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Bien choisir son distributeur d’engrais

Les technologies disponibles sont nombreuses mais ne doivent pas faire oublier les fondamentaux de qualité d’épandage lors de l’achat d’un nouvel appareil.

 
Le marché français des distributeurs d’engrais est presqu’exclusivement représenté par cinqfabricants. On pourrait alors penser que le choix d’un tel appareil est aisé et que leurs ressemblances techniques répondent aux mêmes critères de qualité. Même si les constructeurs ont une offre large de modèles et accessoires, il existe pourtant des différences majeures dans leur fonctionnement et l’ergonomie lors de l’étalonnage ou de l’utilisation. Sans rechercher àconstruire un cahier des charges exhaustif, cet article doit surtout vous permettre de faire le tri dans une panoplie d’options et accessoires toujours plus automatisés. Que vous soyez entrepreneur, agriculteur ou Cuma, le distributeur idéal est celui qui montre le moins de défaut pour votre contexte d’utilisation. Face à la multiplicité de configurations possibles et le contrôle du coût de revient, n’oubliez pas que bien souvent : choisir c’est renoncer.
 
Fondamentaux first
L’engrais granulé, qu’il soit d’origine de synthèse ou organique, est épandable au champ par deux types d’appareils. Les épandeurs centrifuges projettent le produit au-delà de la largeur de travail tandis que les distributeurs à rampe, répartissent le fertilisant ou l’amendement via une rampe en pleine largeur à l’image d’un pulvérisateur de grandes cultures. Le mode de diffusion des granulés aura donc déjà un impact essentiel sur la qualité de répartition lorsque les conditions climatiques ne sont pas optimales. De plus, qu’il soit porté ou traîné, les distributeurs d’engrais se répartissent en deux modes de dosage : par écoulement gravitaire ou dosage volumétrique forcé (mécanique). Même si ces terminologies techniques peuvent paraître nébuleuses, elles concernent pourtant des fondamentaux d’étalonnage qui garantissent une parfaite qualité de répartition et de dosage à l’hectare. Il est donc essentiel de prioriser les critères de choix bien avant de plonger dans les accessoires ou autres automatismes qui étendent les performances ou la polyvalence.
L’entraînement mécanique d’une distribution forcée offre une précision d’étalonnage sans surprise une fois au champ.
 
Type de châssis
La conception du châssis est souvent complexe puisqu’en plus de supporter la trémie et les organes d’épandage, il doit parfois intégrer un système de pesée. Les procédés de peinture assurent une durabilité des trémies malgré le contact fréquent avec l’engrais très corrosif. Les constructeurs intègrent d’ordinaire des pièces de fond de trémie (agitateur, trappes, cônes…) et des organes d’épandage en acier inoxydable ou en matières composites. Avec un châssis porté, le distributeur d’engrais est plus économique à l’achat. C’est également la solution la plus favorable au gain de traction dû au report de charge sur le tracteur. A l’inverse, c’est également la configuration la plus pénalisante concernant la compaction du terrain. Si vous souhaitez cumuler capacité de trémie importante et attelage porté, il faudra alors majorer la puissance du tracteur uniquement pour un besoin de capacité de relevage. En considérant l’optimisation de traction, cette solution n’est alors pas toujours la plus économique à long terme. L’arrivée de châssis semi-porté a d’abord offert la possibilité d’ajouter une trémie supplémentaire comme benne de ravitaillement. Les distributeurs semi-portés augmentent efficacement le débit de chantier par l’accroissement de l’autonomie de l’appareil. Il faut toutefois bien anticiper le mode de remplissage afin que la hauteur du distributeur ne pénalise pas la logistique d’approvisionnement. Certains constructeurs d’automoteurs d’épandage d’effluents organiques ont adapté des cuves de distributeur d’engrais minéraux afin d’améliorer la polyvalence et le taux d’occupation des appareils. Sans véritablement augmenter le débit de chantier face à un appareil semi-porté, c’est surtout l’autonomie et la vitesse d’avancement qui peut être améliorée.
L’utilisation d’un appareil semi-porté peut réduire la compaction et améliorer le trafic lors des épandages des premiers apports, à condition de réduire le poids de l’ensemble tracteur-outil.
 
Entraînement/animation
Organes d’épandage : Les disques d’épandages sont majoritairement entraînés par la prise de force du tracteur. Dans ce cas, le respect du régime normalisé oblige à faire tourner le moteur à près de 2000 tr/min. Ceci génère une surconsommation alors que le couple d’entraînement est faible. Si votre parcellaire n’est pas excessivement pentu privilégiez les rapports de prise de force économiques ou l’entrainement hydraulique. Dans ce dernier cas, soyez vigilant au débit (en L/min) disponible aux prises auxiliaires de votre tracteur pour assurer la rotation des disques au régime préconisé par le contracteur. L’abandon d’une transmission à cardan est également une voie pour s’affranchir des contraintes de longueur lorsque le distributeur est utilisé à plusieurs (copropriétés, Cuma, location…) ou attelé en permanence à un lève-sac.
La commande d’ouverture et fermeture des trappes par hydraulique ou électrique a supplanté les anciennes commandes mécaniques réservées aux petits modèles. Vérifiez bien le sens de branchement des flexibles pour éviter les manipulations incongrues en dehors des phases d’épandage. Les commandes électriques accompagnent de plus en plus les régulations de dosage et la modulation de largeur exigée lors de l’activation des coupures de sections. Portez une attention particulière à l’intensité nécessaire pour alimenter l’appareil. Un faisceau d’alimentation depuis la batterie du tracteur peut être imposé par le constructeur pour assurer le bon fonctionnement.
L’entraînement hydraulique des disques permet d’optimiser le régime du tracteur et souvent sa consommation.
 
Caractérisation d’engrais et étalonnage
Tous les constructeurs de distributeurs d’engrais à double disques proposent des systèmes de régulation de débit proportionnels à l’avancement électronique (DPAE) efficaces (à pesée ou non). A tel point que la phase d’étalonnage est uniquement nécessaire pour garantir une bonne distribution dès les premiers mètres réalisés dans la parcelle. Au bout de quelques secondes, l’automatisme retrouve le débit adapté à la vitesse d’avancement et la largeur paramétrée. A quoi bon alors caractériser l’engrais avec une panoplie d’outils et de méthodes plus chronophages les unes que les autres ? En effet, on retrouve par exemple un kit pour estimer le poids spécifique (et donc la densité) de l’engrais chez Bredal. On vous demande d’estimer la répartition granulométrique chez plusieurs fabricants : Sulky, Bogballe et groupe Kverneland. Bogballe exige également une mesure de la dureté des granulés et Kuhn peut vous demander de juger de l’apparence de l’engrais. Si votre engrais est référencé dans la base de données du fabricant c’est encore une raison supplémentaire de se passer de l’étape d’étalonnage. L’impératif de caractérisation d’engrais ne concerne donc pas l’étalonnage du débit mais de la largeur de travail. En définissant le comportement balistique plus précisément, c’est un moyen de garantir une qualit de répartition d’engrais sur la largeur d’épandage. Malgré l’arrivée de premiers automatismes pour adapter la largeur de projection en continu, il est compliqué d’atteindre une répartition parfaite sans un contrôle de l’engrais. Ces vérifications ou comparaisons aux tables de réglages de chaque constructeur ne doivent en aucun cas vous dispenser de vérifier la répartition au sol par l’utilisation de bacs ou de tapis de contrôle. Si vous faites partie des sceptiques ou des témoins de bandes de cultures où la variation de couleur révèle une mauvaise répartition transversale, il est alors indispensable d’investir dans un kit de contrôle de répartition.
Il est surtout important de retrouver la table de réglage correspondante à son engrais pour la qualité de répartition transversale
 
Epandage de bordure
L’épandage sur les contours des parcelles requiert une précision pour limiter les pertes hors-champ à moins de 0.3% de la dose épandue. Les distributeurs d’engrais sont alors paramétrables selon trois types de bordures. Le mode ‘rendement’ est souvent utilisé pour épandre une parcelle entourée de haies. Lorsqu’une autre parcelle y est adjacente, il est également intéressant d’utiliser ce mode de bordure qui priorise le respect de la dose le plus proche possible de la limite de parcelle. Dans ce cas, bien souvent, les pertes sont alors plus importantes en dehors du périmètre visé. Le deuxième mode est souvent appelé ‘éco’ ou ‘environnement’ puisqu’il priorise la diminution des pertes à celle du dosage en bordure. Dans cette configuration, le débit d’engrais est souvent réduit sur le disque qui projette du côté de la bordure. La dernière manière d’épandre est plus stricte puisqu’elle permet de ne projeter aucun granulé en dehors de la parcelle. Elle contraint à utiliser un déflecteur central et oblige à réaliser le premierpassage au plus près du contour de champ. C’est cette dernière contrainte qui limite sa vulgarisation puisque la cadence de jalonnage ne coïncide plus avec le rythme de passage du pulvérisateur.
La réglementation plus rigoureuse de certains pays oblige les applications en bordure avec un déflecteur.
 
Automatismes
La coupure de section s’est vite démocratisée dans le monde de la pulvérisation à rampe. Les distributeurs d’engrais tentent de copier cet avantage en réduisant la largeur de la nappe d’engrais épandue. En modulant la distance de projection de l’engrais de chaque côté de l’appareil, les distributeurs limitent les zones de recouvrement où sur et sous dosage étaient fréquents. Puisque l’atteinte de la pleine dose dépend du chevauchement de plusieurs nappes, et donc de passages, il est plus difficile de respecter la même répartition transversale qu’en plein champ. L’utilisation d’un même capteur GPS permet en plus de la gestion de coupure de section, d’adapter parfois la dose en fonction des zones parcourues dans la parcelle. Il s’agit de la modulation intra parcellaire qui impose l’utilisation d’un épandeur d’engrais DPAE (débit proportionnel à l’avancement électronique) avec pesée dynamique. Pour appliquer des dosages différents, le terminal du distributeur d’engrais recevra alors en amont ou instantanément une cartographie de préconisation en fonction des caractéristiques du sol ou du développement de la culture (actuelle ou précédents culturaux). Afin de s’affranchir de l’utilisation de bacs ou de tapis de contrôle, certains distributeurs d’engrais reçoivent des capteurs qui analysent la nappe d’engrais durant son envol. Un automatisme modifie en continu le réglage de largeur d’épandage afin d’adapter la trajectoire de l’engrais. Ainsi, on vise à garantir la qualité de répartition transversale quelle que soit la qualité ou l’évolution des caractéristiques du produit durant l’épandage ou son stockage.
Au-delà de 24 mètres de largeur de travail, la nappe d’épandage peut dépasser 2000 m². Cela permet de relativiser sur la précision des automatismes de coupures de sections ou de modulations.
 

Dossier réalisé par Julien Herault
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