Petit mollusque au grand appétit, la limace est la bête noire des semis, surtout de colza. Différents OAD compléteront vos observations pour protéger efficacement vos cultures.
Les attaques de limaces peuvent causer d’importants dégâts sur les cultures. Elles interviennent à des stades précoces et peuvent pénaliser fortement le potentiel de rendement. « La limace est l’un des seuls ravageurs à pouvoir faire 100% de dégâts, alerte Pierre Olçomendy. Les attaques sont très variables selon les années. Il faut donc toujours rester vigilant ». Cela doit être le cas pour les semis de colza, pour lesquels, portées par des cours intéressants, les intentions sont importantes. Le colza est particulièrement sensible, car il a peu de possibilités de compenser. Sur céréales, des attaques sont possibles sur les graines comme sur les plantes, jusqu’au stade 4 feuilles. Mais en tallant, les céréales ont une certaine capacité à compenser une attaque légère. Les deux espèces de limaces particulièrement nuisibles, les grises et les noires, sont actives – donc mangent – dès 5°C. Elles recherchent la fraicheur et l’humidité, ce qui explique qu’elles sont surtout actives la nuit. Les limaces se déplacent d’environ 5 mètres par nuit, mais ont bon appétit : elles consomment l’équivalent de 50% de leur poids en 24 heures. Ce qui explique qu’il suffit d’une limace au mètre carré pour mettre à mal un semis.
Identifier les situations à risque
Même si les conditions climatiques restent le premier facteur influençant la dynamique des populations de limaces, certaines situations sont favorables à leur développement : levée lente et irrégulière, temps humide autour du semis, sol motteux, semis direct et présence de résidus végétaux. Pour réduire les creux dans lesquels se réfugient les limaces en journée, il peut être utile de rouler les semis. À l’automne, les semis tardifs sont plus exposés.
En cas de populations importantes, il faut profiter de l’interculture pour les réguler. En affinant la structure du sol, en asséchant la surface et un détruisant les repousses, le déchaumage réduit à la fois le gite et le couvert des limaces.
Pour estimer au mieux la densité de limaces à affronter, deux à trois semaines avant le semis, des piégeages nocturnes, avec un relevé avant le lever du jour, seront un bon révélateur de la population active.
Les OAD, une aide précieuse
Pour évaluer le risque limaces, il y a beaucoup de paramètres à intégrer : le nombre de limaces observé par piégeage, mais aussi la météo, le type de sol, l’historique de la parcelle… L’intelligence artificielle est une aide précieuse pour synthétiser ces risques et décider de la nécessité, ou non, d’une intervention au semis. Différents Outils d’Aide à la Décision existent :
– Limacapt, de De Sangosse, automatise le piégeage. Sur des placettes d’un m², des images sont prises de nuit à l’aide de caméra infrarouge. Un algorithme identifie chaque limace pour ne la comptabiliser qu’une fois et établir le nombre d’individus présents. Ce nombre sera communiqué chaque matin directement sur votre smartphone. Non seulement c’est un gain de temps, mais c’est aussi une preuve de la nécessité d’intervention. « Le capteur est en cours de tests chez des agriculteurs et des distributeurs », partage Pierre Olçomendy. De Sangosse mobilise aussi un réseau de 700 agriculteurs qui partagent, chaque semaine, leurs résultats de piégeage sur le site ciblage-antilimaces.fr et via une application gratuite. Cela donne des indications sur les risques dans sa zone géographique.
Limacapt automatise le dénombrement de limaces.
– Lim-Alert d’Adama est une application qui analyse les risques à la parcelle en combinant le type de sol et les conditions météo. « L’application prévient sur le risque d’activité des limaces, explique Guillaume Barbe, chef de marché chez Adama. Au regard de la grille d’évaluation des risques, on peut alors cibler ses piégeages sur les parcelles les plus à risque. Le niveau de risque permet d’adapter sa stratégie. En cas de risque faible à moyen, on peut protéger ses semis avec un phosphate ferrique comme Ultimus. En cas de risque plus élevé, pour une action rapide, on peut combiner l’Ultimus et le métaldéhyde ou choisir uniquement le métaldéhyde ».
Lim-Alert vous permet d’identifier rapidement le niveau de risque pour la semaine à venir.
– Certis prépare pour l’année à venir Limaxxion, une appli pour déterminer le risque à la parcelle sur la semaine à venir. « En fonction des caractéristiques de la parcelle (historique, type de sol, précédent et date de semis) et des conditions météo, l’OAD évalue le risque, explique Cédra Graeff, chef de marché grandes cultures chez Certis. Même si c’est plus précis quand c’est couplé avec l’observation d’un piégeage, l’OAD fonctionnera aussi sans piégeage. C’est une aide pour organiser son travail, savoir quelles parcelles sont le plus à risque, et ainsi planifier ses interventions ». Pour faciliter la lecture des résultats, chaque parcelle est identifiée avec la pastille de couleur selon son niveau de risques : faible, moyen ou fort.
L’application Limaxxion
Protéger efficacement
Quand le risque est avéré, la lutte chimique permet de neutraliser les limaces avant le semis. Deux matières actives sont disponibles : le métaldéhyde et le phosphate ferrique, qui est un produit de biocontrôle autorisé en agriculture biologique. « À ses débuts, le phosphate ferrique a été décrié par crainte d’une efficacité moindre par rapport au métaldéhyde. Cependant, les nombreux résultats d’essais montrent une efficacité équivalente. Au bout de quelques jours, la mortalité des limaces est identique, le phosphate de fer permet de bien protéger les cultures », rassure Cédra Graeff. Les molécules n’ont pas les mêmes modes d’action. « Le phosphate ferrique bloque l’alimentation des limaces, explique Guillaume Barbe. On ne voit pas forcément de limaces mortes comme avec le métaldéhyde, ça prend un peu plus de temps, mais les dégâts sont stoppés car les limaces ne mangent plus ». Certaines formulations de phosphate ferrique permettent la même rapidité d’action. Les essais d’Arvalis montrent une protection similaire. Il n’y a pas de différence de prix entre ces deux matières actives, qui ont les mêmes modalités d’application. Le phosphate ferrique est un produit de biocontrôle qui n’entre pas en compte dans le calcul de l’IFT. Il représente 25% du marché. La nouvelle réglementation sur le métaldéhyde (voir encadré) et l’octroi des CEPP qu’il permet devraient accélérer le développement du phosphate ferrique et des produits combinant les deux molécules.
En colza, il est possible de distribuer l’anti-limaces en même temps que la semence. « C’est une stratégie à envisager en conditions difficiles, par exemple en semis direct, pour mettre l’anti-limaces au plus près de la graine afin de maximiser sa protection », suggère Pierre Olçomendy.
Le métaldéhyde désormais soumis à la Redevance Pollution Diffuse
Le métaldéhyde a été classé CMR2 (produit cancérigène, mutagène et toxique pour la reproduction). La première conséquence est financière. Depuis le 1er octobre 2021, les produits molluscides dont la concentration en métaldéhyde est supérieure ou égale à 3% sont donc soumis à la Redevance pour Pollution Diffuse. Cela devrait représenter un surcoût de 2 à 3 €/ha. Une autre conséquence est logistique. Il faudra obligatoirement stocker ces produits dans une zone dédiée et identifiée du local phytosanitaire, qui sera, bien sûr, fermé à clé. Ce qui peut vite devenir contraignant étant donné les volumes à stocker. Le délai d’entrée des personnes dans les parcelles traitées passera de 6 à 48 heures. Leur manipulation devra se faire avec le port d’EPI adaptés et est interdite aux femmes enceintes et aux mineurs. Enfin, les exploitations qui utilisent ces produits devront l’indiquer dans leur Document unique d’évaluation des risques. Pour rappel, le respect des exigences de stockage des produits phytosanitaires est l’un des points vérifiés lors des contrôles PAC.
Lors de l’application, il faut veiller à ce que les granulés soient bien répartis sur toute la parcelle, qu’ils soient intacts au sol, tout en protégeant les cours d’eau.
Auteur :Cécile Julien
Par Rédaction Wikiagri
Equipe de rédacteurs Wikiagri
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