Après les inondations particulièrement meurtrières qui viennent d’endeuiller l’Aude, l’heure est à la mobilisation aussi autour du monde agricole. Les soutiens viennent de la France entière dans le département qui s’organise.
14 morts et 75 blessés. C’est le dernier bilan publié ce mercredi par la préfecture de l’Aude après les impressionnantes inondations qui ont frappé le département en début de semaine. Mercredi l’état de catastrophe naturelle a été déclaré dans rien de moins que 126 communes, dont 70 où l’on déplore un impact agricole.
Voilà pourquoi l’association des agriculteurs audois sinistrés, créée lors des précédentes inondations de 1999, vient d’être réactivée. Composée notamment de la coopérative du Languedoc-Roussillon Coop de France, du syndicat des vignerons de l’Aude, de la Fdsea et des JA, la structure a pour vocation de recueillir toutes les propositions d’aides et de versements de fonds et de conseiller les familles du monde agricole touchées. Car du maraîchage au vignoble, c’est la totalité des cultures du département qui est affectée. Dans leur malheur, les viticulteurs par exemple, répètent à l’envi que fort heureusement les vendanges ont déjà été réalisées.
« En revanche, une partie du vignoble est totalement dévastée parce que les souches sont détruites. Alors il va falloir tout arracher pour replanter, mais on sait déjà que cela ne se fera pas aux mêmes endroits et que personne ne récoltera rien avant un moment ! » soupire Frédéric Rouanet, le président du syndicat des vignerons de l’Aude. Lequel précise que pour cette partie perdue des souches, c’est le fonds de calamité agricole qui interviendra. Tandis que pour les biens matériels, comme les voitures et les tracteurs, les différents assureurs privés doivent être sollicités.
Du reste, la Chambre d’agriculture précise que, pour l’instant, 300 dossiers de sinistrés agricoles sont parvenus à Groupama. Si l’heure est donc aux déclarations de sinistres, dont la date limite de dépôt est repoussée de 30 jours, le temps est également venu de procéder au nettoyage.
A l’image des pépinières Laffont situées à Trèbes, tout prêt de Carcassonne et à quelques dizaines de mètres d’ailleurs du supermarché martyre, dans lequel trois personnes avaient été victimes d’un attentat au printemps dernier et dont les quatre hectares de terre et les verrières ont tout simplement été ravagés par un torrent d’eau et de boue. Installés là depuis 1981, Norbert et Isabelle Laffont ont perdu 4 000 pots de chrysanthèmes et 2 000 de cyclamens ainsi que trois véhicules. Un préjudice qu’ils estiment au bas mot à 45 000 €, sans doute plus. « Bien sûr on est vivants et c’est le principal », soulignent-ils. « Mais on a quand même perdu énormément de petites boutures, alors que nous étions prêts pour le printemps prochain. On en a pleuré vous savez ! Et on a aussi mal au cœur pour Sébastien, notre employé qui doit reprendre l’exploitation dans deux mois » insistent-ils encore choqués. « Bien sûr on va repartir. Un assureur nous a déjà donné un acompte, sans lui avoir rien demandé. Nous avons aussi des collègues amis à Toulouse qui veulent nous aider et puis on a beaucoup de solidarité. »
En revanche, ils ignorent quand ils seront indemnisés et à quelle hauteur. La solidarité encore lorsque leurs clients ne cessent de les appeler pour leur dire qu’ils entendent bien le rester. « Mon téléphone n’a jamais autant sonné qu’en ce moment, c’est impressionnant et ça fait plaisir ! » se réconforte Sébastien Escande, le futur repreneur. Maintenant eux aussi vont se mettre en relation avec la Chambre d’agriculture, à Carcassonne, afin de savoir comment bénéficier de la réactivation de la cellule d’aide.
De son côté justement, la Chambre d’agriculture se félicite des offres de solidarité qui viennent de la France entière. Mais pour Stéphane Cailmail, porte-parole, c’est encore prématuré. « C’est vraiment très bien, mais on fera un appel en temps et en heure. Car il n’y a pas grand-chose à faire malheureusement. De nombreuses vignes sont mortes, elles sont mortes. A ce jour, ce que font nos techniciens sur le terrain, c’est un inventaire des destructions, pour dresser une carte des sinistres. Il faut bien se dire que le choc psychologique, il est énorme et on ne se relève pas d’un tel drame en 48 heures. Mais on y verra plus clair dans une ou deux semaines ! » Le préjudice global n’est toujours pas établi pour l’ensemble des acteurs de l’agriculture de l’Aude. Mais il devrait se monter à plusieurs millions d’euros.
A Trèbes, quantité d’exploitations sont saccagées, comme ici aux pépinières Laffont.