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Bourgogne, une douceur défavorable à la vernalisation

Depuis les semis, la douceur est omniprésente en Bourgogne, bénéfique au développement des céréales à paille. Ces températures douces persistantes ont accéléré le processus de vernalisation. Focus sur ce phénomène et les impacts du climat de l’automne et du début de l’hiver sur le désherbage et les maladies.

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Les implantations de céréales ont eu lieu cette année majoritairement entre fin septembre et début octobre (75 % des blés et 90 % des orges) dans des sols secs en surface. Une deuxième vague de semis fin octobre a été réalisée dans de bonnes conditions.

Depuis le semis, les températures ont été remarquablement douces (figures 1 et 2). Les cumuls relevés depuis le 5 octobre sont parmi les plus élevés depuis vingt ans, se situant à un niveau de 1 année sur 10 parmi les plus chaudes.


Figure 1 : évolution des cumuls des températures moyennes depuis le 5 octobre 2014 sur la station météorologique de Dijon (fin des données 20/01/2015, source : Météo France – analyse fréquentielle de 1994 à 2014)

 


Figure 2 : évolution des cumuls des températures moyennes depuis le 5 octobre 2014 sur la station météorologique d’Auxerre (fin des données 20/01/2015, source : Météo France – analyse fréquentielle de 1994 à 2014)

 


Côté pluie, le cumul est aussi important surtout pendant la première décade de novembre à Dijon, où il est tombé 100 mm en 2 jours ! Avec 335 mm de pluviométrie cumulée à Dijon depuis début octobre, l’année se situe parmi la plus humide depuis 20 ans (figure 3). A Auxerre, le cumul des pluies est plus faible (250 mm), soit dans la moyenne des 20 dernières années (figure 4).


Figure 3 : position de l’année 2015 en cumul des pluies et températures moyennes pour la station météorologique de Dijon du 1er octobre au 21 janvier (fin des données 21/01/2015, source : Météo France – analyse fréquentielle de 1994 à 2014)


Figure 4 : position de l’année 2015 en cumul des pluies et températures moyennes pour la station météorologique d’Auxerre du 1er octobre au 21 janvier (fin des données 21/01/2015, source : Météo France – analyse fréquentielle de 1994 à 2014)

Des impacts sur la vernalisation

Ces conditions ont eu diverses conséquences sur l’état des cultures et le contexte agronomique de l’année. Les températures très douces ont permis une levée et une croissance très rapide. Les semis d’octobre sont actuellement en plein tallage, leur développement végétatif est souvent important voire exubérant et les cultures recouvrent très souvent intégralement les inter-rangs. Le développement d’une céréale (qui sera plus ou moins long selon le type variétal) est modulé par les besoins en vernalisation et en photopériode.

La vernalisation correspond à un séjour à de basses températures nécessaire à l’acquisition du développement floral. Les variétés se différencient vis-à-vis de la durée du séjour à ces basses températures pour avoir leurs besoins comblés : de 60 jours à 20 jours selon le caractère plus ou moins hiver de la variété (ou degré d’alternativité). En termes de nombre de jours vernalisants (avec une température moyenne journalière comprise entre 3°C et 11°C) au 20 janvier, l’année 2015 se situe dans la même tendance que 2014 mais en dessous de 2012. A date calendaire égale, les cultures sont donc légèrement moins avancées cette année qu’en 2012.

Une fois que la vernalisation des céréales est terminée, la résistance au froid disparaît progressivement sans capacité à se « réendurcir » à nouveau. En clair, s’il fait doux dans les 15 jours à venir, les cultures seront de moins en moins aptes à encaisser de nouvelles chutes de températures, même si elles sont progressives.

De plus, les céréales sont des espèces dites de jours longs préférentiels, ce qui signifie que les jours longs favorisent la vitesse d’apparition des stades liés au développement floral (comme par exemple, le stade épi 1 cm). Les degrés jours accumulés à partir de janvier ont donc plus de poids que ceux accumulés pendant l’automne.

Pour les reliquats azotés sortie hiver, la probabilité est importante qu’ils soient faibles cette année, du fait d’une quantité, sans doute, importante d’azote absorbé par la culture. Ces reliquats pourraient être d’autant plus faibles que la pluie a été importante pendant l’hiver comme à Dijon par exemple.

Adapter le désherbage de rattrapage à la flore

Beaucoup de désherbages d’automne – principalement antigraminées – ont pu être réalisés, avec généralement d’assez bonnes efficacités. Par contre, on assiste à des levées et des développements rapides de dicotylédones notamment gaillets et vivaces. Il faudra être vigilant sur les rattrapages : les doses et le choix de produits devront être adaptés soigneusement aux flores visées et au développement des mauvaises herbes les plus avancées.

Surveiller la rouille jaune de près

Le début de campagne est favorable au maintien d’une pression importante de maladies foliaires et du pied. Le fond de cuve de septoriose et de piétin verse est important, l’avenir est lié à la pluviométrie du printemps et notamment du mois de mars.

Cette année, une attention toute particulière sera portée à la rouille jaune compte tenu de la pression exceptionnelle de cette maladie en 2014. Après une période estivale très pluvieuse et un début d’automne doux, une quantité impressionnante de repousses a vu le jour. Les rouilles, parasites biotrophes, ont ainsi pu se maintenir sur ces plantes-hôtes pendant la période d’interculture avant de poursuivre leur cycle de développement sur les jeunes semis. L’inoculum est donc bien présent. Les premières pustules de rouille jaune sont signalées sur les plantules de céréales : attention, aux stades précoces, elle peut être facilement confondue avec la rouille brune.

Une période sèche et froide peut très fortement limiter la pression. Il est donc prématuré d’envisager une adaptation spécifique des protections envisagées, mais il faudra rester attentif sur le suivi de ces maladies.

Diane CHAVASSIEUX (ARVALIS – Institut du végétal)

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