Depuis septembre 2017 à Flourens, près de Toulouse, des séances de médiation animale sont dispensées avec l’aide d’animaux de la ferme, avec une éducatrice spécialisée. Les enfants et les adultes qui participent, à l’origine en difficulté sociale, trouvent une forme de bien-être et d’apaisement.
Six chèvres, des poules, un âne, un alpaga et deux chevaux. Ce sont les animaux qui composent la ferme pédagogique du pôle social du Chêne vert, une importante structure intégrée de l’Anras (Association nationale de recherche et d’action solidaire) situé à Flourens, dans la banlieue Est de Toulouse (Haute-Garonne).
Depuis septembre 2017, cette ferme pédagogique – appelée aussi le ranch du Chêne vert – organise des séances de médiation animale à destination de 25 adultes, qui ont longtemps été privés de logement et d’une trentaine d’enfants de 5 à 18 ans. Certains d’entre eux sont hébergés sur le site et d’autres au centre de Toulouse. Le tout est réalisé sous la conduite d’Alice Belloc, une éducatrice spécialisée et monitrice équestre. Certes ce type d’initiative se pratique beaucoup avec de jeunes autistes ou des mineurs affectés par des troubles du comportement, mais en l’espèce l’accompagnement mis en place par Le Chêne vert s’applique à panser une problématique sociale.
Les enfants dont il est question en effet, sont placés là par l’Ase (Aide sociale à l’enfance) ou après une décision de justice. Car il s’agit d’enfants souvent déscolarisés, victimes de maltraitances, ou dont les familles débordées ne parviennent plus à affronter les difficultés du quotidien. La médiation animale qui est possible avec des chiens et des chats est donc une réalité aussi avec des animaux de la ferme.
Mais pour la direction du Chêne vert, ceci est à apprécier dans un ensemble, ainsi que le souligne Julien Chanut, le directeur adjoint : « Pour nous, c’est un volet de la prise en charge qui intervient dans la globalité d’un dispositif que nous avions déjà auparavant bien sûr. Et c’est très positif parce que, même si cela ne fait pas tout, c’est quand même un aspect des choses qui permet aux personnes qui en bénéficient de reprendre confiance en elles. »
Deux chèvres ont été offertes par un agriculteur, tandis que deux autres proviennent d’une chèvrerie et les chevaux Ulysse et Arielle ont, eux, été achetés. Quant aux poules elles ont été données par un autre agriculteur de Clermont-le-Fort, au sud de Toulouse et l’alpaga par un particulier. Ces animaux sont sereins, dans la mesure où ils sont habitués maintenant à côtoyer enfants et adultes. Mais lorsqu’ils arrivent pour la première fois au Chêne vert, ils sont tout d’abord isolés dans un abri pendant quelques jours. Par la suite, Alice Belloc les manipule avant qu’ils ne rejoignent le troupeau. C’est elle encore qui leur prodiguent certains soins. Mais en cas d’urgence deux vétérinaires sont appelés.
Et puis les adultes pris en charge par la ferme pédagogique sont également mis à contribution. Ce sont eux qui changent la paille des animaux, les nourrissent, nettoient leur espace et vérifient l’état des clôtures. « On constate que ces bêtes leur redonnent un repère et les valorisent. Ils retrouvent des responsabilités qu’ils avaient perdu », se félicite Alice Belloc. « Outre le fait que la présence de l’animal crée une forme de bien-être et d’apaisement, cela leur permet aussi d’être tout simplement eux-mêmes. De cette façon, ces adultes dont nous nous occupons voient que, à travers les animaux, ils ont de nouveau un statut social, ce qui a un effet miroir sur eux-mêmes. » Les bénéfices sont tout aussi certains sur les enfants chez qui un lien affectif se tisse sans tarder. « D’autant que pour le bien de l’animal les enfants prennent des initiatives. Comme ils ont souvent une faible estime d’eux, c’est très favorable aussi, parce qu’ils se fixent des objectifs ! »
A 15 ans, Benjamin est l’un d’eux. Voilà quatre ans qu’il est pensionnaire du Chêne vert. Depuis son arrivée dans les lieux, il est très assidu auprès des animaux. « Heureusement que j’ai fait leur connaissance. Ils m’apportent de la confiance en moi et je suis bien avec eux. Parce que je les promène et je prends soin d’eux. A l’extérieur je ne parle pas de cela. Je préfère me garder cet espace pour moi. »
Cerise sur le gâteau. Les adultes récupèrent les œufs des poules et les consomment. Quant au fumier, il est évacué sur le terrain des jardins partagés voisins du Chêne vert. Alors bien sûr la médiation animale n’est pas bénéfique pour la totalité de ces publics accueillis. Alice Belloc évalue à trois personnes sur quatre pour qui le programme a connu une issue positive. « C’est vrai que nous avons des échecs. On n’est pas des magiciens. Quand cela se produit, on en parle en équipe pour savoir ce qui n’a pas fonctionné. On se doit d’être en perpétuelle adaptation car l’idée est de ne pas être figé. »
Il n’empêche, à Flourens, la médiation animale semble avoir de beaux jours encore à vivre. Le pouvoir des animaux de la ferme continuera donc à s’exercer. Car le Chêne vert, financé par la préfecture et le Conseil départemental de la Haute-Garonne, nourrit le projet d’agrandir ce terrain de 4000 mètres carrés et d’acquérir d’autres amis de l’homme, notamment un poney.
Près de Toulouse, c’est grâce à ces animaux que cette éducatrice spécialisée pratique la médiation animale pour enfants et adultes.