agriculture familiale

Les exploitations familiales perdent du terrain en France

Les exploitations familiales perdent irréversiblement du terrain. Elles prennent progressivement l’allure d’une firme de taille souvent bien modeste face aux mastodontes répandus sur les cinq continents jusqu’en Europe centrale. Dans la révolution silencieuse de l’agriculture française, 10,2 % des exploitations sont désormais assimilables à des firmes.

L’internationalisation des échanges de produits agricoles et la mutation des exploitations en firmes vont de pair. Cette organisation massique conquiert tous les continents même si coexistent toujours des formes d’agricultures de subsistance ou familiale. En France, cette mutation est récente et surprend par son ampleur.

10,2 %, c’est la proportion des exploitations agricoles françaises assimilables à des firmes, selon François Purseigle. Il est le coordinateur, avec Geneviève Nguyen et Pierre Blanc, de l’ouvrage « Le nouveau capitalisme agricole, de la firme à la ferme », présenté le 29 novembre dernier lors d’un débat organisé par le think tank Saf agr’Idées.

Ces exploitations aux allures de firmes de plus en plus nombreuses se forment, dans l’indifférence des Français, alors que leur dimension économique est au moins aussi importante que « la ferme des 1 000 vaches » ou les sites d’engraissement de jeunes bovins fortement médiatisés.

La majorité des firmes identifiées ne se sont pas constituées ex-nihilo mais issues de l’expansion d’exploitations familiales sur plusieurs dizaines d’années.

Cette évolution silencieuse traduit avant tout la grande capacité des agriculteurs d’adapter leur outil de production à leur environnement économique, malgré les rigidités administratives et les entraves réglementaires auxquelles ils font face. Elles sont dénoncées régulièrement par les représentants des syndicats professionnels.

A l’échelle de la ferme France, la typologie des exploitations agricoles françaises réalisée par les auteurs de « Le nouveau capitalisme agricole, de la firme à la ferme », dessine leur trajectoire d’évolution vers des modèles de « firmes familiales » pour devenir ensuite des « firmes non familiales » plus importantes.

Les micro-exploitations sont davantage à l’écart de cette dynamique. Les formes exploitations familiales sous forme sociétaire sont en revanche les prémices d’une évolution vers une allure de firme.

Résultat, « les 10,2 % d’exploitations agricoles aux allures de firmes représentent 28 % de l’emploi agricole et 30 % de la production agricole », écrivent Laurent Legagneux et Valérie Olivier-Salvagnac, auteurs du chapitre intitulé « Les exploitations agricoles françaises aux allures de firmes ».

Ils distinguent les firmes non familiales (4,1 %) des familiales (6,1%). Elles sont plus nombreuses dans les régions viticoles (Bordelais, champagne) mais aussi dans la vallée du Rhône et le long de la côte méditerranéenne.

Dans les exploitations aux allures de firmes non familiales, les auteurs différencient les « très grandes exploitations agricoles » où la contribution de la main-d’œuvre familiale est réduite (10% équivalent temps plein). Mais dans ces entreprises, « les marqueurs familiaux n’ont pas tous disparu…. Les statuts juridiques peuvent rester très classiques (Earl, Scea) et les associés non familiaux être rares », soulignent les auteurs. Mais le recours au salariat est systématique. « Les otex (Ndlr : orientations technico-économiques des exploitations) surreprésentées sont la viticulture (37 %), l’horticulture (15 %), l’arboriculture (14 %) et le maraichage (11 %) », rapportent encore les auteurs. 

Les deux autres sous-groupes de firmes non familiales sont « les domaines agricoles non familiaux » où les deux tiers des exploitations sont viticoles, et les « combinaisons d’unités productives non familiales ».

Les « exploitations aux allures de firmes familiales » « combinent toujours différents critères de la logique de firme mais de manière moins marquée que dans le groupe précédent », rapportent encore Laurent Legagneux et Valérie Olivier-Salvagnac. La part de la main-d’œuvre familiale est équivalente à la main-d’œuvre contractuelle. Le sous-groupe « des domaines agricoles familiaux » est composée aux deux tiers par des exploitations viticoles et celui des « ateliers de production à caractère patrimonial » comprend 35 % d’exploitations « grandes cultures ».
 

En savoir plus : http://www.pressesdesciencespo.fr/fr/livre/?GCOI=27246100509220 (où trouver le livre cité en référence de cet article).

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