WikiAgri et AgriFind proposent une série de portraits d’agriculteurs, qui partagent leurs expériences et leurs résultats technico-économiques. Découvrez pour ce troisième numéro l’interview de Pierre Dabit membre de WikiAgri.
Sols argilo-calcaire superficiel (plateau à 350 m d’altitude)
Faible potentiel de rendement
Campagne 2017-18, 6 cultures en place : blé (un mélange de 10 variétés semées tous les ans), colza, orge de printemps, lin, pois de printemps, trèfle incarna
Cultures pouvant entrer dans l’assolement : fétuque, vesce, féverole
+ une ETA avec 2 salariés
Thématique de l’interview : se réapproprier son métier d’agriculteur
Bonjour Pierre, quels sont les choix que tu as fait en tant qu’entrepreneur ?
« Effectivement, je suis un chef d’entreprise, et je suis libre de prendre les décisions qui me semblent les meilleures pour moi et mon entreprise. Etant donné le faible potentiel de mes terres, il y a 7 – 8 ans maintenant, si je ne faisais rien, j’étais cuit ! Aujourd’hui, on se doit d’avoir une vision globale de son exploitation ; la crise agricole, la prise de conscience environnementale, celle du monde agricole et les attentes des consommateurs-, les problèmes de main d’œuvre, les difficultés de transmission font que l’on doit s’adapter et trouver des solutions. Je tiens à vivre de mon métier et à l’exercer comme je l’entends. »
Quelles décisions as-tu prises ?
« J’avais déjà commencé à semer des couverts dans des parcelles loin des routes – pour éviter les regards des voisins – dès mon installation, et je me suis appuyé sur cette première expérience pour commencer m’en sortir économiquement avec une idée en tête : « Comment réaliser rapidement des économies sur les charges opérationnelles sans tout bouleverser ? » Avec l’implantation d’un couvert végétal sur mes terres superficiel argilo-calcaire, j’ai réussi progressivement à baisser ce qui était mon poste de charge le plus important : les engrais. En plus de fixer de l’azote, du phosphore, de la potasse et des minéraux les couverts permettent de garder l’humidité et favorisent en même temps la structure du sol donc évitent l’érosion : je suis gagnant sur tous les plans. Sur les argiles froids en l’espace de 2 ans, j’ai constaté une nette amélioration, si bien qu’aujourd’hui même avec un hiver très pluvieux, le sol reste en place et je peux renter sur mes parcelles sans que la terre ne colle à mes bottes… »
Quelles sont les étapes que tu as ensuite suivies au cours de ces dernières années ?
« Plus on observe, plus on apprend, plus l’on teste, plus on a envie d’observer, d’apprendre et de tester donc après l’économie d’engrais, j’ai voulu baisser les charges de mécanisation et faire des économies sur les désherbants, puis les insecticides et maintenant je vise à limiter au maximum les fongicides. »
Comment t’y prends-tu ?
« Le point d’entrée ce sont les couverts végétaux, grâce à eux la lumière ne va pas jusqu’au sol ce qui empêche bien des adventices de lever, c’est une économie de désherbage. Après des essais, avec des collègues, nous avons investi dans un semoir à disque en semi-direct : il ne remue pas la terre donc ne favorise pas la germination (moins de désherbage à la clé) et nous avons opté pour l’application de l’engrais sur le rang, encore des économies sur ce poste. En s’intéressant au fonctionnement de la nature et en comprenant les cycles des ravageurs et des auxiliaires des cultures, on s’est aperçu que nos applications d’insecticide nuisaient fortement à l’équilibre naturel. Par exemple, les carabes sont des prédateurs des limaces mais si l’on pulvérise des insecticides au printemps ou à l’automne, on les tue (ils ont 2 cycles par an) donc on est obligé d’intervenir pour lutter contre les limaces.
Comment se passer d’intervention d’insecticides contre les pucerons, charançons et autres mélighètes ?
« Je limite l’impact des insectes sur mes cultures grâce aux plantes compagnes, plantes mellifères qui vont les attirer ; comme la féverole semée dans le colza qui va désorienter le vol des charançons, ou encore la vesce en fleur au moment des semis d’orge d’automne qui va attirer les pucerons. Il est vrai qu’au premier abord « ça fait flipper » mais la nature est bien faite et elle est un allié si on comprend comment elle fonctionne. Comme dit l’un de mes amis « Le décompacteur, c’est entre les oreilles qu’il faut le passer, pas dans le champ ». Et enfin, au lieu de semer entre le 15 septembre et le 1 octobre, on sème dès la fin de la moisson… comme cela le blé ou le colza sont bien développés forts et vigoureux quand les insectes sont susceptibles de les attaquer. Lorsque le blé a 6 feuilles et non 3 feuilles ou que le colza est au stade 7-8 feuilles et non 3 feuilles, je suis beaucoup plus « relaxe » sur leur capacité à se défendre contre une attaque d’insecte… Je suis en train d’apprendre à maîtriser cette technique de semis ultra-précoces. »
As-tu, tout fait tout seul ?
« Bien sûr que non, je me suis formé sur chacun des sujets que j’ai étudié puis mis en place, j’ai beaucoup échanger avec mes collègues agriculteurs et nous avons créée il y a 4 ans un GIEE. En quelques années, j’ai réussi à résoudre un bon nombre de problème. Chaque année, j’explore une ou deux idées et mets en place une expérimentation ; l’an passé j’ai commencé à utiliser des extraits végétaux fermentés de purin d’ortie et de consoude ou encore de luzerne pour éviter le recours aux fongicides et cette année, j’ai semé de l’orge de printemps à l’automne. »
Y a-t-il d’autres postes où tu as réussi à faire des économies ?
« Sur les semences, oui, mis à part le trèfle et la fétuque pour lesquels je suis en contrat, je produis mes propres semences fermières grâce à un trieur en copropriété, de cette façon j’ai des variétés qui sont de mieux en mieux adaptées à mon environnement. »
Pour conclure as-tu un conseil à donner ?
« J’invite chacun à réfléchir par lui-même et à ne surtout pas appliquer des recettes mais bien identifier ses propres motivations et comprendre pourquoi il applique telle ou telle pratique. Surtout ne pas tout bouleverser d’un coup et comprendre avant d’agir. »
Vous voulez aller plus loin avec Pierre et qu’il témoigne de son expérience de terrain, retrouvez-le sur la plateforme Agrifind Connexion.
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