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Un céréalier d’Epinay-sur-Orge malgré lui au centre de querelles municipales

Parce qu’il conteste une décision de sa municipalité d’installer une zone d’activité qui scinderait ses champs en trois, un céréalier de l’Essonne voit son cas faire l’objet de slogans et même d’une pétition lancés par l’opposition. Balloté entre la défense de ses intérêts et le désaveu d’une récupération politicienne qu’il n’a pas demandée, l’agriculteur ne sait plus quoi faire, d’où l’intervention de son syndicat.

L’histoire de Gérard Praudel n’est pas banale. Jusqu’en 1976, la ferme, à l’époque de ses parents, faisait de la vente directe en plein centre ville d’Epinay-sur-Orge, commune de l’Essonne. Avec l’urbanisation galopante, il est apparu plus sage de déménager le corps de ferme pour aller dans la campagne. Gérard Praudel cultive aujourd’hui 230 hectares de céréales, majoritairement en location… Il a même 141 indivisions, soit plus de 800 propriétaires de terrains ! De fait, lorsque la municipalité empiète tout doucement, de projet de développement en projet de développement, sur les terres agricoles, ce n’est pas simple pour lui, il doit alerter à chaque fois plusieurs petits propriétaires, lesquels ont souvent tendance à laisser filer. Mais venons-en aux faits.

Episode 1. Récemment, la municipalité d’Epinay-sur-Seine (dont le maire, Guy Malherbe, est le suppléant de Nathalie Kosciusko-Morizet à l’Assemblée nationale) a fait évoluer un projet d’installation de zone d’activité. De telles façons qu’il se situe au coeur de l’exploitation de Gérard Praudel, allant jusqu’à la diviser en trois. L’agriculteur a donc exprimé de la résistance au projet, sa faisant au passage mal voir d’une municipalité « pour laquelle j’ai pourtant rendu bien des services bénévolement« , dit-il.

« Je suis agriculteur, pas diplomate »

Episode 2. En 1992, un gros orage s’était abattu sur la commune, avec des problèmes d’écoulement à la clef. Depuis, Gérard Praudel a fait ce qu’il fallait, prenant moult précautions pour que « l’impact de ces écoulements soit diminué le plus possible« . Or, après les intempéries récentes et de nouveaux problèmes d’inondations, la municipalité a incriminé l’agriculteur. « A un point tel que je suis désigné comme LE responsable du fait qu’il soit tombé de la pluie. Des personnes m’apostrophent pour me demander le nom de mon assurance pour se faire rembourser par elle, je reçois des coups de fil… Mais moi, je ne veux pas me faire agresser alors que j’ai fait des efforts sur mon exploitation. » (efforts que l’on retrouve listés dans l’épisode 4, phrases mises en gras)

Episode 3. L’opposition municipale (PS donc) « qui n’existait pas vraiment avant cela« , selon Gérard Praudel, s’empare du dossier de la zone d’activité, dénonce les choix municipaux, et lance une pétition sur le net pour la refuser. Dans l’argumentaire de celle-ci, la défense du foncier agricole figure en bonne place. « Mais moi je n’ai rien demandé, explique Gérard Praudel. Je ne fais pas de politique, je ne suis pas proche de l’opposition. J’ai seulement exprimé la défense de mon foncier agricole, en mon nom. » Si, prudent, il ne prononce pas les mots de « récupération politicienne », il ne les nie pas non plus quand je les lui suggère dans l’entretien téléphonique. « Je suis agriculteur, pas diplomate« , soupire-t-il.

Episode 4. D’où l’intervention syndicale. Pris dans un imbroglio politico-politique qu’il n’a pas demandé, Gérard Praudel cherche à repositionner le débat sur le sujet de l’emprise urbaine sur les terres agricoles. Il trouve ainsi un soutien avec la FDSEA Ile de France qui publie un communiqué dont voici les grandes lignes : « A trois reprises, de violents orages ont frappé les communes de Marcoussis, d’Epinay-sur-Orge, de Linas, et de Leuville, situées entre deux collines. Les rues ont alors été envahies par des coulées de boues. La FDSEA Ile-de-France condamne la vision archaïque et manichéenne de certains élus, qui accusent une fois de plus la profession agricole, et cela sans prendre en considération les efforts considérables fournis par les agriculteurs. M. Gérard Praudel, agriculteur à Epinay-sur-Orge, se retrouve accusé, bien qu’il ait modifié considérablement ses modes de cultures afin d’amoindrir les dégâts en cas de fortes précipitations. Il a réduit de moitié ses surfaces de maïs, culture qui retient moins la terre, augmenté les temps de rotation et de dispersion de cette culture. De plus, grâce à une formation spécifique et à l’acquisition d’un matériel onéreux, il cultive désormais majoritairement dans le sens transversal de la pente pour lutter contre l’érosion des sols. En contrepartie, les infrastructures communales ne sont, elles, toujours pas adaptées. L’entretien des digues et fossés, la récupération et le traitement des eaux pluviales, ne sont pas garantis comme il se devrait, et ce, malgré les demandes à répétition de l’agriculteur. M. Gérard Praudel ne peut être tenu comme responsable des dégâts occasionnés par une perturbation météorologique exceptionnelle, qui a d’ailleurs fait l’objet d’une demande par la ville de reconnaissance de l’état de catastrophes naturelles. Dans un contexte de péri-urbanité déjà difficile pour l’agriculture, où les infrastructures urbaines fleurissent, les exploitants agricoles ne peuvent servir de boucs émissaires.« 

Au passage, Damien Greffin, président de la FDSEA Ile de France, y va de son mot personnel : « Il est grand temps de s’interroger, voire de s’indigner sur le sort réservé à l’agriculture francilienne !« 

Morale de l’histoire. Entre une municipalité qui fait peu de cas de l’activité agricole, et une opposition qui ne pense qu’à récupérer le problème pour le transformer en argument électoraliste, l’agriculteur de zone périurbaine, en particulier près de Paris, est souvent considéré comme le dernier interlocuteur dont il faut tenir compte. S’il reste seul, il n’a aucune chance. C’est là que le soutien de la profession entre en jeu. Est-ce suffisant ? On ne le saura qu’à la reprise des négociations sur cette fameuse zone d’activité, qui pourrait attendre justement les prochaines élections municipales (et qui en sont donc devenues un enjeu). Mais au moins, il existe. Et, accessoirement, nous ajoutons notre modeste relais médiatique…

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1 Commentaire(s)

  1. Bon sang, mais quelle tristesse !!!!
    C’est toujours les gars qui font le plus d’efforts qui sont les moins considérés au final.
    La municipalité pourrait faire un projet d’habitation de 10 étages et raser quelques vieilles masures… 😉

    Gardons notre potentiel agricole, surtout quand les agriculteurs (s’)investissent pour améliorer les choses.

    Tenez bon, Gérard et laissez les autres faire les erreurs (administratives, sociétales, etc…)

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