjà présente dans l’industrie, l’économie de la fonctionnalité consiste à vendre plutôt qu’un bien, un usage au travers de solutions intégrant des biens et des services. Par exemple, vendre une garantie d’éclairage plutôt que des lampadaires et des ampoules. L’économie de la fonctionnalité associe des services et des biens, sans en transférer la propriété, dans une approche qui se veut favorable à la durabilité.
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Epaulé par l’appui méthodologique du CNAM, BASF s’est entouré d’une vingtaine d’acteurs des filières végétales pour réfléchir aux réponses que pourrait apporter l’économie de la fonctionnalité aux agriculteurs. Pour s’engager, les agriculteurs ont quatre attentes prioritaires. D’abord la garantie de la conformité, évaluée par des indicateurs précis et assortie d’un engagement sur la rentabilité. Ils attendent aussi une délégation de la décision et une accélération de l’innovation. Pour avoir un potentiel de déploiement, les offres devront pouvoir assurer le développement, a minima le maintien, des revenus.
En grandes cultures, l’économie de la fonctionnalité pourrait se traduire par un service garantissant un champ sain, plutôt qu’un achat de fongicide. BASF réfléchit déjà à proposer des solutions concrètes. « Nous testons une formule assurant des champs indemnes de maladies fongiques, partage Jérôme Clair, responsable Xarvio Digital Farming France. Avec nos partenaires, coopératives et négociants, nous proposons une protection dont le prix varie selon le risque maladie de la zone et la variété. En s’appuyant sur notre outil Xarvio Fields manager, lorsqu’un traitement est nécessaire, l’agriculteur reçoit un message avec le choix du produit, la date optimale de traitement et la dose. Nous lui faisons parvenir le produit. Nous nous engageons à 80% de plantes indemnes. Si cet objectif n’est pas atteint, l’agriculteur reçoit une indemnisation pour la perte de rendement. Cette nouveauté est testée sur 12 000 ha dans 280 exploitations. Ces premiers essais montrent déjà que les cultures sont saines avec 20% de fongicides appliqués en moins ».
De ces travaux de prospective, BASF estime que 10 à 25% des agriculteurs pourraient être intéressés par de telles solutions à l’horizon 2030. Pour explorer concrètement les formes de coopérative à mettre en place pour concrétiser les nouvelles formes de coopération afin de déployer l’économie de la fonctionnalité, BASF a initié le E.F lab.agri. « L’économie de la fonctionnalité offre des opportunités pour porter les investissements nécessaires à l’adaptation de l’agriculture à ses nouveaux enjeux, souligne Jean-Jacques Pons. La charge et les risques sont portés par les coproducteurs de l’offre de services plutôt que par les clients ».
Cécile Julien