Les associations des agriculteurs de méthaniseurs de France (AAMF) et des agriculteurs composteurs de France (ACF) structurent une filière d’énergies renouvelables (gaz, électricité, bois énergie…) en profitant d’une tête de réseaux associatifs de développement agricole et rural, Trame.
Depuis plus de 20 ans, les agriculteurs ont leur club d’entrepreneurs. Tête de réseaux associatifs de développement agricole et rural (Trame) fait émerger des idées nouvelles et aboutir des projets dans des secteurs pour le moins variés. Mais ces projets préfigurent souvent l’évolution de l’agriculture française en structurant de nouvelles filières. Parmi elles, les associations des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF) et des agriculteurs composteurs de France (ACF) sont deux réseaux qui connaissent un fort engouement depuis quelques années.
A ce jour, la première association regroupe la moitié des agriculteurs producteurs de biogaz français et la seconde comprend une quarantaine de membres. Les deux associations représentent les producteurs agricoles de composts et de biogaz (et défendent leurs intérêts) auprès des pouvoirs publics, des instances de décision, jusqu’à la Commission européenne. Leurs activités sont reconnues aussi bien par les organisations professionnelles que par le gouvernement, en passant par les collectivités locales.
Les agriculteurs méthaniseurs de France sont consultés pour la rédaction d’arrêtés et de nouveaux décrets ou pour faire entendre, études à l’appui, leurs revendications en matière de prix auquel leur électricité devrait être rachetée. L’appui de Trame est aussi utile pour gagner la confiance des partenaires financiers (banques, collectivités locales) nécessaire pour accompagner des projets des méthaniseurs, et fédérer plus facilement ERDF et GRDF, indispensables aux projets.
La méthanisation dans les exploitations est d’ailleurs une occasion pour GRDF de redécouvrir une dimension de ses activités, oubliée depuis la fin de l’extraction du gaz de Lacq dans les années 1960, à savoir la production diffuse de gaz. Depuis près de 50 ans, l’activité de ce groupe est réduite à celle de transporteur de gaz par pipeline ou par camion, depuis des ports de déchargement jusqu’au consommateur. En collaboration avec AAMF, GRDF crée des points de collecte et de raccordement des exploitations productrices de gaz au réseau local lorsque c’est possible. Car remonter le gaz dans le réseau via des pipelines est à ce jour inenvisageable. Toutefois, des localités s’associent parfois à des projets de méthanisation d’agriculteurs en créant un réseau de distribution lorsqu’il n’y en a pas.
Sinon, le méthaniseur de l’agriculteur producteur de gaz peut aussi être couplé à un cogénérateur pour produire de la chaleur. Elle servira alors à chauffer des bâtiments d’élevage ou des habitations. Enfin, dernier scénario envisageable, la production d’électricité par cogénération pour être ensuite vendue à ERDF.
La production de gaz, d’électricité ou de chaleur reste pour les agriculteurs méthaniseurs une activité complémentaire à leurs productions agricoles. Compte tenu des enjeux financiers en jeu, Trame veille à ce qu’elle leur procure un revenu suffisant pour rentabiliser les capitaux investis.
Ainsi, la création de l’AAMF est la réponse apportée par Trame à une demande formuée par les pionniers de la méthanisation de les structurer en un réseau national, lieu d’échanges, de soutiens et de revendications. Le travail en réseau est, selon Trame, la clé de réussite de tous les porteurs de projets. Bienvenue à la ferme, qui rassemble des agriculteurs qui ont une activité touristique, a été créé de la même façon. Et le succès remporté préfigure l’expansion que peut espérer l’AAMF.
L’activité d’AAMF s’inscrit dans la volonté de construire un réseau indépendant. Ses adhérents refusent d’être sous l’emprise d’entreprises multinationales telle que Véolia.
Trame et ses salariés/équipes de salariés apportent aux méthaniseurs l’encadrement technique et réglementaire requis pour produire efficacement du gaz. Ce qui n’est pas sans difficultés compte tenu des atermoiements du gouvernement et de l’instabilité réglementaire à laquelle les producteurs de gaz sont confrontés. Par exemple, la décision de limiter à 15 % de la SAU, la surface des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) compromet l’alimentation des méthaniseurs et par conséquent la viabilité économique de ces projets.
En production biologique, l’énergie produite peut aider à faire sécher des fourrages et le substrat constituer un apport d’engrais pour booster les cultures au moins équivalent à de l’engrais chimique.
Mais la conjoncture n’aide pas à l’essor de la méthanisation. La réglementation non plus ! Les règles d’épandage des substrats entravent l’essor de la filière.
Par ailleurs, de nombreux éleveurs ponctionnent sur leurs fonds propres pour compenser leurs déficits de recettes sur leurs exploitations dus à la faiblesse des prix sur les marchés. A l’avenir, de nouveaux montages financiers avec les collectivités locales par exemple, mais aussi avec la Bpi pour les gros projets, s’imposent. Le ministère de l’Agriculture ambitionne la construction de 1500 méthaniseurs à l’horizon de 2018.
Le financement participatif est une alternative aux modes de financement traditionnels pour élaborer des plans de financement viables. Le site de financement participatif Greenchanenel, filiale d’ENGIE collecte l’épargne de particuliers pour l’investir dans des installations destinées à la production d’énergie renouvelable.
Même si le secteur est soumis à des tarifs réglementés, accorder de nouveaux des crédits d’impôts aux investisseurs serait un plus.
A l’avenir, les Agriculteurs Méthaniseurs de France élaborent une chartre de qualité pour garantir la composition des substrats épandus dans les champs et favoriser leurs épandages. Très riches en matière azotée, ils peuvent aisément se substituer à aux engrais chimiques et réduire, par conséquent, les coûts de fertilisation des sols.
Chez François Trubert, éleveur au nord de Rennes, le méthaniseur apporte un revenu électrique qui consolide l’économie de son exploitation et permet de faire évoluer l’élevage : « Avec la chaleur, je chauffe mieux les poulaillers : au final c’est 85% des bandes sans antibiotique. Je produis plus de fourrage riche en protéines, car je peux le sécher : c’est moins de soja ‘’importé du Brésil‘’. »
Dans les champs, « j’ai diversifié ma rotation de cultures et je produis mon engrais local, donc moins de gaz à effet de serre pour produire de l’engrais chimique.
« Plus autonome, je suis dans l’agroécologie. Des collègues vont plus loin ils sont en conversion vers l’agriculture biologique. »
Les filières compostage et bois énergie s’inscrivent depuis des années dans la triple performance économique, environnementale et sociale bien avant que l’on en parle. Les 42 plateformes de compostage et les 17 sites de production de bois énergie d’ACF s’intègrent complètement dans l’activité agricole des membres du réseau. Avec comme ambition première de renforcer le taux de matière organique et de redonner vie à leurs sols.
Ils ont su développer une gamme de services pour répondre aux besoins d’autres agriculteurs (fournir du compost et d’autres amendements) mais aussi des particuliers, des collectivités et d’autres entreprises en leur livrant du compost et des biocombustibles renouvelables (plaquettes ou granulé de bois, briques…).
Leurs exploitations sont des TPE (très petites entreprises) bien ancrées dans le territoire, créatrices d’emplois (plus de 200 emplois créés au sein des 35 structures) et de richesse pour le territoire, permettant de dégager un chiffre d’affaire de près de 500 000 € pour les plus importantes.
Les composteurs adhèrent tous à une charte de bonnes pratiques et une démarche de qualité afin de garantir et renforcer leur professionnalisme et la qualité de leurs produits et services.
(photo d’archives, biogaz).