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Maïs fourrage, une qualité préservée mais des rendements très hétérogènes

Compte-tenu du scénario climatique agité de la campagne, la production française 2016 de maïs fourrage peut être considérée comme « convenable ». Mais elle présente de grandes disparités régionales aussi bien en volume qu’en qualité.

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Implantations laborieuses dans la fraîcheur, excès d’eau au printemps (en particulier dans le centre et l’est de la France), déficits hydriques pendant l’été, puis pic de chaleur en fin d’été… voilà les séquences climatiques qui ont jalonné la campagne de maïs en 2016.

Au final, le rendement moyen, à 12 t MS/ha, se situe à 5 % en deçà de la moyenne quinquennale nationale. Mais ce chiffre masque de très fortes hétérogénéités (figure 1). Si les rendements sont proches de la moyenne quinquennale dans le quart Nord-Ouest et le Sud-Ouest, ils sont plus ou moins amputés sur une bande Centre-Ouest / Centre-Est.

Figure 1 : estimation des rendements moyens régionaux de maïs fourrage produits en 2016, comparés à la moyenne régionale quinquennale

Ces conditions météorologiques très atypiques ont exacerbé les différences que l’on peut attendre sur la qualité des ensilages de maïs ayant été semés à différentes dates, dans des sols plus ou moins superficiels et séchants, avec ou sans irrigation.

Quatre grandes zones ont pu être identifiées en France cette année, aux conditions climatiques à peu près homogènes :
• « Nord-Ouest », regroupant la Bretagne et la Normandie et les Hauts-de-France.
• « Est », regroupant le Grand Est, la Bourgogne / Franche-Comté, les régions Auvergne / Rhône-Alpes, PACA et l’Occitanie.
• « Stressés++ », regroupant les départements suivants : Allier, Charentes, Cher, Corrèze, Creuse, Dordogne, Indre, Puy de dôme, et Haute-Vienne.
• « SEC », regroupant la Nouvelle Aquitaine, le Centre – Val de Loire, les Pays de la Loire, exceptés les 8 départements cités ci-dessus dans la zone « Stressé++ ».

Des stades de récolte souvent dépassés

Les teneurs en matière sèche moyennes à la récolte ont été largement dépassées partout, moins sur la frange côtière « Nord-Ouest » où la médiane se situe à 33,7 % MS, contre 35,2 % MS pour les trois autres zones. Dans ces dernières, 25 % des chantiers ont été réalisés à plus de 38,5 % MS.

Les teneurs en amidon sont aussi très différentes d’une région à l’autre, avec une très grande variabilité au sein même de chaque zone (tableau 1). La valeur moyenne est de 30,2 % avec une variabilité à l’échelle France de 13,6 points ! Les zones du centre de la France ont particulièrement touchées avec une médiane à 28,5 % pour la zone « SEC » et 25,9 % pour la zone « Stressé++ ». Dans ces situations, les ensilages ont des teneurs en NDF plus élevées de 2 points par rapport aux autres zones.

Une qualité des fibres préservée en situations de stress hydrique

La digestibilité du NDF reste cependant très élevée pour les maïs récoltés avec peu d’amidon. Ceux-ci présentent des valeurs de dNDF supérieures de 2 points, sans doute en lien avec des dates de récolte plus précoces que prévues (liées à la dessiccation très rapide sur pied) ce qui a préservé les plantes de la sénescence accélérée de fin de cycle. La digestibilité des tiges et feuilles (dMOna) permet de montrer encore mieux le caractère atypique des maïs récoltés secs, sans amidon mais avec beaucoup d’éléments nutritifs solubles (glucides, MAT notamment) qui produiront des UF. La dMOna des maïs des zones « SEC » et « Stressé++ » est en effet de 59 et 61 %, contre 57,5 % pour les maïs des zones « Nord-Ouest » et « Est ».

Des valeurs alimentaires homogènes mais une énergie d’origines différentes

Les teneurs en UFL des maïs fourrage à l’échelle nationale sont en retrait de 0,02 UFL/kg MS par rapport à l’année dernière. En 2016, la teneur moyenne en UFL s’élève à 0,91 UFL/kg MS, avec très peu de différences entre zones.

L’origine de cette énergie est en revanche très différente, une fois de plus il est impératif de ne pas s’arrêter à la valeur UF seule d’un maïs pour caler la ration des animaux ! En effet les maïs de la zone « Nord-Ouest » à 0,91 UFL en moyenne présentent une teneur moyenne à 270 g/kg MS d’amidon dégradable dans le rumen, ce qui est nettement supérieur (+ 20 % en moyenne) à celles relevées pour les maïs des zones « SEC » ou « Stressé++ » avec respectivement 230 et 210 g/kg MS.

Quant à la valeur azotée des maïs 2016, elle est de 44 g PDIN/kg MS et 69 g PDIE/kg MS.

Tableau 1 : valeur moyennes de composition chimique et valeurs alimentaires des maïs fourrage fermentés (= à l’ouverture du silo) 2016

*sur vert à la récolte
**Plus l’écart-type est élevé, plus la variabilité des résultats est importante. 95 % des résultats se situent entre la moyenne ± 2 fois l’écart-type.
Données traitées par Arvalis – Institut du végétal à partir des contributions : MiXscience avec Sanders, Laboratoire Cesar, Germ-Services, Elevage Conseil Loire Anjou, Groupe Oxygen, Ocelia, Néalia, DFP Nutraliance, Bretagne Conseil Elevage Ouest, Clasel, Eilyps, Optival, Union laitière de la Meuse, Chambre d’agriculture régionale Centre, Chambre d’agriculture de l’Oise.

Quelques précautions pour l’exploitation des silos

Les ensilages souvent trop secs devront faire l’objet de toutes les attentions à l’ouverture et pendant l’exploitation des silos pour les valoriser au mieux.

Compte-tenu des fortes teneurs en glucides solubles à la récolte, levures et moisissures peuvent se développer si le front d’attaque n’avance pas assez vite et/ou si les températures sont élevées.

Dans le cas de maïs avec peu d’amidon, le tassement a souvent été moins efficace que les années précédentes. On peut craindre une moindre densité et donc davantage d’air dans la masse du fourrage. La stabilité à l’ouverture sera moins bonne que d’habitude. Dans ces situations, il convient de bien évaluer les tonnes de MS en silo et d’acheter rapidement des fourrages ou coproduits (pulpe par exemple) pour ne pas se retrouver sans pouvoir joindre la récolte prochaine.

Concernant les rations avec les maïs « nord-ouest », elles sont proches des rations classiques en retirant un peu de correcteur azoté (suivant l’analyse du maïs fourrage) et avec ajout d’un peu de céréales car ces maïs sont souvent moins riches en amidon que d’habitude.

Les maïs secs doivent être complémentés en céréales, en diminuant nettement le correcteur azoté. Ces maïs sont riches en PDIN (car fortes teneurs en MAT) et seront bien complémentaires des céréales (riches en PDIE) pour des rations sécurisées.

 

Bertrand Carpentier, Alexis Ferard (Arvalis – Institut du végétal)

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