La nouvelle est tombée ce jeudi 25 août au soir, officialisée sur son compte Facebook : la ferme de Louis Ganay est en liquidation judiciaire, elle aura cessé d’exister dans moins de deux mois.

L’émotion est forte pour toutes celles et tous ceux qui connaissent Louis Ganay. Ayant été le premier journaliste à l’interviewer (c’était dans cet article), avant qu’il ne livre son témoignage dans plusieurs émissions télévisées, y compris à forte audience, ou radiophoniques, je me sens bien placé pour ressentir avec lui tous les démons qui l’assaillent aujourd’hui.
Louis Ganay est éleveur bovin. Laitier à l’origine, il souhaitait passer en viande, en reconversion bio. C’est la perspective de cette reconversion, allant dans le sens de ce qu’il aime dans le métier, qui l’a quelque part sauvé d’une forte envie de se suicider, c’était il y a presque deux ans…
Seul…
Aujourd’hui, il est rattrapé par les dettes, en n’étant franchement pas aidé non plus par les cours laitiers. On ne lui propose même plus de redressement judiciaire, c’est directement la liquidation. Le tribunal devrait suivre cet avis, et derrière, dans les deux mois, tous ses biens seront saisis, professionnels, mais aussi la maison qui va avec. On ajoute à cela un divorce, et on comprend toute la détresse de notre homme, certes plus fort mentalement face à l’adversité qu’il y a deux ans, mais qui est aujourd’hui accablé par une suite d’événements douloureux.
C’est donc tout seul que Louis Ganay va voir les huissiers venir et saisir ses biens. Seul qu’il va verra partir, une dernière fois, son troupeau. Seul qu’il ressassera : « Et si j’avais fait ci, ou ça, est-ce que je m’en serais mieux sorti ?«
Homme de caractère et de conviction, il a désormais l’ambition de rebondir, dans une vie différente. Je le sais capable d’y parvenir. Mais je sais aussi que, là, maintenant, tout de suite, seul dans son exploitation à traire encore des vaches « pour rien » jusqu’à ce qu’on vienne les lui retirer, il doit morfler, et salement.
Une réforme qui ne porte pas son nom
L’agriculture (au sens large, incluant élevage et tout le reste) d’aujourd’hui livre malheureusement de plus en plus ce genre de destinées. Nous vivons une forme de réforme qui n’a jamais été votée ou décrétée officiellement, qui voit nombre de fermiers cesser leur activité, contre leur gré, malgré leur travail, leur implication, leur amour de la terre, de leurs cultures ou de leurs bêtes. Louis Ganay paye-t-il des erreurs de gestion ? Franchement, je n’en sais rien, je ne suis pas dans ses comptes, mais quelque part, peu importe ! Quel est donc ce métier où l’on signe de son arrêt de mort la moindre erreur, ou le moindre aléa, intervenus sur son exploitation ? En existe-t-il d’autres aujourd’hui, en France, que celui d’agriculteur ?
La situation de Louis Ganay, vous êtes nombreux à la connaître, à la ressentir. Sa solitude, même quand vous êtes mariés, vous la comprenez, car ce sentiment vous assaille quand vous ne parvenez plus à partager votre détresse.
Nous sommes tous des Louis Ganay
Alors je vous propose quelque chose. On ne pourra pas forcément aller tous physiquement dans sa ferme, dans le Morbihan, le jour où on lui enlèvera ses vaches pour l’accompagner dans ses larmes, mais nous pouvons lui adresser un message, de ceux qui font chaud au coeur, particulièrement quand on l’a gros, ce coeur. Prenons tous une pancarte, un carton, n’importe quoi, peu importe, et on diffuse la photo avec un message du style « avec toi Louis » ou « t’es pas tout seul Louis », vous trouverez les mots tout autant que moi. Vous nous envoyez ces photos par messagerie Facebook sur notre page Facebook WikiAgri, et nous en ferons un album, spécialement dédicacé à Louis Ganay.
Parce que nous sommes tous des Louis Ganay !
Cette photo de Louis Ganay a été prise le 11 octobre 2015, lors d’une journée organisée pour rendre hommage aux familles d’agriculteurs suicidés.