Le test bêche permet d’établir en 20 minutes un diagnostic de la structure du sol en observant les mottes présentes et leur mode d’assemblage.
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Pour bien s’enraciner, se développer et produire, les cultures ont besoin d’une structure de sol favorable, c’est-à-dire non tassée. S’ils sont repérés à temps, les problèmes de tassement peuvent être corrigés par un itinéraire de travail du sol adapté. À l’inverse, sur un sol ayant déjà une structure favorable, le travail du sol est inutile. Il est donc nécessaire d’observer régulièrement l’état structural du sol pour prendre les bonnes décisions.
Dans cette optique, la méthode la plus précise reste le profil cultural (tranchée de plusieurs mètres de profondeur). Toutefois, c’est un outil d’expert, long à réaliser et destructif.
Une méthode rapide et simple à mettre en œuvre consiste à observer la structure sur une bêchée de sol. C’est le principe du « test bêche », mis au point par l’Isara (l’Isara de Lyon est une école formant des ingénieurs en agronomie, alimentation et environnement, ainsi qu’un centre de recherche dans les domaines de l’agro-écologie et les systèmes d’alimentation durables).
Pour réaliser ce test, il faut s’équiper d’une bêche, d’une bâche pour poser la bêchée, d’un couteau et d’un mètre. Le test s’effectue sur un sol correctement ressuyé et en dehors des passages de roues. Il prend environ 20 minutes et se déroule en quatre grandes étapes.
1/ Observer la surface du sol
Il s’agit ici de noter la proportion de sol couverte par des résidus, le taux de cailloux, la présence de turricules (déjections) de vers de terre ou de croûte de battance.
2/ Extraire un échantillon de sol
Pour cela, il convient de creuser une prétranchée d’environ 30 cm de profondeur qui facilitera l’extraction de la bêchée proprement dite. Le bloc de terre prélevé est d’environ 20 cm de côté et 25 cm de profondeur ou plus, selon les possibilités. Il est nécessaire d’agir délicatement pour préserver la structure de l’échantillon.
3/ Observer le bloc sur la bêche
Il s’agit de mesurer le bloc et l’épaisseur des horizons présents, c’est-à-dire des différentes couches de terre qui se distinguent par leur structure ou leur couleur, leur texture, etc.
4/ Observer le bloc sur une bâche
Le bloc de terre est ensuite déposé sur une bâche. Là, il faut noter la tenue du bloc et le nombre de sous-blocs qui se créent, puis trier toutes les mottes de la bêchée en fonction de leur état interne : mottes poreuses, mottes tassées ou mottes tassées mais en cours de régénération par l’activité biologique.
Sur la base de ces observations, la grille d’interprétations (figure 1) permet de situer l’état structural du sol sur une échelle de 5 classes : de 1 (structure du sol ouverte, très poreuse et sans aucun tassement) à 5 (tassement sévère avec très peu de porosité).
Lorsque le tassement est avéré (classes 4 et 5), il est alors recommandé de réaliser un profil cultural pour approfondir le diagnostic, identifier la cause du tassement et déterminer les actions correctives adaptées.
Figure 1 : arbre de décision pour déterminer le niveau de tassement du sol par le test bêche
Exemple (flèches épaissies) : si le sol ne reste pas en un seul morceau sur la bêche mais forme des sous-blocs, et si l’analyse approfondie des mottes montre une prédominance de mottes de type Δb (tassées mais percées de pores dus à des organismes vivants du sol) associées à des mottes de type Δ (tassées) plus abondantes que la terre fine et les mottes de type Γ (grumeleuses et visiblement poreuses), alors votre sol est de classe 2.
A l’instar du profil cultural, le test bêche s’intéresse à deux types de porosité : la « porosité d’assemblage » entre les mottes et la « porosité interne » des mottes. La première renseigne sur la capacité du sol à infiltrer l’eau et à laisser pénétrer les systèmes racinaires en profondeur. Elle s’évalue selon la façon dont le bloc se fissure dès son extraction, puis une fois posé sur la bâche.
La seconde détermine la capacité des racines à explorer l’ensemble du volume de sol pour alimenter la plante en éléments hydriques et minéraux. Ce diagnostic s’opère sur la bâche, en fractionnant à la main les blocs jusqu’à 3-5 cm de diamètre avant de les classer en trois catégories : les mottes poreuses (Γ gamma), les mottes compactes (Δ delta) et les mottes compactes mais présentant des traces d’activité biologique (Δb delta b). Chaque type de motte est associé à un état structural plus ou moins favorable (photos). Ainsi, lorsque les mottes Γ ou la terre fine sont majoritaires par rapport aux autres états, la structure du sol est favorable.
Photo 1
Les mottes gamma (Γ) se reconnaissent par leurs formes arrondies et grumeleuses, avec une porosité importante visible à l’œil nu ; elles contiennent de la terre fine agglomérée. Ce type de motte est le plus favorable à l’exploration par les racines.
Photo 2
Les mottes delta (Δ) contiennent une surface lisse, plane et sans porosité visible à l’œil nu. Ces mottes compactes ne sont pas ou très peu explorées par les racines et sont associées à des tassements sévères.
Photo 3
Les mottes Δb présentent les mêmes caractéristiques que les mottes Δ mais avec quelques macropores d’origine biologique. Bien que compactes, elles présentent un ou plusieurs pores créés par l’activité des organismes du sol – principalement les vers de terre.
Plusieurs raisons peuvent conduire à faire un test bêche :
– En cas d’accident de culture, le test permet de déterminer si celui-ci est lié à un problème de structure du sol. Dans ce cas, le test bêche sera fait dans la zone atteinte et dans une zone non touchée, pour les comparer, et de préférence dès le constat de l’accident, car la structure peut ensuite évoluer.
– A l’interculture, observer l’état de la structure du sol peut s’imposer pour définir un itinéraire de travail du sol : un semis direct est envisageable lorsque la structure du sol est de classe 1, mais ne l’est plus si elle est de classe 3 ou plus, surtout s’il s’agit d’une culture sensible au tassement.
– Une fois le travail du sol réalisé, le test permet de valider l’atteinte de l’objectif de restructuration du sol.
– En expérimentation, c’est un outil utile pour comparer des techniques de travail du sol ou des systèmes de culture. Il définit une méthode commune d’observation pour toutes les modalités et les observations sont traduites sous forme de score.
Cependant, le test bêche présente certaines limites :
– Le diagnostic n’est établi que sur la profondeur de la bêchée, qui se limite généralement à 25 cm. Ce n’est pas suffisant pour déceler un tassement profond. Il faudra alors recourir à d’autres méthodes complémentaires : pénétrométrie, miniprofil 3D ou profil cultural.
– La réalisation et l’interprétation du test bêche sont difficiles dans les sols caillouteux, mais aussi lorsque le sol est trop sec ou très humide.