soutiens agriculture dans le monde

Soutiens à l’agriculture, 55 pays passés à la loupe

Le think tank Farm (fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde) a comparé les politiques d’aides à l’agriculture de 55 pays en se focalisant sur l’Afrique. Avec un taux de soutien équivalent à 21 % de la valeur de la production agricole, l’Union européenne est proche de la moyenne du groupe des pays les plus riches de la planète (19,5 %).

Le débat sur les aides agricoles a changé depuis 25 ans. Elles ne sont plus assimilées systématiquement à des éléments distorsifs, qui entravent le fonctionnement des marchés agricoles. Même les experts les plus libéraux ont revu leurs points vus. Les mouvements « de révoltes de la faim » des années 2008/2010, consécutivement aux crises agricoles, les ont conduits à réviser leur discours.

Jean Christophe Debart, directeur du think-tank Farm, présentait, le 16 février dernier, les premiers résultats d’une étude comparative sur les niveaux de soutien de l’agriculture de 55 pays représentant 75 % de la production mondiale agricole. « C’est un travail de bénédictins qui a été réalisé ! », explique-t-il pour qualifier le travail réalisé.

De cette étude, il ressort que les pays les plus riches de la planète sont ceux qui soutiennent le plus leur agriculture, avec des aides équivalentes à 19,5 % de la valeur de la production agricole, alors que leur économie est moins dépendante de ce secteur (en pourcentage du produit intérieur brut).

L’Union européenne se situe dans la moyenne avec un taux de soutien équivalent à 21 % de la valeur de la production agricole contre 22 % pour les Etats-Unis, selon le think tank Farm. En fait, ce taux de soutien à peu près similaire entre ces deux puissances économiques mondiales masque deux réalités différentes. Les farmers américains touchent 192 € d’aides par hectare tandis que les européens, sur de plus petites exploitations, perçoivent 586 € par hectare en moyenne.

A l’échelle des pays les plus riches de la planète, y compris l’Union européenne, les aides publiques à l’agriculture de 19,5 % en moyenne du produit agricole se décomposent en trois catégories. 12,3 % sont directement alloués aux agriculteurs. L’aide à la consommation est de 4,5 % de la valeur de la production agricole et celle au développement rural et à la recherche de 2,7 %. Les trente pays à revenu intermédiaire (ou pays émergents dont font partie la Chine, l’Inde ou encore le Pérou) soutiennent à hauteur de 6,9 % leur agriculture. Dans les pays à faible revenu (en Afrique essentiellement), le taux de soutien n’excède pas 4,2 %.

En fait, les niveaux de soutien masquent plus de disparités entre les pays des de chacun des trois groupes qu’entre les groupes eux-mêmes. Dans le premier groupe de (12+1), le taux de soutien est de 47 % en Norvège et de 0,3 % en Nouvelle Zélande. Le niveau de disparité est aussi très important parmi les pays à revenu intermédiaire. En Chine, les aides à l’agriculture équivalent à 7 % de la valeur de la production agricole mais le niveau de soutien moyen à l’hectare est de 356 €. Il est proche des pays les plus riches membres de l’Ocde (organisation de coopération de développement agricole).

Au Pérou, le taux de soutien de 18 % de la valeur de la production agricole est voisin de celui en vigueur dans l’Union européenne avec cependant des sommes en jeu très inférieures.

Au cours de ces 25 dernières années, deux tendances se profilent. Les niveaux de soutiens des pays à revenu intermédiaires croissent et convergent vers les niveaux de soutien, déclinants, des pays les plus riches. Le taux pivot est de 15 % environ.

En Afrique, les pays n’ont pas les moyens de soutenir financièrement la croissance de leur production agricole. Or celle-ci a été multipliée par quatre sur le continent tandis que le taux de soutien a seulement doublé.

Un indicateur n’a jamais fait pas une politique agricole

Les aides versées ne ciblent pas toujours les publics visés, qui en ont le plus besoin. Elles ne permettent pas de réduire systématiquement les inégalités de revenu entre les villes et les campagnes.

L’instabilité politique et les conflits, en Afrique et au Moyen-Orient notamment, rendent les aides inopérantes et peu efficaces. Les infrastructures construites grâce à ces fonds publics sont parfois détruites.

Enfin, la nature des soutiens alloués diffère d’un pays à l’autre. Les plus riches versent essentiellement des aides à l’hectare tandis que dans les pays à revenu intermédiaire et faible, la part des subventions aux intrants est prédominante.          

En Afrique, les niveaux de soutien sont très volatils et varient au gré d’informations, parfois mal interprêtées, difusées par les marchés de commodités agricoles. Par ailleurs les soutiens à l’agriculture prennent parfois la forme de subventions à la consommation pour réduire les prix des denrées alimentaires payés par les citadins regroupés dans des grandes mégalopoles.

En revanche, plus les pays à revenu intermédiaire s’enrichissent, moins ils taxent leurs produits à l’exportation. Or de telles pratiques tarifaires génèrent des taux de soutiens négatifs et pénalisants. Elles dissuadent les agriculteurs de produire.

Quoi qu’il en soit, les variations des cours de change des monnaies et les normes réglementaires restent des leviers d’action parfois plus efficaces que les aides versées pour conduire une politique agricole sécuritaire. Et en plus, ces outils ne coûtent rien au contribuable.
 

Notre illustration ci-dessous (verger d’arbres avec différentes monnaies) est issue de Fotolia, lien direct : https://fr.fotolia.com/id/76838870.

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