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Lyon, capitale de la culture des roses

A l’occasion d’une récente convention mondiale des sociétés de roses, on a découvert que le bassin lyonnais produit la moitié des roses françaises. Plus surprenant : les dix rosiéristes de la région signent la moitié des nouvelles créations variétales européennes (appelées obtentions). Rencontre avec la célèbre maison Guillot.

Au mois de mai, Lyon fut la première ville française à accueillir la convention mondiale des Sociétés de Roses. Pour l’occasion, la ville avait organisé un « festival des roses » avec des installations artistiques sur le thème de la rose, des conférences, des expositions et de nombreuses animations. Une façon de rappeler qu’à la fin du XIXe siècle, Lyon était le centre mondial de la rose, foyer d’une production variétale exceptionnelle : pendant près d’un siècle, près de 3000 roses ont été créées à Lyon.

Plusieurs facteurs expliquent cette spécialité : une tradition maraîchère et horticole, un climat favorable, la présence d’une certaine bourgeoisie, le soutien de l’industrie textile et des imprimeries, la collection végétale de l’impératrice Joséphine offerte au jardin botanique de Lyon…

La dynamique est rompue lors de la première guerre mondiale, puis repart de plus belle. Actuellement,  dix rosiéristes sont toujours installés dans le bassin lyonnais. Ensemble, ils commercialisent 4 millions de plants par an, ce qui fait de Lyon le second pôle de production en France.

Des roses made in France vendues dans le monde entier

Ces sociétés sont issues de dynasties très anciennes, comme Meilland, Laperrière, Pernet-Duchet ou la roseraie Guillot qui produit des roses anciennes parfumées depuis 1829. « Guillot a inventé des techniques avancées qui font toujours référence, comme le greffage au collet. Ce détail technique a eu une importance mondiale. Par ailleurs, Jean-Baptiste Guillot a créé en 1867 le premier rosier hybride de thé baptisé la France. Ce fut un virage historique : on passait des roses anciennes issues d’hybridations naturelles ou dirigées, à l’hybridation moderne qui sélectionne les pères et mères », explique Olivier Mathis. Directeur du groupe Verdia (Lille), il a racheté en 2011 la célèbre maison lyonnaise au dernier descendant de la famille Guillot. « Nous avons une grande ambition pour cette grande et belle marque. Elle offre à notre groupe des perspectives à l’export, car notre marque Décorosiers n’est commercialisée qu’en France. Nous avons beaucoup investi dans la recherche et nous préparons de nouvelles gammes très innovantes. La rose est un produit porteur et nous n’avons aucune inquiétude quant à l’avenir », certifie Olivier Mathis, sans communiquer son chiffre d’affaires.

Dernière innovation : Guillot s’est lancé en 2012 dans la production sur rosiers en bouture. « C’est relativement nouveau, et cela permet de diviser par deux les cycles de production », annonce le directeur.

Le catalogue Guillot présente 300 variétés en plus d’un patrimoine de 650 variétés anciennes. Les roses sont toujours produites en pleine terre sur une vingtaine d’hectares à Chamagnieu en Isère, et une petite partie est produite dans la région d’Angers. Les hybridations et les semis sont toujours effectués à Lyon. La société emploie une dizaine de salariés et mène aussi des recherches sur les maladies du rosier. En 2014, la société a modernisé ses serres multi-chapelles automatisées (l’investissement s’élève à 150 000 euros).

Une économie très spécifique

Entre les premiers essais d’hybridation et la commercialisation, il peut s’écouler entre cinq à dix ans. Bien sûr, sur l’ensemble des créations, peu de roses seront commercialisées… Pour rentabiliser cet effort, les pépiniéristes vendent des licences d’exploitation à d’autres rosiéristes (via des éditeurs chargés de la diffusion), en plus de leur propre production.  En moyenne, les créations sur pied ou sous licence se négocient aux alentours d’un euro par pièce. Ainsi, la roseraie Guillot recense 25 licenciés en France, mais aussi en Allemagne, au Japon, en Australie, au Danemark… Elle réalise un tiers de son chiffre d’affaires à l’export, et un tiers en vente par correspondance. Des partenariats ont récemment été conclus avec la grande distribution spécialisée (les enseignes Botanic et Jardiland).

La roseraie Guillot détient le label MPS, une norme environnementale des Pays-Bas qui fait référence en Europe. Elle garantit une production raisonnée, avec des doses chimiques limitées. « Cela correspond parfaitement à notre démarche éco-responsable », insiste Olivier Mathis. Pour conclure, il témoigne également de l’effervescence et de la solidarité des rosiéristes de Lyon : « Nous avons une vraie synergie entre confrères. Nous échangeons du matériel, on co-finance les programmes de recherche de l’Inra sur la rose… Ce colloque au mois de mai fut une très belle expérience. Quelle autre fleur est capable de réunir une trentaine de nations ? C’était impressionnant et très enthousiasmant ».

Lyon est aussi à la pointe de la recherche sur la rose : l’Ecole normale supérieure travaille sur le séquençage du génome du rosier, tandis que le Centre de ressources de botanique appliquée fait partie d’un réseau de conservateurs de roses depuis 2008.

 

En savoir plus : http://www.lyon-roses-2015.org (site internet de la manifestation du festival des roses qui s’est déroulé à Lyon en mai) ; http://www.roses-guillot.com (site des roses de la maison Guillot) ; http://societefrancaisedesroses.asso.fr (site de la société française des roses) ; http://www.rosesanciennesenfrance.org (site de Roses anciennes de France) ; http://www.lyonhorticole.com (site de la Société lyonnaise d’horticulture) ; http://www.crba.fr (site du centre de ressources de botanique appliquée).

Quelques expositions toujours en cours à Lyon : http://www.gadagne.musees.lyon.fr/index.php/histoire_fr/Histoire/Expositions/Expositions-temporaires/Roses (« Roses, une histoire lyonnaise », jusqu’au 30 août au musée Gadagne) ; http://www.archives-lyon.fr/archives/sections/fr/expositions/expositions_preceden2700/2015/expositions_2015/roseraie (« Au commencement, la roseraie du Parc », aux archives municipales jusqu’au 21 août) ; http://levegetalsublime.com/laroseetlevent (exposition photo « La Rose et le Vent » de Nicolas Roux dit Buisson, Roseraie du parc de la Tête d’Or jusqu’au 10 octobre) ; http://www.imprimerie.lyon.fr (« Le Jardin des imprimeurs », au musée de l’imprimerie, jusqu’au 16 août).

Les photos qui illustrent cet article nous ont été fournies par la maison Guillot.

Ci-dessous, champ de rosiers à Chamagnieu.

Ci-dessous, jeunes semis de rosiers issus de notre travail de l’hybridation.

Ci-dessous, baptême de la dernière nouveauté de la maison Guillot, avec sa marraine, Ingrid Betancourt.

Ci-dessous, le rosier Paul Bocuse.

Ci-dessous, le rosier Elodie Gossuin.

Ci-dessous, Olivier Mathis, directeur de la maison Guillot.

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