L’efficacité du binage sur les adventices peut être meilleure que les solutions chimiques et atteindre 90 %. Comme ici avec bineuse Econet de chez Carré.
Le binage est une solution de désherbage mécanique qui fait ses preuves dans les itinéraires techniques biologiques mais également conventionnels en complément d’une protection chimique. Nous avons identifié neufs points clés pour améliorer le niveau d’efficacité et les bénéfices attendus.
Pas de phénomène de résistance des adventices, large spectre d’efficacité, ralentissement des vivaces, action à différents stades de la culture et des adventices, pas de réglementation contraignante, effet agronomique sur la battance et l’infiltration en eau, enfouissement de l’engrais, alternative de postlevée à l’interdiction du bro-moxynil en 2022… Il faut bien un inventaire à la Prévert pour décrire tous les atouts possibles du binage. Cela dit, la mise en œuvre de cet outil assez simple en apparence requiert une bonne technicité et un bon enchaînement des pratiques pour qui veut tirer le maximum de la valeur ajoutée du binage. L’efficacité dépend notamment de la possibilité d’approcher suffi- samment la culture. Cela est rendu possible par la bonne maîtrise de l’ensemble de la chaîne des travaux à commencer par la préparation du sol.
Des protèges-plants sont souvent utiles pour pouvoir agir aux stades les plus jeunes de la culture.
Voici 9 clés pour tirer toute la valeur ajoutée du binage
Le recours au binage mérite d’être anticipé dès la préparation du sol avec une préparation assez fine. La présence de grosses mottes sera favorable au phénomène de repiquage. Par ailleurs ces grosses mottes peuvent rendre le binage moins sélectif, avec un impact par recouvrement ou déchaus- sage sur la culture. La gestion des résidus a aussi son importance. Ces derniers peuvent s’accrocher dans les dents et produire un effet « râteau » contre productif. « Des résidus de vesce entière par exemple sont à risque. Des résidus de paille ou de canne limités à des tronçons de 15, 20 cm permettent malgré tout de faire un bon travail », souligne Nicolas Levillain, formateur technique chez le constructeur français Monosem.
Niveler le sol après le binage avec des peignes est intéressant pour éviter l’effet de tôle ondulée.
Des outils comme les moulinets à doigt permettent de travailler sur le rang avec de très bons niveaux d’efficacité.
Un semis soigné a toute son importance pour la réussite du binage. Il s’agit notamment d’assurer des levées homogènes et donc des stades de développement des cultures également homogènes. « Sans quoi, il sera très difficile de régler la bineuse et d’adapter le travail à l’état de la parcelle. Ce ne sera jamais le bon moment pour intervenir, explique Nicolas Levillain. Le respect de la consigne de profondeur au semis est donc extrêmement important. Cela passe notamment par un bon réglage de la pression de terrage ». Evidemment, le tracé de semis doit être le plus rectiligne que possible, sans écarts brusques, pour assurer le bon suivi de la bineuse.
Lors du semis, le rappui ou plombage de la graine est essentiel. « C’est un moment clé qui va aider la plante à s’ancrer dans le sol. La plante aura ainsi un avantage comparatif pour mieux résister lors du passage de la bineuse, contrairement aux adventices qui n’ont pas bénéficié de cette opération de rappui, souligne Nicolas Levillain. La sélectivité du binage n’en sera que meilleure. Avec une culture bien ancrée, on va aussi pouvoir accroître la vitesse de travail ». Dans tous les cas, le réglage du semoir monograine a toute son importance. Les pièces notamment doivent être graissées mais sans excès. L’usure des pièces de mise en terre mérite d’être contrôlée de même que les disques ouvreurs et les pointes.
Selon les stades et le type de culture, le recouvrement du rang est un effet qui peut être recherché pour la gestion de l’enherbement sur le rang.
Les fenêtres météorologiques idéales pour le binage, nécessitent un temps sec avant le passage et un temps sec après, idéalement deux jours avant et deux jours après, selon les préconisations d’Arvalis Institut du végétal. Les adventices auront dès lors bien moins de facilité pour se repiquer. Les fenêtres disponibles pour le binage sont sans doute un peu moins nombreuses que pour la pulvérisation. Cependant le binage n’est pas soumis aux contraintes de vent, et de ZNT. Le port d’équipements de protection individuel n’est pas utile.
Le grand principe du binage, c’est de biner comme on sème. « Si on sème à 6 rangs et 75 cm d’écarte- ment, il faut ensuite biner à 6 rangs et 75cm, souligne le formateur de Monosem. On ne doit pas être tenté de biner en 12 rangs par exemple. Ceci y compris avec un signal RTK. On n’est jamais à l’abri d’une erreur de réseau ou de signal défaillant. C’est valable au sein de l’exploitation, mais y compris lorsqu’on a recours à un matériel de l’extérieur, Cuma ou ETA. Par ailleurs, la bineuse doit être adaptée finement à chaque semoir. Au lieu de travailler partout à 75 cm, un semoir peut travailler avec deux écartements de 74 et deux écartements de 76. Même si c’est rare, cela peut arriver. Lors des premiers mètres de travail, il est toujours bon de vérifier et de rectifier l’alignement à la clé le cas échéant. Dans la mesure du possible, il est conseillé également de biner dans le même sens que le semis ».
Le guidage de la bineuse est un point clé de l’effica- cité du désherbage. A même niveau de sélectivité, une plus grande précision de guidage permettra de couvrir un espace plus large de l’inter-rang et donc d’être plus efficace. Des solutions par caméra sont une bonne alternative pour ceux qui recherchent la vitesse et le débit de chantier. Quel que soit le système de guidage choisi, l’entretien doit être assuré. L’aplomb par rapport au sol doit être bien vérifié ainsi que la hauteur du châssis par rapport au sol. Le chevauchement des dents doit aussi être bien réglé pour permettre un chevauchement assez large et donc une efficacité plus forte du scalpage. La profondeur de travail des dents mérite un réglage minutieux. En général, le binage ne dépasse pas les 2, 3, ou 4 cm de profondeur. Il faut éviter de remonter le stock de semences adventices et l’humidité favorable à la germination et au repiquage. Le risque à biner profond est aussi d’attaquer le chevelu racinaire de la culture en place.
Lors de la préparation de l’attelage tracteur-bineuse, il est parfois nécessaire d’envisager de changer les roues pour ne pas rouler dans le rang de la culture.
Dans les grandes régions d’agriculture biologique, les agriculteurs ont pris l’habitude de peaufiner les réglages à chaque parcelle en fonction du sol, des stades de la culture, et des espèces présentes. « Cette partie très technique peut être vécue comme une contrainte, mais c’est également assez motivant pour exploiter au maximum tout le bénéfice d’un binage », explique Nicolas Levillain.
Le binage a une action naturelle de scalpage sur l’inter-rang et un effet possible de recouvrement du rang. Ce deuxième effet mérite d’être modulé selon la situation. Il n’est généralement pas recherché en colza ou betterave de même qu’en maïs pour les stades les plus précoces. Des protèges plants peuvent être mis en position de travail. En revanche, en maïs, à partir des stades 5-6 feuilles le recouvrement est attendu pour étouffer les adventices sur le rang. Il est possible sur certaines machines de relever plus ou moins les protèges-plants pour moduler l’effet à partir du stade 3 feuilles maïs par exemple. Des disques de recouvrement peuvent compléter le dispositif. Plus la préparation du sol a été bonne en amont du semis, et plus on pourra travailler efficacement avec de la terre fine. Travailler à grande vitesse avec des types de dents spécifiques permet aussi d’accroître l’effet.
En général, le binage ne dépasse pas les 2, 3, ou 4 cm de profondeur. Il faut éviter de remonter le stock de semences adventices et l’humidité favorable à la germination et au repiquage.
Aujourd’hui différents outils existent qui permettent de travailler le rang lui-même lors du binage avec une efficacité parfois comparable au travail effectué dans l’inter-rang. Il est nécessaire pour cela d’adapter des équipements supplémentaires. Ce sont des moulinets à doigts, ou des roto-étrilles.
Le travail de la bineuse mérite d’être complété par des dispositifs de peigne ou de herse adaptés sur la machine. Il s’agit d’éviter l’effet de tôle ondulée notamment pour permettre de nouveaux passages de bineuse. Si on ne laisse pas suffisamment de terre dans l’inter-rang, il ne sera plus possible de gratter la terre ou alors au prix d’une agressivité sur les racines. C’est là qu’interviennent le travail des peignes à l’arrière de la bineuse pour recentrer la terre sur la largeur de l’outil.
Le binage a également un effet positif sur l’hydrologie du sol, selon le vieil adage qu’un binage vaut deux arrosages. Cela se justifie agronomiquement avec une rupture de la battance et une meilleure infiltration. Il est par ailleurs possible de fertiliser au moment du binage avec un bon enfouissement. C’est intéressant d’un point de vue agronomique aussi bien que d’un point de vue environnemental et réglementaire avec des évolutions sur dans les conditions d’applications des engrais minéraux. On peut aussi utiliser la bineuse pour semer des couverts, comme du ray-grass par exemple. Le binage a une grande polyvalence.Texte: Loïc Dufour