La CGB anticipe la fin des quotas betteraviers de 2017 en bâtissant une stratégie conquérante. Le syndicat propose à ses adhérents de produire 20 000 hectares de betteraves sucrières en plus pour être plus rentables, pour exporter plus et pour profiter de la hausse attendue et probablement durable des cours mondiaux de sucre.
La reprise des cours du sucre observée depuis quelques semaines suffit pour redonner espoir aux planteurs de betteraves sucrières de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB), après plusieurs campagnes très décevantes. Ces deux dernières années, les couts de production de la culture de betteraves (22 à 23 €/t) étaient en effet justes couverts, hors DPU, par les ventes des racines et des pulpes. Il est vrai que la très bonne organisation de leur filière et ses liens avec la recherche et l’industrie aident ses adhérents à saisir les opportunités qui s’offrent à eux.
Pour la première fois depuis 2011, la production mondiale de sucre serait déficitaire de 5 Mt à l’issue de a campagne 2015/2016. Et comme il se peut que les excès climatiques générés par l’El Nino aggravent, dans les prochains mois, le déficit de production de canne dans l’hémisphère sud, la hausse des cours du sucre pourrait alors s’inscrire dans la durée et motiver les planteurs de betteraves à produire plus.
En conséquence, la fin des quotas est un nouveau défi à relever sur les marchés mondiaux. Le projet défendu par le syndicat des betteraviers vise une production massive de racines et de sucre à moindres coûts en optimisant les outils de production de l’ensemble de la filière. Les agriculteurs sont suffisamment équipés pour augmenter leurs surfaces de betteraves et les sucreries sont dimensionnées pour allonger de trois semaines par an leur campagne. Ce qui est inenvisageable dans les autres pays européens.
Ainsi, le sucre français sera plus compétitif sur les marchés et la rentabilité de sa production sera moins sensible à la volatilité des cours du sucre du marché.
Concrètement, la CGB s’est fixé comme objectif d’augmenter de 5 %, dès le printemps prochain, la surface de betteraves et de la porter à 420 000 hectares contre 400 000 l’an passé. Et le sucre ainsi fabriqué fin 2016 et début 2017 serait ensuite stocké jusqu’à la fin officielle des quotas pour être ensuite vendu sur le marché mondial à l’export à un meilleur prix qu’actuellement si la reprise se confirme est évidemment.
Une telle optimisation de la chaine de production réduirait de 20 € le coût de revient de la tonne de sucre. Mais elle ne présenterait un intérêt pour les planteurs de betteraves que si les gains de productivité sont partagés moitié-moitié (soit l’équivalent de 1,5 €/tonne).
La CGB compte aussi sur la hausse annuelle des rendements de 1,1 tonne par hectare et sur les économies réalisées sur les coûts de production des hectares de betteraves cultivés en plus pour augmenter les marges des producteurs.
Par ailleurs, la réglementation européenne sur le taux d’introduction d’éthanol dans les carburants fossiles et l’entrée en application de la loi énergétique conduira la France à produire 8 millions d’hectolitres de bioéthanol en plus par an à des prix équivalents au sucre (22/23 €/t de betterave), soit l’équivalent de 60 à 70 000 hectares.
Aussi, en adoptant une stratégie très conquérante, la filière betteravière n’aborde pas la fin des quotas dans le même esprit que la filière laitière.
Mais la stratégie de la CGB dépend du contenu du nouvel accord interprofessionnel pour l’après 2017. Or les négociations sont en stand by. Le syndicat des planteurs compte en fait sur le Parlement européen pour adopter l’acte délégué soumis au vote des députés qui propose de redéfinir les contours des prochaines négociations collectives sans qu’ils ne constituent une entrave au droit de la concurrence. Or à ce jour, les industriels du sucre n’acceptent pas que la CGB soit l’interlocuteur des planteurs de betteraves.
Par ailleurs, l’enjeu de ces négociations est de parvenir à ce que le partage du risque entre les parties reste équilibré après 2017. Autrement dit, que la valeur ajoutée soit répartie équitablement quelle que soit la conjoncture.
Pour les planteurs de betteraves, le ratio 44/56 ne doit pas être remis en question. 56 % du prix de vente d’une tonne de sucre devra revenir aux industriels après 2017 et 44 % aux betteraviers, comme c’est le cas actuellement. Par exemple, si une tonne de sucre est vendue 400 €, 176 € sont versés au planteur (soit 26€/t de betteraves) et 224 € à l’industriel.
Mais après 2017, les transformateurs ne veulent plus que le prix de la tonne de betteraves soit corrélé à celui du sucre. Ils défendent un prix unique et veulent empocher seuls les profits générés par une hausse des prix.
Notre illustration ci-dessous est issue de la vidéo que nous avons diffusée sur l’arrachage des betteraves https://wikiagri.fr/articles/larrachage-des-betteraves-explique-en-video/6415