ferme agricole

Bien gérer son exploitation, la meilleure assurance revenu

Selon deux études de l’Apca, les exploitations agricoles sont bien gérées mais la rentabilité des capitaux immobilisés est très faible. L’autofinancement et le recours aux crédits fournisseurs sont préférés à la souscription de prêts à court et moyen terme.

Gérer c’est prévoir. L’étude des documents comptables de quelque 2 000 exploitations agricoles en productions céréalières et bovins viande, opérée par l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (Apca), révèle comment les agriculteurs et les éleveurs dirigent leur exploitation et la maintiennent à flot depuis une quinzaine d’années malgré la volatilité des prix. Les difficultés actuelles n’oberent pas des tendances de fond.

Le premier enseignement de cette étude est la bonne gestion des entreprises par les agriculteurs sur la période retenue. Les ratios financiers des exploitations étudiées sont bons et leur évolution pluriannuelle traduit la capacité des exploitants agricoles à surmonter les périodes de crise et à profiter des bonnes années, pour rééquillibrer leurs comptes. Sinon, elles auraient disparu, emportées par une des crises qui affectent régulièrement la production.

En fait, la gestion de ces exploitations céréalières et productrices de viande repose avant tout sur une bonne maitrise de leur fonds de roulement. C’est la meilleure assurance revenu des agriculteurs pour faire face aux aléas conjoncturels. Et il semble qu’ils l’aient bien compris. Même si, ce qui complique l’exercice, la concentration des recettes de leurs activités se réalise sur une courte période de l’année alors que les charges sont étalées tout au long des campagnes.

En 2010 et 2012, par exemple, les céréaliers ont accru de plus de 75 % leurs besoins en fonds de roulements, ce dernier représentant alors plus de 3 fois le montant des dettes à court termes. Aussi, ils ont eu, pour 2013, largement les moyens nécessaires pour financer l’implantation de leurs cultures alors que les prix n’étaient plus au rendez-vous.

En cas de crise, moins d’investissements

Ceci dit, la succession de plusieurs années de crise pèse inévitablement sur les équilibres financiers des exploitations. En production bovine, elle s’est traduite par une dégradation régulière de l’ensemble des ratios financiers des entreprises et en particulier, de leurs besoins en fonds de roulement. En 15 ans, ils ont diminué de 35 %. Toutefois, ces éleveurs parviennent à les maintenir à un niveau tout à fait satisfaisant (environ 80 % de la production annuelle de l’élevage) mais au prix de prélèvements faibles et d’investissements réduits au strict minimum.  

Autre information importante de l’analyse des documents comptables des 2 000 exploitations étudiées par l’Apca : le moindre recours à l’endettement bancaire pour investir, pour augmenter la taille de leur exploitation et pour financer leurs campagnes. Les agriculteurs comptent d’abord sur leurs capitaux propres pour acheter leurs nouveaux matériels et sur leurs fournisseurs, pour diversifier leurs sources de trésorerie. Ces phénomènes sont particulièrement notables en production céréalière.

Mais le recours à l’autofinancement accentue naturellement la cyclicité des achats en matériels agricoles puisque les producteurs de céréales renouvellent davantage leurs machines lorsque leurs revenus sont bons. Et à défaut de recourir à des prêts de trésorerie, l’endettement à court terme a augmenté de plus 70 % auprès des vendeurs d’engrais et des semences. Autrement dit, les agriculteurs font davantage porter le risque financier de leurs activités à leurs fournisseurs, dont ils sont les clients, qu’à leurs banques.

Au final, le taux d’endettement des céréaliers oscille autour de 40 % en fonction de la conjoncture des marchés contre 35 % environ pour les producteurs de bovins alors que le montant du capital immobilisé de leur exploitation est bien plus élevé.

Mais leur taux d’endettement témoigne les difficultés récurrentes de leur filière. Avec des revenus parmi les plus faibles de la profession agricole, les capacités de souscription et de remboursement de prêts des éleveurs sont forcément limitées. Aussi, l’augmentation de la taille de leur exploitation est d’abord financée par des capitaux propres (achat de foncier en particulier au sud de la Loire).

Il n’y a pas de miracle !

Une bonne maitrise des outils de gestion économique et financière des exploitations ne permet pas de s’affranchir de la réalité de la conjoncture agricole !

La rentabilité financière des capitaux immobilisés est très faible. Autrement dit, les agriculteurs et les éleveurs travaillent, investissent et immobilisent des capitaux dans leur exploitation pour vivre de leur métier mais pas pour dégager des revenus financiers.

Et le taux de rendement du capital immobilisé est d’autant moins élevé que son montant est élevé par rapport au niveau du résultat courant.

En production bovine, la rémunération du capital tend à baisser depuis 15 ans. Elle n’excède par 1,1 % en moyenne et en 2012 (derniers chiffres connus) contre environ 4 % au début des années 2000.

Tous otex (orientations technico-économiques) confondus, le rendement moyen est de 6 % les bonnes années (lorsque les prix des céréales et du vin sont élevés) mais il était négatif en 2009.

Rappel

Le fonds de roulement = ressources stables (capitaux propres et emprunts à longs termes) – immobilisations (bâtiments, foncier, et animaux entre autres). Plus le fonds de roulement est élevé, plus la situation financière est saine.

Besoin en fonds de roulement = Stocks marchandises  – dettes à court terme.

 

Notre illustration ci-dessous est issue du site Fotolia. Lien direct : https://fr.fotolia.com/id/81667684. Auteur : Marie-Thérèse Guihal.

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