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La question est de savoir comment développer les biocarburants

Le site internet Newsring vient de lancer un débat sur l’utilité de continuer à développer les biocarburants en France. Voici ma contribution à ce débat.

A mon sens, la question n’est pas « faut-il continuer (ou arrêter) les biocarburants ? », mais « comment développer les biocarburants dans le contexte actuel ?« .

Je commence par un petit point de sémantique. Les biocarburants sont de fait bénéfiques à l’environnement. Les agrocarburants sont le nom donné aux biocarburants par les détracteurs qui en dénient l’effet positif sur l’environnement. Donc, dans vos recherches, selon que vous verrez utilisé l’un ou l’autre terme, vous saurez déjà la tendance du propos.

Je trouve personnellement dommage qu’il y ait cette opposition. Les arguments en faveur des biocarburants (je vais les appeler « biocarburants » par commodité, mais aussi parce qu’il s’agit du terme officiel avalisé par le Sénat lors d’un débat sémantique qui avait eu lieu au moment du vote du Grenelle de l’environnement) n’ont pas changé. L’indépendance énergétique reste un enjeu de premier ordre. Et lorsque l’on parle d' »énergies », il ne faut pas tout confondre. L’électricité, le débat sur le nucléaire en est un aspect, lié à l’éventualité d’accentuer les programmes éoliens en compensation. Les carburants un autre, sans connexion directe.

Là où les biocarburants ont créé des problèmes, ce n’est pas chez nous, en France. L’expansion de l’huile de palme, qui a modifié le paysage de plusieurs pays tropicaux, doit manifestement cesser. Dans notre pays, des cultures allant vers les biocarburants ne modifierait pas les enjeux de la biodiversité. On sait que celle-ci est malheureusement en baisse constante, mais sur une faible pente. Le fait de cultiver des plantes pour des biocarburants ne modifie pas cette tendance. La question de la biodiversité se pose donc à un autre niveau, et ne doit pas entrer en ligne de compte par rapport aux choix sur les biocarburants.

La condition pour que les biocarburants aient effectivement un impact positif sur l’environnement est de les produire sur notre territoire. Car le raisonnement devient abscons lorsqu’il s’agit d’importer des biocarburants : là, effectivement, on dépense de l’énergie pour en importer, l’impact négatif sur l’environnement est évident.

Reste la question : comment en cultiver chez nous sans pour autant remettre en cause les cultures vivrières dont nous avons besoin ? La réponse en une phrase n’existe pas, je vais me contenter de lancer des pistes, qui elles-mêmes mériteraient un tout autre développement.

Primo, de plus en plus d’agriculteurs font deux récoltes par an. Deux cultures vivrières par an, c’est très difficile, malgré tous les progrès. Mais réaliser une culture vivrière puis une culture en vue de réaliser des biocarburants est davantage à la portée technique de nos agriculteurs.

Secundo, la France exporte des céréales, et même beaucoup. Pour nourrir la planète, ce sont les cultures sur place qu’il faut privilégier, donc axer les efforts pour les pays qui souffrent de la faim soient davantage en mesure de cultiver eux-mêmes. Si cet objectif, encore lointain certes, devait être atteint, la vocation exportatrice de pays comme la France perdrait de son ampleur : d’où la possibilité de cultiver des plantes à biocarburants, permettant de limiter la dépendance pétrolière, en lieu et place des cultures à vocation exportatrice.

Tertio, pour cultiver des plantes à vocation vivrières ou d’autres, l’agriculteur doit avoir un revenu assuré, relativement stable, lui permettant d’établir des prévisions sur le terme. Or, il est un fait observé sur les marchés, les cultures à vocation de biocarburants viennent stabiliser les prix. Avec ses prix stabilisés par une partie de ses parcelles en biocarburants, l’agriculteurs peut plus facilement cultiver des cultures vivrières à côté. L’un complète l’autre plutôt qu’ils ne se contredisent.

Quatro, que ce soit pour le biodiesel ou le bioéthanol, la technologie française est très avancée. Les outils agricoles mais aussi industriels induits (et donc avec de très nombreux emplois à la clé) sont performants : ce serait une réelle erreur de les remettre en cause.

Quinto, la recherche existe aussi sur les biocarburants (elle est même pointue), que l’on appelle de première génération, puis deuxième, troisième… De manière à optimiser l’utilisation de la plante, et éviter tout gaspillage : feuilles, tige, racines, tout est utilisé désormais.

Je pense donc que l’heure n’est pas à être pour ou au dénigrement, mais à avancer avec responsabilité, en sachant respecter les bons équilibres.

En savoir plus : http://www.newsring.fr/planete-sciences/947-faut-il-continuer-a-developper-la-production-des-biocarburants (l’ensemble des participations au débat proposé par le site Newsring).

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