Les OGM sont sur le front de l’actualité en ce moment. Entre une nouvelle autorisation européenne, une loi contre eux en France, différentes mobilisations de la part des « anti », WikiAgri vous livre un nouveau point de vue, celui de Christian Jacob.

Lors du débat sur l’agriculture francilienne du Think thank de Valérie Pécresse Le Labo des Idées (lire notre article dédié, lien à la fin de celui-ci), Christian Jacob, agriculteur et ancien ministre, actuellement président du groupe Ump à l’Assemblée nationale, s’est clairement positionné en faveur des OGM. Voici le propos qu’il a tenu lors de cette réunion.
« Le courage de porter le message »
« Lors du débat sur la loi d’avenir de l’agriculture, j’ai observé un clivage très important au niveau des choix politiques. A mon sens, l’agriculture repose sur trois piliers : la rentabilité (elle a pour mission de produire), le progrès social (que les agriculteurs vivent de leurs productions), l’environnement. Trois piliers, mais dans cet ordre. Or, la gauche nous propose de faire passer l’environnement avant le reste. Et si on inverse l’ordre, ça ne tient pas. La capacité de production est vitale. Nous devons encore augmenter notre production aujourd’hui. Il existe deux méthodes. L’extensification, qui consiste à s’octroyer de nouvelles terres. Ce n’est pas pour nous en France. Cette méthode est utilisée dans d’autres pays comme le Brésil par exemple, avec le problème de déforestation qu’il suscite au passage. L’autre méthode est l’intensification. L’enjeu est déterminant, non seulement pour les agriculteurs eux-mêmes, mais aussi pour les 20 % d’actifs français – les chiffres donnent entre 17 et 23 % selon les modes de calcul, transigeons à 20 – qui vivent directement ou indirectement de l’agriculture. S’il ne s’agit que d’entretenir les paysages, on va faire l’inverse, diviser le nombre d’agriculteurs par 2, 5, 10… C’est le risque aujourd’hui, avec le ce que propose le gouvernement dans sa loi agricole. Vous vous rendez compte que le mot « alimentation » ne figure pas dans la définition de l’agriculture que propose cette loi ? Parallèlement, il n’est plus question aujourd’hui d’augmenter le nombre d’intrants. Alors comment intensifier ? Moi, je défends la recherche sur les OGM. Il faut qu’on ait le courage de porter ce message et de l’expliquer. On a abandonné en France la recherche variétale. Alors que nous pourrions avoir la capacité de protéger les cultures des agressions extérieures tout en limitant les intrants. La peur des OGM fait qu’on a 20 ou 30 ans de retard en France. C’est un cadeau que nous avons offert à l’industriel américain Monsanto. Grâce à Bové et Mamère, Monsanto détient le monopole sur les OGM. Je sais, nous n’avons pas toujours dit ça. Et cette position n’est pas encore majoritaire à l’Ump, mais je me fais fort de la porter. Si nous voulons une agriculture qui réponde à ses missions avec une rentabilité en rapport, alors nous devons passer aux OGM.«
Dans la même soirée (ce paragraphe sort du sujet OGM, mais pour info), le même Christian Jacob a donné un point de vue tout aussi offensif sur les normes environnementales : « Je pense que nous devons utiliser les normes comme un outil de protection. Elles peuvent nous permettre d’être très offensifs sur les marchés. Nos agriculteurs suivent des normes souvent draconiennes, elles doivent devenir un argument, un atout, et donc cesser d’être ressenties comme des contraintes. Cela signifie qu’il faut mener une vraie politique européenne sur le sujet. Quand on met en jeu une politique nationale là-dedans, on se fait taper. Alors que les normes peuvent, et doivent devenir la marque de fabrique de la production européenne. »
Une nouvelle variété OGM en Europe…
Ce point de vue de Christian Jacob sur les OGM intervient en plein milieu d’une chaude actualité sur le sujet. L’Europe est en train d’autoriser la culture d’une deuxième espèce, après le MON810 (cultivé en Espagne notamment) : le maïs transgénique Pioneer TC 1507. Un maïs qui résiste aux insectes, fabriqué par les Américains DuPont et Dow Chemical. Le Parlement européen s’est prononcé contre, les Etats membres n’ont pas tranché, de fait la décision appartient à la Commission européenne, que l’on sait favorable, globalement, aux OGM. Une fois cette décision prise, chaque Etat-membre ne pourra refuser la culture que s’il parvient à démontrer une dangerosité propre à son territoire.
… Un vote anti-OGM au Sénat
Considéré comme ne présentant aucun danger pour l’environnement, ce nouvel OGM est toutefois décrié en France. Au Sénat, la commission des affaires économiques vient de voter « l’interdiction de mise en culture de maïs OGM » sur notre territoire. En fait, cette loi sénatoriale a déjà pour objet d’empêcher les semis de MON810, que notre Conseil d’Etat avait autorisé. Pour autant, aucun argument précis n’a été avancé pour ce vote, la commission sénatoriale en question invoquant des « incertitudes » (par rapport aux effets des OGM sur l’environnement) qui sont davantage les siennes que scientifiques.
En dehors du législatif, Greenpeace a tenu une manifestation anti-OGM sur le Champ de Mars à Paris, tandis que l’économiste Philippe Chalmin, lui, vient de signer une tribune dans Le Figaro (lien ci-dessous) évoquant « l’immense gâchis français » consistant à avoir refusé le progrès scientifique.
En savoir plus : https://wikiagri.fr/articles/valerie-pecresse-integre-une-agriculture-competitive-dans-son-programme-regional/934 (notre autre article sur l’ensemble de la réunion du Labo des Idées sur l’agriculture) ; http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl13-331.html (loi sénatoriale contre les OGM) ; http://www.lefigaro.fr/vox/economie/2014/02/11/31007-20140211ARTFIG00346-ogm-l-immense-gachis-francais.php (tribune signée de Philippe Chalmin dans le Figaro).