L’apport en protéines est souvent le frein pour gagner en autonomie des rations, car il est difficile de valoriser les protéagineux cultivés sur l’exploitation. Chose possible grâce à un système mobile de toastage par voie sèche des graines protéagineuses, qui, en les cuisant, améliore leur digestibilité.
Pour gagner en autonomie alimentaire, les éleveurs ont tout intérêt à valoriser leurs cultures dans la ration. Encore faut-il que ce soit techniquement possible.
Pour les protéagineux, même aplaties, les graines ne sont pas bien valorisées. Il faut les cuire pour augmenter la digestibilité des protéines dans le rumen et éliminer les tannins. Pas facile à la ferme, jusqu’à ce que se développent des unités mobiles de toastage. Ce toastage, par une cuisson à sec à 280°C, détruit les facteurs anti-nutritionnels, comme les antitrypsiques ou les lectines, des féveroles, lupins et autres pois. Les protéines sont plus digestes dans l’intestin et ne sont plus perdues par la transformation ruminale. Avec le toastage, le pois passe de 82 à 156 g de PDIE (protéines digestibles dans l’intestin transformées en énergie). « Une féverole toastée aura une valeur en PDIE supérieure à un tourteau de colza, un lupin celle d’un tourteau de soja », chiffre Benoît Portier, des chambres d’agriculture de Bretagne. La cuisson élimine aussi bactéries et champignons, ce qui améliore la conservation. C’est une alternative sans chimie au tannage. Elle est moins énergivore que l’extrusion mais n’enlève pas l’huile de la graine, il faudra en tenir compte pour équilibrer la ration. Le toastage a aussi un intérêt pour les monogastriques car la cuisson élimine les facteurs anti-nutritionnels, notamment du soja.
Cette nouvelle possibilité de valorisation de ses protéagineux est particulièrement intéressante en bio où le prix des tourteaux flambe.
Si la technique est intéressante, encore faut-il qu’elle soit accessible, à un coût raisonnable. Depuis 3 ans, des initiatives se mettent en place pour rendre ce toastage possible directement sur l’exploitation.
A la demande d’éleveurs, deux Cuma départementales, en Vendée et dans le Gers, ont investi dans des toasteurs à protéagineux, qui circulent d’exploitation en exploitation. Installé sur une remorque de camion, le toasteur, une machine italienne de marque Mecmar, peut se déplacer de ferme en ferme. Une deuxième remorque transporte un groupe électrogène et un nettoyeur qui fait passer les graines au travers de 4 tamis. Un tapis roulant les emmène dans le toasteur où elles sont cuites par voie sèche à 280°C. Il ne restera plus qu’à les ventiler avant de les stocker. Les graines se conservent 6 mois. Ce dispositif représente un gros investissement (125 000 euros pour la Cuma Défis 85, 85 000 euros dans le Gers) qui nécessite une dimension collective. Cette mutualisation permet d’obtenir un coût entre 30 et 50 euros la tonne.
Protéa Thermic, une entreprise privée, a mis au point une installation mobile similaire avec également une machine Mecmar, qui assure des prestations de services en Bretagne, Pays de la Loire et Normandie. « Le toastage à la ferme apporte transparence, traçabilité et sécurité », assure Joël Guégan, le dirigeant de Protéa Thermic, qui mise sur son développement. Un camion-remorque déplace l’installation de ferme en ferme. « Avec une bonne organisation, on peut traiter 40 tonnes par jour », estime-t-il. Pour 200 euros de l’heure, un éleveur peut faire toaster 4 tonnes de graines. Une trémie de 80l, posée au sol, assure le chargement depuis une remorque ou un big bag. L’installation de toastage est amenée avec un nettoyeur-trieur qui permet de séparer les différentes graines, d’un méteil par exemple, pour une durée de cuisson adaptée à chaque type de graine. Un contrôle est réalisé par dosage des composés chimiques pour adapter le temps de cuisson et obtenir la qualité optimale.
Notre photo ci-dessous est fournie par Protéa Thermic, et montre la machine Mecmar, un toasteur à protéagineux.