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PRODUIRE DU CHANVRE POUR PRODUIRE DU GAZ

Patrice Gandais et Benoit Lair.

Dans la Sarthe, la société Qairos Energies va transformer le chanvre en biogaz. 130 à 150 agriculteurs vont contractualiser la production de 1 000 hectares de chanvre pour approvisionner la société.

Fans d’économie circulaire, la production de chanvre vous comblera ! Hormis la transformation en biomatériaux, la plante a dorénavant vocation à être utilisée pour produire du biogaz. Le projet industriel porté par la société Qairos Energies, basée à Trangé (Sarthe), pourrait faire des émules.

Patrice Gandais (54 ans) et Benoit Lair, agriculteurs et producteurs de volailles de Loué à Laigne en Belin (Sarthe) font partie des pionniers de cette aventure industrielle. Passion- nés par la culture du chanvre, ils ont répondu à l’appel à candidature lancé par la société Qairos Energies fondée en 2017 par Jean Foyer.

Avec huit autres agriculteurs, ils ont contractualisé une partie de leur pro- duction de chanvre (54 hectares – ha) pour permettre à la société de peaufiner ses procédés de gazéification. Mais l’an prochain, la production de gaz sera lancée à l’échelle industrielle.

Dans la Sarthe, la culture du chanvre fait partie intégrante, depuis quatre siècles, de l’histoire de la région comme en attestent les vieux fours à chanvre Ils étaient utilisés pour sécher les tiges afin de séparer les fibres de l’écorce.

Dès son installation en 2000, Patrice s’est inscrit dans cette tradition. L’en- semble de sa production chanvre est contractualisée. En plus des deux hectares de chanvre dédiés à Qairos, l’agriculteur a en cultivé, l’an passé, huit autres la société Cavac, productrice de matériaux isolants. Actuellement, la tonne de chanvre est vendue 135 €.

A ce jour, Patrice et son associé ne savent pas encore comment la société Qairos envisage de fixer le prix de vente de la tonne de chanvre. Mais selon eux, le prix proposé devra être attractif car la hausse des cours des céréales pourrait renoncer les céréa- liers à maintenir la culture de chanvre dans leur assolement.

« Sans l’achat de crédits carbone et l’ins- tauration d’une taxe carbone, l’essor de la filière chanvre sera pénalisé par l’indus- trie plasturgique polluante et émettrice de gaz à effet de serre », affirme Patrice. Son impact environnemental est sous-estimé.

Le chanvre nettoie les parcelles

Dans les exploitations, la culture de chanvre est une très bonne tête d’asso- lement. Les plantes croissent jusqu’en septembre et atteignent aisément 3-4 mètres de hauteur.

Grâce à leur couvert végétal haut et dense, elles « nettoient » les parcelles en empêchant les adventices de se développer. Et dotées d’un système racinaire pivotant, elles ameublissent le sol. De plus, les racines cherchent en profondeur l’azote nécessaire dans le sol pour se développer.

La culture de chanvre est éligible aux aides Pac et elle rend plus aisée la certification haute valeur environne- mentale (HVE). Comme la culture du chanvre ne nécessite aucun traitement phytosanitaire, elle diminue l’indice fréquence de traitement (IFT) moyen de l’exploitation.

Par ailleurs, cultiver du chanvre ne requiert pas de matériels et d’outils spécifiques. Patrice Gandais laboure ses parcelles réservées à cette produc- tion pour enfouir le fumier de volailles qu’il a préalablement épandu (10t/ha). Mais le labour n’est pas une obligation.

Durant le cycle végétatif des plantes, l’agriculteur épand aussi 80 unités d’azote.

Mais une fois la parcelle semée, les céréaliers n’ont plus besoin d’interve- nir sur la culture. A la fin de chaque mois d’août septembre, le fauchage est confié à une Cuma.

Avec un rendement compris entre 8 tonnes et 11 tonnes de matière sèche par hectare, le chiffre d’affaires d’une culture de chanvre oscille entre 1080 € et 1485 € par hectare (135 €/t). L’an passé, Patrice et Benoit ont dégagé une marge brute 870 €.

Les deux postes de charges onéreux sont le prix des semences et le coût de la récolte. A 4,20 € le kilogramme de graines de chanvre, semer un hectare revient à 230 € environ. Et à 200 € l’heure de fauche, la récolte des tiges coûte entre 130 € et 200 € (1 à 1,5 heure par hectare).

Si l’utilisation du cannabis médical se développait, la récolte de la fleur de chanvre rendrait la culture de cette plante particulièrement rentable. Le CBD cannabidiol, composé non psy- cho-actif présent dans la plante de cannabis, apporte un effet calmant au système nerveux.

Qairos Energies: Faire vivre l’économie circulaire dans les campagnes

La première unité de production de la société Qairos Energies, basée à Trangé (Sarthes), sera en mesure de produire par gazéification du chanvre, l’énergie consommée par 3 500 foyers. Et si le succès est au rendez-vous, le modèle sera amené à être dupliqué sur d’autres territoires.

Mais pour son bon fonctionnement, Qairos Energies doit sécuriser son approvisionnement en chanvre. Aussi, son fondateur, Jean Foyer, s’est lancé dans une vaste campagne de recrute- ment d’agriculteurs-partenaires avec lesquels il a l’intention de conclure des contrats pluriannuels pour une partie de leur production. Il vise 500 ha en 2022 puis 1 000 ha en 2023.

Toutefois, Jean Foyer tient à ce que ses futurs partenaires soient situés dans un rayon de 35 kilomètres autour du siège de sa société. La transformation du chanvre en gaz doit  participer  à  l’essor  de  l’écono- mie circulaire du territoire sarthois et favoriser sa transition énergétique. Par exemple, l’hydrogène produit sera, destiné à la mobilité de demain.

Aucune grille tarifaire n’a encore été établie mais le prix de la tonne de chanvre ne sera ni corrélé aux cours des céréales, ni à celui des hydrocar- bures fossiles.

« Quoi qu’il en soit, l’intérêt de la culture de chanvre ne se réduit pas seulement à une question de prix, défend Kevin Collet, directeur général. Il faut aussi prendre en compte l’intérêt agronomique de la culture. La plante est une très bonne tête de rotation et un excellent précédent à blé ».

La société travaille également avec le Pays du Mans pour obtenir un label bas carbone afin de valoriser le carbone stocké par la culture de chanvre.

Le biogaz produit sera directement injecté dans le réseau GRDF et payé à un prix préférentiel sur le modèle de ce qui se pratique avec la métha- nisation. Le CO2 obtenu sera capté, puis liquéfié avant d’être notamment utilisé par les industries agroalimen- taires. Il sera entre autres employé pour fabriquer de l’eau gazeuse. Mais c’est en commercialisant jusqu’à deux tonnes d’Hydrogène par jour que Qairos Energies atteindra son rythme de croisière.

Jean Foyer

Texte: Frédéric Hénin

 

1 Commentaire(s)

  1. produire plus de matières organiques c’est stocker plus d’énergie et rétablir le cycle de l’eau l’été !
    La saison idéale pour la photosynthèse c’est l’été, Si le climat se résumait à l’effet de serre les températures au-dessus des mers seraient caniculaires puisque la vapeur d’eau est de loin le plus puissant gaz à effet de serre (60%) , pourtant on mesure exactement l’inverse !

    Le climat c’est d’abord l’effet parasol des gaz et de l’eau (nuages) qui bloque 50% de l’énergie qui vient du soleil, ensuite la chaleur latente de l’eau qui évacue 60% de l’énergie qui arrive jusqu’au sol et vient en tout dernier l’effet de serre qui empêche le refroidissement nocturne. Les canicules ne se produisent que sur les zones sèches par manque d’effet parasol et manque d’évaporation, l’absence d’eau a un effet pervers : plus il fait chaud plus il fait sec et plus les sols reçoivent d’énergie ! Et inversement, en présence d’eau (ou de végétation) plus il fait chaud plus il y a d’évaporation donc de vapeur d’eau qui diminue la puissance du rayonnement solaire :

    Les inondations et les sécheresses ne sont pas les conséquences du dérèglement climatique mais bien les causes, c’est en retenant l’eau en amont des bassins versants qu’il n’y aura plus d’inondation et donc mathématiquement plus de sécheresse et plus de canicule !

    On aura sauvé la planète quand les continents seront des océans de verdures en plein été !

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