Veau bio sous la mère, un marché porteur

La coopérative SCA le Pré Vert commercialise exclusivement des viandes bio. Située à Coulounieix-Chamiers en Dordogne, elle recrute des éleveurs de veaux bio sous la mère.

La viande bio confirme son ascension. Selon Interbev, les ventes ont augmenté de 150 % en dix ans. En 2013, les abattages labellisés ont progressé de 2 %, tandis que les volumes reculaient en conventionnel.

La filière se structure autour de petits opérateurs comme la coopérative SCA le Pré Vert. Rayonnant dans le sud-ouest de la France, c’est l’une des rares coopératives intégralement spécialisées dans la viande bio. Le 13 mars dernier, le directeur du Pré Vert, Benoit Granger, a présenté ses besoins aux éleveurs corréziens. La rencontre avait lieu au lycée agricole de Naves, qui propose plusieurs formations d’agriculture biologique.

Les débouchés de la viande bio

La SCA le Pré Vert a été fondée en 1997 par un petit groupe d’éleveurs certifiés. « Le but était d’approvisionner un boucher de Périgueux et de vendre un peu sur Paris. Suite à la crise de la vache folle, la coopérative s’est spécialisée en productions bovines, puis s’est diversifiée. La totalité de nos animaux abattus sont commercialisés en bio. Pour nos clients, c’est un gage de traçabilité. En 2005, ce taux était deux fois moindre car le marché du bio n’était pas aussi développé », rappelle Benoit Granger.

La SCA le Pré Vert approvisionne des magasins spécialisés – notamment le réseau des magasins Biocoop dont la coopérative est sociétaire – des boucheries traditionnelles et quelques transformateurs (surtout pour la baby-food). Son chiffre d’affaires atteignait 3,5 millions d’euros en 2014, et les 60 adhérents sont exclusivement des producteurs.

Les porcs (56 tonnes fournies par le lycée de Naves) sont abattus et transformés par un laboratoire spécialisé à Limoges. Les autres animaux (228 tonnes de gros bovins, 82 tonnes de veaux de lait, 78 tonnes de veaux rosés et 24 tonnes d’agneaux) sont livrés à l’abattoir de Ribérac en Dordogne : « Cette sous-traitance limite les frais de fonctionnement. Pour couvrir la rémunération de nos huit salariés, nous prélevons une marge de 12% sur les ventes. Par ailleurs, comme l’abattoir de Ribérac concentre son activité en fin de semaine, nous  trions les animaux selon la qualité désirée par les clients. Comme nous fournissons à l’abattoir presque des volumes conséquents, nous avons construit un vrai partenariat », constate Benoit Granger.

La découpe est effectuée dans un atelier à Brive. Les volumes de la coopérative garantissent une flexibilité d’approvisionnement (des quartiers à la carcasse entière) et une qualité constante. Par conséquence, les prix sont réguliers pour les éleveurs toute l’année : « Nous payons jusqu’à 9,80€ le kg de veau de lait et 5,50€ pour les gros bovins », confie le directeur.

Le marché porteur du veau bio

La SCA le Pré Vert produit du veau rosé bio depuis 2009. Complémenté avec des céréales et des protéines en fin de vie, ces animaux sont destinés à la restauration collective : « Les cuisiniers apprécient le rendement cuisson du veau rosé. Nous fournissons une trentaine de cantines scolaires en Dordogne et dans le Limousin, et aussi la plus grosse centrale d’Aquitaine. Ce débouché a fortement progressé et il représente 30% de l’activité », se réjouit le directeur. Une aubaine pour les éleveurs bio qui vendaient auparavant des broutards aux centres d’engraissement italiens : « Ces veaux bio passaient ainsi dans le circuit conventionnel avec une faible rémunération ! Depuis, la restauration collective nous commande 600 veaux rosés par an. Tous les animaux annoncés sont vendus, c’est un vrai succès ! », estime le directeur.

Cependant, le veau de lait bio (label rouge) reste le produit phare de la SCA le Pré vert. « Le veau blanc nous a sauvé… Nous sommes les seuls à produire cette qualité en France, mais nous manquons de volumes. Nos clients préfèrent le veau très clair, ils veulent voir en rayon la différence de couleur avec le bœuf. Même si c’est plus difficile, on encourage les éleveurs à se lancer dans le veau blanc. La demande est réelle pour une viande classée en catégorie de couleur 0, 1 ou 2, c’est-à-dire, entre blanc et rosé clair », constate Benoit Granger.

Réussir ses veaux de lait bio

Francis Rousseau, animateur de l’association Veau de lait sous la mère, a confié les cinq secrets essentiels pour obtenir une viande claire en huit mois : les veaux doivent bénéficier d’une bonne génétique, d’un certain confort (la qualité du paillage, de l’eau et de l’air sont essentiels), de lait à volonté, de calme (les traitements contre les poux, les teignes et les mouches limitent les agacements) et d’une dispense totale d’exercice physique. « Pour rester couché, le veau doit se sentir bien. L’éleveur devrait pouvoir se coucher sur la paille ! La nouvelle règlementation impose pourtant des cases jusqu’à 4 mètres carrés, ainsi qu’une aire d’exercice intérieure ou extérieure de 3 mètres carrés », précise Francis Rousseau.

Côté génétique, la station du Moussours en Corrèze cherche à augmenter le potentiel laitier de ses taureaux pour améliorer la lactation des génisses de renouvellement. « Concernant la génétique, il faut plutôt privilégier les races précoces, car le veau forme son persillé à partir de huit mois. Cependant, pour franchir deux classes de couleur, il faut davantage se soucier de l’état d’engraissement que de la conformation. Les veaux bien finis expriment pleinement leur potentiel génétique et conservent leur couleur blanche. Comme le lait en poudre est interdit en bio, je conseille d’introduire 20% de tantes dans les troupeaux », explique Francis Rousseau.

Dès le troisième mois, le veau limousin a besoin de 1500 litres de lait de qualité (très protéiné et peu gras) mais il ne reçoit 1000 litres de sa mère. Les tantes apportent les 5000 litres manquants, qu’il s’agisse de montbéliardes, normandes, simmentals, brunes des Alpes ou abondances. « Il faut bien nourrir les vaches. Si elles puisent dans leurs graisses, leur lait sera concentré en acides gras saturés. Au début de sa vie, le veau de lait a besoin de protéines pour produire ses muscles et accompagner sa croissance. A la fin, il a besoin de bonnes matières grasses qui constitueront le persillé dans les muscles, sans fatiguer le foie. A ce titre, le lait des vaches limousines est bien équilibré », observe Francis Rousseau.

Des protéines et du sucre avant l’abattage

Enfin, la dernière semaine, certains éleveurs ajoutent des œufs dans l’alimentation. Ils apportent des protéines et des acides aminés de qualité. « Par ailleurs, lorsqu’il part à l’abattoir, le veau ne doit pas être à jeun. Le stress entraîne une dépense de sucre et d’adrénaline. Si on ne peut pas faire téter le veau avant qu’il monte dans le camion, il doit boire de l’eau sucré. C’est important pour son bien-être, et le glycogène des muscles favorisera la saisie de la viande dans la poêle », conseille Francis Rousseau. « Cela peut aider mais selon moi, les tétées finales ne changent pas grand-chose. Lorsqu’un veau est gras à l’étable, la viande sera grasse », nuance Benoit Granger.

En savoir plus : https://www.facebook.com/pages/SCA-Le-Pr%C3%A9-Vert/186191581525535 (page facebook de la SCA le Pré Vert) ; http://www.veausouslamere.com (site de l’association le veau sous la mère), http://www.interbev.fr/ressource/observatoire-des-viandes-bio-2014 (rapport d’Interbev sur la viande bio) ; http://www.lycee-agricole-tulle.educagri.fr (site du lycée agricole de Naves).

L’élevage bio du lycée agricole de Naves, en Corrèze.

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