cover blank wikiagri

Blé, comment raisonner l’apport tallage

Le climat de cet hiver nous fait perdre la tête ! Jusqu’à maintenant, il se caractérisait par une quasi-absence de gelées, avec un mois de janvier particulièrement doux qui a battu tous les records de pluviométrie. Depuis début février, la petite chute des températures est synonyme du retour de l’hiver. Dans ce contexte, comment gérer le premier apport d’azote ? L’exemple de la Bourgogne-Franche-Comté.

–stop–

Excès d’eau et de températures : quelles conséquences sur le blé ?

Depuis le semis, les cumuls de pluies sont excédentaires d’environ 100 à 200 mm de plus que la médiane des 20 dernières années (carte 1). Du côté des températures, le cumul des températures est également supérieur à la médiane de l’ordre de 100 à 150 °C en base 0 (carte 2). De plus, sur la même période, le rayonnement cumulé est très faible, au niveau du décile 1, soit 1 année sur 10 parmi les moins ensoleillées.


Carte 1 : Ecart à la somme des pluies du 1er octobre 2017 au 31 janvier 2018 par rapport à la médiane 1997-2016

Source : Arvalis-Institut du végétal / Météo-France


Carte 2 : Ecart à la somme des températures du 1er octobre 2017 au 31 janvier 2018 par rapport à la médiane 1997-2016

Source : Arvalis-Institut du végétal / Météo-France

Quelles sont les conséquences sur le développement du blé ?

• La douceur de l’automne et de l’hiver a été favorable au maintien d’une minéralisation modérée.

• La douceur de l’automne a permis aux semis précoces un bon niveau de tallage.

• Les situations d’hydromorphie génèrent un milieu anoxique qui aboutit à un ralentissement voire un arrêt complet de la croissance des racines. L’absorption de minéraux (dont l’azote) est donc réduite limitant la croissance des parties aériennes.

• Les rayonnements faibles limitent la photosynthèse et donc la croissance des plantes.

â–º Le potentiel de croissance offert par les températures douces et l’absence de gel n’a donc pas été valorisé par les plantes dans les situations les plus humides mais les parcelles saines affichent une végétation satisfaisante.

Comment gérer le premier apport d’azote ?

Du semis jusqu’à fin tallage, les besoins en azote sont faibles : environ 50 unités sont nécessaires, facilement trouvées dans le milieu en particulier cette année compte tenu de la douceur encore présente en janvier. Le meilleur indicateur est de faire une analyse de reliquat d’azote sortie hiver (RSH) dans votre parcelle.

La pluviométrie conséquente enregistrée depuis le début du mois de décembre conduira vraisemblablement les reliquats d’azote dans le sol vers des valeurs moyennes à faibles. Les doses totales d’azote prévisionnelles qui en découleront seront donc probablement un peu plus élevées que la moyenne pluriannuelle.

Dans ce contexte, comment gérer le premier apport d’azote ?

Trois situations se dégagent :
• Parcelles engorgées : attendre un ressuyage correct pour permettre à la culture de reprendre une phase de croissance active avec une bonne activité racinaire et une assimilation correcte de l’azote apporté.

• Parcelles saines : le reliquat d’azote sortie hiver est généralement moyen à faible. Un 1er apport de l’ordre de 30 à 50 u N peut être réalisé. Plus l’apport est précoce, moins il est valorisé d’autant s’il ne pleut pas 15 mm dans les 15 jours suivants. En moyenne, cet apport n’est valorisé par la plante qu’à 50 %.

• Parcelles avec un début de montaison constaté dans le Nord de l’Yonne sur des semis précoces : si le RSH est faible, augmenter le 1er apport à partir du 15 février et se référer à son technicien de conseil habituel car chaque situation est un cas particulier.

â–º Ne pas apporter trop d’azote trop tôt permet d’apporter l’engrais au plus proche des besoins, de limiter le risque de verse et d’assurer une bonne teneur en protéines en appliquant un report de l’azote vers la fin de la montaison.


De plus, obisko, le stade épi 1 cm devrait être atteint entre le 20 et le 25 mars en situations précoces et début avril en situations tardives, soit dans des dates médianes.

Pour rappel, il est important de désherber avant de fertiliser afin de ne pas « nourrir » les adventices.

Hiver pluvieux : ne pas oublier le soufre !

A partir du stade épi 1 cm, les céréales à paille peuvent exprimer des carences en soufre : foyers ou bandes « jaunes ». Contrairement à une carence en azote, ce sont les jeunes feuilles qui jaunissent (stries jaunes ou vert clair le long des nervures).

Un manque en soufre pénalise le rendement via la baisse du nombre d’épis et parfois leur fertilité. La perte de rendement peut aller jusqu’à 25 q/ha dans les situations les plus carencées.

Le tableau 1 permet d’évaluer son risque de carence en soufre. La quantité à apporter est déterminée en fonction du type de sol, de l’historique de la parcelle (fertilisation sur le précédent, apport de MO) et des niveaux de pluviométrie atteints. Les précipitations rencontrées dans la région cet automne et cet hiver ont globalement favorisé son lessivage (carte 3).


Tableau 1 : Apport conseillé en soufre sur céréales à pailles pour les situations sans apports réguliers de fumier depuis 20 ans

Et même dans les situations avec apports organiques réguliers (situations avec élevage), on préconise un apport de 20 à 30 kg SO3/ha dans le contexte de l’année de pluviométrie exceptionnelle.


Carte 3 : Cumul de pluviométrie du 1er octobre 2017 au 11 février 2018

Source : Arvalis-Institut du végétal/Météo-France

 

Diane Chavassieux, Luc Pelce (Arvalis – Institut du végétal),C. Boully (Bourgogne du Sud), M. Pageot (Ets Bresson), JB Goulier (CA 21), MA Loiseau (CA89), M. Mimeau (Dijon Céréales), D. Lachaud (SAS Ruze), A. Petit (SeineYonne), E. Bonnin (Soufflet Agriculture).

 

Article Précédent
Article Suivant