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Crise laitière, les pays exportateurs s’en sortent avec un marché intérieur dynamique

Après deux années de crise laitière, les pays qui s’en sortent le mieux sont ceux qui autoconsomment une part croissante de leur production. En tête les Etats-Unis.

3 % de la production mondiale exportée à 95 % : la Nouvelle-Zélande est le pays le plus impacté par l’effondrement des prix mondiaux du lait. Et la situation n’est pas prête de se redresser.

Certes Fontera parie sur un redressement de la conjoncture dans les prochains mois. Pour la nouvelle campagne 2016/2017 qui a débuté le 1er juin dernier, John Wilson, le président de la coopérative a annoncé que le lait sera payé 4,25 dollars néozélandais par kilogramme de matière sèche ($ nz/kg MS), soit environ 187 €/1 000 litres pour les premiers mois de la nouvelle campagne 2016/2017.

Pas de sortie du tunnel en vue

Mais cette hausse de 0,35 $ nz/kg MS par rapport au prix de la précédente campagne ne sera pas suffisante pour redresser la situation financière exsangue des éleveurs néozélandais. 10 à 25 % des fermes seraient menacées de disparaître si la conjoncture ne s’améliore pas sensiblement d’ici 2017, selon différentes sources professionnelles ou politiques. La dernière campagne s’est achevée avec une marge nette de -1,2 dollar par kilo de MS en 2015/2016 contre +1,5 dollar en 2014. Il y a un an, un quart des exploitations dégageait déjà un EBE négatif. La stratégie des éleveurs de produire coûte que coûte, même à perte, pour amortir les investissements massifs réalisés il y a quelques années, lorsque les marchés du lait étaient porteurs, s’avère désastreuse financièrement. En 2015, les éleveurs sont restés sur leur lancée. La dévaluation du dollar néo-zélandais n’a fait que retarder l’ajustement indispensable de leur production.

« Après 15 années de hausse de la collecte (+ 76 % par rapport à l’an 2000), la dernière campagne s’achève avec un recul de 1,5 %. L’an prochain, le cheptel laitier pourrait diminuer de 7 % », explique Sébastien Bouyssière de l’Institut de l’élevage. Il intervenait durant le colloque « Les marchés mondiaux du lait et de la viande en 2016. 

Dans les autres pays, la part plus importante de la production autoconsommée de lait et le dynamisme de leur marché intérieur atténuent la baisse du prix du lait payée aux éleveurs.

En Australie, les éleveurs s’en sortent mieux car 40 % de la production de lait sont dirigés vers le marché intérieur.

Aux Etats-Unis, la filière laitière affiche une certaine insolence. Sur les 95 millions de tonnes de lait produites, 89 % sont consommés par les Américains. Le prix du lait (jusqu’à 500 dollars par tonne en 2014) a entamé sa baisse bien après les autres pays producteurs (la tonne était payée 377 $ en 2015). La sécheresse a ralenti la hausse de la production en raison d’un déficit prononcé en fourrages tandis que l’achat de produits laitiers affiche un dynamisme impressionnant. Les Américains préfèrent de plus en plus le beurre à la margarine !

Une occasion manquée pour les Européens

La priorité n’est plus l’exportation. De toute façon, la hausse du dollar rend les produits de moins en moins compétitifs. En revanche, les importations de fromages et de beurre ont fortement augmenté. La balance commerciale a chuté de 2 milliards de dollars en un an.

« Signe de bonne santé de la filière laitière américaine, le faible succès remporté par le programme d’assurance-marge du Farm Bill (Ndlr : politique agricole des Etats-Unis), explique Sébastien Bouyssière. Les marges sur coût alimentaire ont évidemment baissé ces derniers mois mais elles sont encore supérieures à 2012 et 2013. »

Dans l’Union européenne, les exportations de produits laitiers représentent aussi une faible part de la collecte de lait. Mais deux scénarios prennent forme. Les pays d’Europe du Nord produisent plus pour exporter plus ce qui accentue la pression sur les prix et pénalisent entre autres la France, et ses producteurs, plus « sages ». La contractualisation limite l’emballement constaté en Irlande ou aux Pays-Bas par exemple.

Par ailleurs, la morosité du marché intérieur ne permet pas d’absorber les quantités de lait supplémentaires produites.

Comme en Nouvelle-Zélande, les producteurs laitiers nord-européens produisent plus pour diluer, sur un volume de lait plus important de lait, les coûts des investissements engagés en prévision de la fin des quotas. Au final, la crise les a empêchés de profiter de l’embellie des marchés des années passées alors que la Nouvelle-Zélande avait su la saisir, alors que l’Union européenne était encore soumise au régime des quotas.

Par ailleurs, l’Union européenne est de plus en plus concurrencée par la Nouvelle-Zélande en commercialisant elle aussi de la caséine ou d’autres produits secs. A l’export, son bilan est du reste tout à fait satisfaisant. Victime évidemment de l’embargo russe et de la baisse des exportations vers la Chine, la Nouvelle-Zélande a su maintenir ses exportations en volume en diversifiant ses débouchés auprès d’autres pays clients. Mais en termes de chiffre d’affaires, les ventes se sont effondrées de près de 6 milliards de dollars américains entre 2015 et 2014.

 

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