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Alimentation, l’obésité gagne du terrain

Plusieurs rapports récents précisent à quel point l’obésité constitue un phénomène préoccupant qui se répand dans le monde, y compris paradoxalement dans des pays qui connaissent des problèmes de malnutrition.

On est déjà sans doute dans la période où l’on commence à oublier les résolutions que l’on a prises en début d’année et parmi ces résolutions, il y avait peut-être celle de faire un régime alimentaire. En effet, la question du surpoids et de l’obésité est devenue une obsession pour des millions de personnes.

La FAO dans l’édition 2013 de La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture estime ainsi que 1,4 milliard de personnes de 20 ans et plus souffriraient de surpoids dans le monde et que parmi elles, 500 millions seraient obèses (chiffres de 2008). Ce phénomène concerne aussi de plus en plus d’enfants puisque le surpoids concernait quelque 40 millions d’enfants de moins de cinq ans en 2011. Le nombre de personnes obèses dans le monde a, en effet, augmenté de façon rapide depuis quelques décennies.

Un rapport publié en Grande-Bretagne en janvier 2014 par l’Overseas Development Institute (ODI) indique ainsi que le nombre de personnes dans le monde souffrant de surpoids et d’obésité serait ainsi passé de 23 % de la population mondiale en 1980 à 34 % en 2008. Or, la plus grande part de cet accroissement aurait été le fait de pays en développement (PED), en particulier des pays émergents, puisque le nombre de personnes souffrant de surcharge pondérale a été multiplié par 3,6 dans ces pays entre 1980 et 2008 pour passer de 250 millions à 904 millions. Dans les pays riches, durant la même période, leur nombre n’a été multiplié que par 1,7. La suralimentation n’est donc pas uniquement une conséquence du mode de vie des sociétés riches (alimentation trop abondante et trop riche, manque d’activités physiques liée à une vie de plus en plus sédentaire) puisque, désormais, la majorité des personnes en surpoids et obèses se trouvent dans les PED, alors qu’une partie de la population de ces pays peut aussi connaître par ailleurs des problèmes de sous-alimentation, y compris au sein d’une même communauté, voire d’un même ménage.

Un indicateur pour le surpoids

Mais qu’entend-on au juste par surpoids et par obésité ? L’indicateur qui permet d’évaluer un éventuel surpoids, voire une obésité, est l’indice de masse corporelle (IMC). Il s’agit tout simplement du rapport entre le poids d’une personne exprimé en kilos et sa taille exprimée en mètre (et qui est multipliée par deux). Ainsi, par exemple, si quelqu’un pèse 90 kg pour une taille de 1,80 m, son IMC sera proche de 28 (90 / 1,80 x 1,80 = 27,8). Selon la classification opérée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une personne a une corpulence dite « normale » si elle a un indice de masse corporelle qui se situe entre 18,5 et 24,9. Elle est en surpoids avec un indice de 25,0 à 29,9 et en situation d’obésité au-delà de 30,0, avec d’ailleurs trois sous-catégories d’obésité : une obésité dite modérée ou commune (IMC de 30,0 à 34,9), sévère (35,0 à 39,9) et massive ou morbide (au-delà de 40,0).

Selon les données de l’OMS, la proportion de personnes obèses serait la plus élevée dans les îles du Pacifique – 78,5 % à Nauru, 63,4 % à Tokelau, 56,0 % au Tonga, 50,6 % à Kiribati ou 40,9 % en Polynésie française –, puis dans certains pays arabes – Arabie Saoudite (35,6 %), Emirats arabes unis (33,7 %), Egypte (30,3 %), Bahreïn (28,9 %), Koweït (28,8 %). C’est aux Etats-Unis (33,9 %) que l’on trouve la plus grande part de personnes obèses au sein des pays développés. En Europe, les obèses se situent surtout en Macédoine (25,1 %), au Royaume-Uni (22,7 %) et en Grèce (22,5 %). Enfin, c’est en Asie que les personnes obèses sont les moins nombreuses en proportion de la population : Vietnam (0,5 %), Inde (0,7 %), Laos (1,2 %), Indonésie (2,4 %), Chine (2,9 %), Japon (3,1 %) ou Corée du Sud (3,2 %). Quant à la France, elle se situe entre le Royaume-Uni (22,7 %) et l’Allemagne (12,9 %) avec un taux de 16,9 %.

Une population de poids

Selon l’Enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l’obésité qui avait été publiée en 2012, la prévalence de l’obésité en France s’élevait à 15 %, soit un taux inférieur à celui de l’OMS. Cette année-là, le nombre de personnes obèses était évalué à 6,922 millions, alors qu’elles étaient 3,356 millions en 1997. En 2012, la proportion des personnes souffrant de surpoids s’élevait, quant à elle, à 32,3 %, soit 14,8 millions de Français. Cela signifie que plus de 47 % des Français avaient des problèmes de poids. Ils étaient seulement 38 % dans ce cas en 1997. Au total, le poids moyen de la population française a augmenté de 3,6 kg en l’espace de 15 ans, passant ainsi de 68,9 kg à 72,5 kg, tandis que la taille moyenne, elle, augmentait de 0,7 cm durant la même période. Bien évidemment, nous ne sommes pas tous égaux en la matière. La proportion de personnes souffrant de surpoids et d’obésité tend ainsi à s’accroître avec l’âge, celle-ci étant à peu près trois fois supérieure chez les 65 ans et plus que chez les 18-24 ans.

Il existe également des disparités en fonction du sexe de la personne. En effet, si les hommes souffrent davantage de surpoids que les femmes, ces dernières sont en revanche plus nombreuses à souffrir d’obésité. La plus grande proportion d’obèses se trouve ainsi chez les femmes de 55 à 64 ans. Les différences en fonction de la catégorie socioprofessionnelle sont aussi significatives. Ce sont les artisans et commerçants qui souffrent le plus d’obésité (17,2 %), devant les ouvriers et les agriculteurs (16,7 %), alors que les cadres sont la catégorie la moins touchée (8,7 %). Il est à noter que lors de l’enquête précédente, qui avait été menée en 2009, les agriculteurs étaient largement la première catégorie concernée avec une prévalence de 17,9 %. Si l’on fait exception du cas des indépendants, on peut considérer que plus on s’élève dans l’échelle sociale et moins le risque de souffrir d’obésité semble être élevé. Il en est de même pour le niveau d’instruction ou le niveau de revenu. Plus le niveau d’instruction ou le niveau de revenu est élevé et moins le risque de devenir obèse semble important. D’un certain point de vue, l’obésité est désormais considérée comme un marqueur social à un point tel que ces personnes font souvent l’objet de discriminations à l’embauche. Plus la taille de l’agglomération est importante et plus le risque d’être obèse apparaît également faible. Enfin, les différences régionales sont aussi très marquées avec une coupure entre deux France : la France du Nord-Est où la prévalence est forte (c’est dans le Nord-Pas-Calais que la prévalence est la plus élevée) et le reste du pays où elle plus faible (c’est dans la région Midi-Pyrénées qu’elle est la plus faible).

Les maladies de l’obésité

Les conséquences pour la santé de cette croissance de l’obésité sont désormais bien connues. Les principales maladies qui sont liée à l’obésité sont, d’après l’OMS, les maladies cardiovasculaires, soit la première cause de décès dans le monde, les troubles musculo-squelettiques (arthrose), certains cancers, le diabète, etc. Même si le coût économique direct de l’obésité n’est pas évalué, la FAO estime néanmoins dans La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture que « les coûts cumulés de toutes les maladies non transmissibles pour lesquelles l’excès pondéral et l’obésité sont les principaux facteurs de risque ont été estimés à environ 1 400 milliards de dollars en 2010 ».

Comment la situation pourrait-elle évoluer ? Si l’on en croit plusieurs études qui ont été publiées récemment, les perspectives paraissent alarmistes de ce point de vue. L’ONG américaine Trust for America’s Health a ainsi publié un rapport en 2012 dont le sous-titre était justement « comment l’obésité menace l’avenir de l’Amérique ». Il explique que si le taux d’obésité continue à progresser comme il l’a fait ces dernières années, celui-ci pourrait atteindre 44 % à l’échelle des Etats-Unis et même dépasser 60 % dans 13 Etats de l’Union. En Grande-Bretagne, le National Obesity Forum a publié, de son côté, un rapport en janvier 2014 qui estime que les prévisions effectuées en 2007 sur la proportion de personnes obèses à l’horizon 2050 ont sans doute été sous-évaluées. D’après le rapport, si rien n’est fait pour lutter activement contre ce fléau, cette proportion pourrait être supérieure à 50 % de la population britannique. Le Public Health England avait, quant à lui, estimé récemment qu’en 2050, en Grande-Bretagne, 60 % des hommes, 50 % des femmes et 25 % des enfants pourraient être obèses.

On n’a donc pas fini de parler de ce phénomène particulièrement préoccupant.

En savoir plus : http://apps.who.int/bmi/index.jsp?introPage=intro_3.html (classification par l’Organisation mondiale de la santé de l’Indice de masse corporelle), http://apps.who.int/bmi/index.jsp (données de l’OMS sur l’obésité), www.who.int/mediacentre/factsheets/fs311/fr/ (informations de l’OMS sur l’obésité et le surpoids), www.fao.org/docrep/018/i3300e/i3300e.pdf (rapport de la FAO de 2013 sur La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture), www.odi.org.uk/sites/odi.org.uk/files/odi-assets/publications-opinion-files/8776.pdf (rapport publié en 2014 par l’Overseas Development Institute), www.roche.fr/content/dam/corporate/roche_fr/doc/obepi_2012.pdf (Enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l’obésité de 2012 menée par l’INSERM, Kantar Health et Roche), http://healthyamericans.org/assets/files/TFAH2012FasInFat18.pdf (rapport publié en 2012 par Trust for America’s Health), www.nationalobesityforum.org.uk/media/PDFs/StateOfTheNationsWaistlineObesityintheUKAnalysisandExpectations.pdf (rapport publié en 2014 par le National Obesity Forum en Grande-Bretagne), https://www.gov.uk/government/organisations/public-health-england (site du Public Health England)

Notre photo d’illustration est issue du site http://icanhas.cheezburger.com.

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