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Coopératives agricoles, comment impliquer davantage les administrateurs dans les prises de décision

Plus les coopératives et leurs filiales sont importantes, plus les méthodes de gestion appliquées sont semblables à celles en vigueur dans les grands groupes industriels. Or la gouvernance repose sur la conduite équilibrée et concomitante d’un projet agricole et territorial et d’un projet économique et industriel. La loi Alimentation publiée le 2 octobre 2018 propose de revoir leur gouvernance par ordonnance. Bertrand Valiorgue et Xavier Hollandts, professeurs d’université, font d’ores et déjà trois propositions.

L’article 8 de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole  et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous prévoit que « le gouvernement est habilité à prendre par ordonnances, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, des mesures afin de renforcer la lisibilité et la transparence des informations contenues dans les documents transmis aux associés coopérateurs par l’organe chargé de l’administration de la société ou adoptés en assemblée générale, notamment le règlement intérieur, le rapport annuel et le document unique récapitulatif ».

Le deuxième alinéa de l’article 8 précise que ces mesures « amélioreront la lisibilité et la transparence par les associés coopérateurs des modalités de détermination du prix et de la répartition des résultats de la coopérative au travers de l’élaboration de documents appropriés ».

Le projet d’ordonnance du gouvernement est ainsi l’occasion de débattre, pendant six mois, des nouvelles règles à adopter. Ce sera par exemple l’occasion de généraliser les initiatives qui existent dans certaines coopératives et de faire ressortir les outils de gestion qui donnent un nouveau cap à leur gouvernance.

Auteurs du référentiel de gouvernance des coopératives agricoles paru en 2016, Bertrand Valiorgue et Xavier Hollandts, respectivement professeur de stratégie et gouvernance des entreprises à l’université de Clermont-Ferrant et professeur de stratégie et entrepreneuriat pour Kedge Business School au campus de Bordeaux, font d’ores et déjà trois propositions visant à remettre les agriculteurs au cœur de la gouvernance des grands groupes coopératifs et de leurs filiales, dont ils sont privés de tout droit de regard. Car selon ces universitaires, les coopératives vivent un tournant historique.

Un pacte d’orientation coopérateur pour réduire la distance entre adhérents et dirigeants

« Le fonctionnement et l’organisation des conseils d’administration des coopératives sont restés quasiment identiques alors qu’elles se sont agrandies et complexifiées. L’organisation en sablier, qui sépare les adhérents et administrateurs du directeur et des administratifs occulte la gestion stratégique des groupes coopératifs », défendent Bertrand Valiorgue et Xavier Hollandts.

Or la bonne gouvernance d’une coopérative repose sur la conduite équilibrée et concomitante d’un projet agricole et territorial et d’un projet économique et industriel. Elle appelle pour ces raisons des réponses particulières lorsque les coopératives deviennent des groupes internationaux constitués de filiales.

Par exemple, les deux universitaires suggèrent la rédaction et le vote d’un pacte d’orientation coopérateur (Poc) pour réduire la distance entre les adhérents et les dirigeants des coopératives et mieux comprendre comment sont valorisés leurs produits.

Ce Poc « servira de fondement aux objectifs stratégiques fixés par les dirigeants et les administrateurs. Il est susceptible de donner un sens renouvelé aux assemblées de section et à l’assemblée générale car il précise le mandat confié aux administrateurs de la coopérative », affirment les deux enseignants universitaires.

Concrètement, ce pacte d’orientation coopérateur expliquerait la « raison d’être de la coopérative, sa trajectoire agroécologique » et comment celle-ci s’inscrit dans le territoire. Le Poc expliciterait aussi la politique de croissance du groupe coopératif et de distribution de dividendes en provenance des filiales.

Donner aux administrateurs les moyens d’être associés aux prises de décision au plus haut niveau

La deuxième proposition de Bertrand Valiorgue et Xavier Hollandts vise à rééquilibrer la gouvernance des coopératives dans l’organigramme de la coopérative en donnant aux administrateurs les moyens d’être associés à des prises décision au plus haut niveau avec la direction générale.

Dans un souci de transparence, les deux universitaires industriels suggèrent d’installer quatre comités spécialisés dans les conseils d’administration. Leurs compétences porteraient sur la rémunération et des nominations, l’audit, les filiales et des participations et enfin, la vie coopérative et le développement durable.  

Présidés par une ou un vice-président(e) de la coopérative, ces comités seront « susceptibles de faire monter en compétence les administrateurs sur les enjeux industriels et économiques. Ils permettront également aux administrateurs de s’appuyer sur des expertises et points de vue externes pour mieux contrôler l’action des dirigeants ».

Impliquer les administrateurs des coopératives dans les principales filiales

Par ailleurs, la gestion des filiales des coopératives échappe complètement aux adhérents des coopératives alors qu’elles ont été créées pour donner de la valeur aux produits agricoles. Les agriculteurs ont même le sentiment de ne pas en profiter.

Aussi, les deux universitaires proposent d’impliquer les administrateurs des coopératives dans les principales filiales pour « aider le conseil d’administration de la coopérative mère à suivre et accompagner la croissance du groupe coopératif ainsi que les politiques de filières ».

Il s’agirait par exemple de « donner la présidence des principales filiales à des vice-présidents de la coopérative mère et à leur adjoindre, le cas échéant, un ou deux administrateurs ». Et une fois par an, le conseil d’administration de la coopérative serait « dédié à l’évaluation du fonctionnement des filiales et des relations intragroupe (objectifs, stratégie commune, stratégie différenciée, etc.) ». Les présidents de ces filiales auraient ainsi à leur disposition les éléments pour comparer les résultats des filiales et leur contribution au projet coopératif. 

Enfin, « un découpage du groupe coopératif » et « une mise en cohérence des filiales qui reflète la politique de filières de la coopérative » aideraient les administrateurs de coopératives, selon les deux universitaires, à mieux appréhender le fonctionnement de l’ensemble du groupe coopératif. Ces mesures seraient aussi associées « à une cartographie de la gouvernance du groupe (périmètre, participations, etc.) et des mandats au sein des filiales ».

 

En savoir plus : https://theconversation.com/trois-propositions-pour-reformer-la-gouvernance-des-cooperatives-agricoles-106462 (trois proposition pour réformer la gouvernance des coopératives agricoles).

 

1 Commentaire(s)

  1. Du ménage à faire dans nos coops.. j’ai tellement entendu certains adhérents me dire.. « Nous sommes plus rien sauf un numéro » on ne va plus aux assemblées de sections ni à l’ AG, çà ne change rien , il ne nous écoute pas et si on un une grande gueule, on a vite fait de se faire jeter… j’ai toujours trouvé ces récits tellement injuste… Je me suis souvent dit que dans ces grosses coops , il fallait une bonne formation pour discuter des budgets, des bilans, des comptas… Et des orientations… Les coops ne devraient elles pas contribuer à former ses adhérents… Mais nos paysans sont-ils prêts à « perdre » une journée à passer en formation et à participer aux décisions ???

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